Pascal Ide, « Huit questions sur ma vie », plaquette diffusée par l’ADV à 200 000 exemplaires, Pâques 2003.
« Je suis chrétien. Donc, je suis pro-vie et je refuse la culture de mort sous toutes ses formes. » Comment dire le contraire ? Pourtant, ai-je assez conscience que le don de la vie est d’abord une bonne nouvelle (étymologiquement : un Evangile) pour moi ? Et que je ne peux l’annoncer à l’autre que si je l’ai d’abord reçu pour moi ?
Huit questions – qui sont aussi des conseils de vie – pour (re)découvrir le don de la vie.
1. Est-ce que je suis vivant ?
La réponse semble évidente. Et pourtant… Etre vivant, c’est se mouvoir soi-même, être l’auteur de ses actes. Dire « oui » à la vie, c’est donc d’abord s’accepter comme unique et irremplaçable. Or, si souvent, nous n’existons que par l’autre. Nous n’osons pas affirmer nos désirs, nos convictions ; ou nous désirons (et nous attristons de ne pas avoir) ce que l’autre possède au lieu de nous réjouir de ce que nous possédons et de ce que nous sommes : la jalousie est, en son fond, une ingratitude.
2. Est-ce que je suis heureux d’être vivant ?
Autre chose est de savoir que l’on est vivant, autre chose de s’en réjouir. La vie est un don. Plus encore, elle est le fruit d’un amour : quel que soit l’amour dont mes parents m’ont aimé, la foi chrétienne certifie que le Père, le Fils et l’Esprit m’aiment sans retour, sans retard et sans restriction, que Dieu a créé en moi une âme spirituelle et immortelle. Est-ce que j’accueille avec gratitude cette vie que Dieu me donne ?
3. Est-ce que je prends soin de ma vie ?
Est-ce que je donne à mon être (mon corps, mon intériorité), le repos, la détente, la nourriture, etc. dont ils ont besoin ? « Celui qui ne prend pas le temps de se soigner, devra prendre le temps d’être malade », disait un médecin.
4. Ai-je conscience que je pourrais mourrir ?
Qui ignore qu’il mourra un jour ? Pourtant, ai-je conscience que cette possibilité est de chaque instant ? Combien de personnes (et pas seulement des adolescents) jouent avec leur existence, comme s’ils étaient immortels ou invulnérables, en pratiquant des sports extrêmes, en buvant, en fumant inconsidérément, etc. Aimer la vie, c’est aussi veiller sur ce don fragile, le protéger, l’entretenir.
5. Est-ce que j’accueille toute vie ?
Certes, l’homme a besoin des animaux et des végétaux, par exemple pour se nourrir ; certes, la vie de l’homme présente une différence essentielle avec les autres formes de vie. Il n’empêche que nous sommes solidaires et responsables des autres vivants ; de plus, comme le dit saint Thomas d’Aquin, « celui qui éprouve de la compassion à l’égard des animaux, est disposé à la ressentir envers les hommes ».
6. Est-ce que je transmets la vie ?
« Vous avez reçu gratuitement, donnez gratuitement » (Mt 10,8). La meilleure manière de garder la vie est de la transmettre. Soit la question de la venue d’un nouvel enfant dans une famille (sans oublier qu’il y a de multiples autres manières d’être fécond). Donner la vie requiert de la générosité (s’arracher à son confort et à son égoïsme), du courage (le risque-zéro n’existe pas et le courage est la vertu qui intègre la crainte du risque), de la prudence (les conditions matérielles, psychologiques, etc. sont-elles réunies pour accueillir la vie ?).
7. Suis-je conscient que je suis moi aussi traversé par la culture de mort ?
Notre société a placé la qualité de la vie au-dessus de la vie. Ainsi, lorsqu’une vie ne présente pas toutes les qualités désirées, elle l’élimine ou elle l’exclut. Est-ce que, moi aussi, je ne refuse pas que mon corps vieillisse ? Est-ce que je ne suis pas tenté de m’écarter des personnes disgrâciées, de juger les blessés de la vie ?
8. Est-ce que je veux la vie éternelle ?
Dieu nous donne la vie humaine par nos parents ; mais, plus encore, il veut nous donner sa vie, la Vie, par le baptême (même si d’autres voies sont possibles) : cette Vie divine, la vie de la grâce que Jésus nous apporte (1 Jn 1,2), vie dans la foi, nous prépare à la vie éternelle, vie de bonheur qui exclut toute mort (Jn 11,26 ; Ap 21,4).
Elle nous pardonne aussi de toutes nos violences et nos péchés contre la vie. Est-ce que j’ai conscience de l’énergie vivifiante du baptême en moi ? Est-ce que je la nourris par la messe dominicale ? Est-ce que j’accepte que Dieu, riche en miséricorde (Ep 2,4), me pardonne mes fautes et vienne me guérir, à travers le sacrement de la réconciliation ?
Ma vie, la vie : accueillons-la, célébrons-la, annonçons-la, servons-la, donnons-la.
Pascal Ide