Quatrième partie. Le remède particulier : les conférences sur le climat. Relecture [« 4. Les Conférences sur le climat : progrès et échecs »]
Redisons-le, l’un des charismes du pape actuel est sa capacité de relecture. Il l’exerce de manière particulièrement pertinente et fine sur cet événement de grande importaance que sont les conférences sur le climat.
1) Les Conférence en général
- Depuis des décennies, les représentants de plus de 190 pays se réunissent régulièrement pour aborder la question du climat. La Conférence de Rio de Janeiro de 1992 a débouché sur l’adoption de la Convention sur le Changement Climatique (UNFCCC), un traité qui est entré en vigueur lorsque les pays signataires ont procédé aux ratifications nécessaires, en 1994. Ces États se réunissent chaque année lors de la Conférence des Parties (COP), l’organe de décision le plus élevé.
2) Quelques Conférences en particulier
a) La COP3
Certaines ont été des échecs, comme celle de Copenhague (2009), tandis que d’autres ont permis de franchir des étapes importantes, comme la COP3 de Kyoto (1997). Son précieux Protocole a fixé comme objectif la réduction des émissions globales de gaz à effet de serre de 5 % par rapport à 1990. L’échéance était fixée à 2012, mais elle n’a manifestement pas été respectée.
- Toutes les parties se sont en outre engagées à mettre en œuvre les programmes d’adaptation déjà en cours pour réduire les effets du changement climatique. Une aide a également été prévue pour couvrir les coûts de ces mesures dans les pays en voie de développement. Le Protocole est entré en vigueur en 2005.
b) Les COP suivantes
- Par la suite, un mécanisme pour les pertes et dommages (loss and damage) causés par le changement climatique a été proposé, qui reconnaisse les pays les plus riches comme les principaux responsables et qui cherche à compenser les pertes et dommages provoqués par le changement climatique dans les pays les plus vulnérables. Il ne s’agit plus de financer l’“adaptation” de ces pays, mais de les indemniser pour les dommages qu’ils ont déjà subis. Cette question a fait l’objet d’importantes discussions lors de diverses COP.
c) La COP21
1’) Exposé des préconisations
- La COP21 de Paris (2015) a été un autre moment important car elle a débouché sur un accord impliquant tout le monde. Elle peut être considérée comme un nouveau départ étant donné que les objectifs fixés lors de l’étape précédente n’ont pas été atteints. L’accord est entré en vigueur le 4 novembre 2016. Bien qu’il s’agisse d’un accord contraignant, toutes les exigences ne sont pas des obligations au sens strict et certaines d’entre elles laissent une grande marge de manœuvre. En outre, pour les obligations qui ne sont pas respectées, aucune sanction n’est strictement prévue et il n’y a pas d’instruments efficaces pour en garantir l’observation. L’accord prévoit également des formes de flexibilité pour les pays en voie de développement.
2’) L’évaluation
- L’Accord de Paris présente un objectif majeur à long terme : maintenir l’augmentation de la température globale en dessous de 2 °C par rapport aux niveaux préindustriels, tout en visant à descendre en dessous de 1,5 °C. On travaille encore à renforcer les procédures concrètes de suivi, et à fournir des critères généraux pour comparer les objectifs des différents pays. Cela rend difficile une évaluation plus objective (quantitative) des résultats réels.
d) Les COP suivantes
- Après quelques Conférences aux résultats médiocres et la déception de la COP25 de Madrid (2019), on espérait que cette inertie serait inversée lors de la COP26 de Glasgow (2021). Fondamentalement, son résultat fut de relancer l’Accord de Paris, remis en cause par les contraintes et les effets de la pandémie. À cela s’ajouta une abondance d’“exhortations” dont l’impact réel était peu prévisible. Les propositions visant à assurer une transition rapide et efficace vers des énergies alternatives et moins polluantes n’ont pas pu progresser.
e) La COP27
1’) Exposé des préconisations
- La COP27 de Sharm El Sheikh (2022) a été menacée dès le départ par la situation créée par l’invasion de l’Ukraine qui a provoqué une importante crise économique et énergétique. L’utilisation du charbon a augmenté et tout le monde a voulu sécuriser son approvisionnement. Les pays en voie de développement ont considéré l’accès à l’énergie et aux opportunités de développement comme une priorité urgente. Il a été clairement reconnu que les combustibles fossiles fournissent encore 80 % de l’énergie mondiale et que leur utilisation continue d’augmenter.
2’) L’évaluation
- Cette Conférence égyptienne a été un nouvel exemple de la difficulté des négociations. On peut dire qu’elle a au moins permis d’avancer dans le renforcement du système de financement des “pertes et dommages” dans les pays les plus touchés par les catastrophes climatiques. Cela a semblé donner une nouvelle voix et une plus grande participation aux pays en voie de développement. Mais, même sur cette question, de nombreux points sont restés imprécis, en particulier la responsabilité spécifique des pays qui doivent contribuer.
3) Bilan
- Aujourd’hui, nous pouvons continuer à affirmer que « les accords n’ont été que peu mis en œuvre parce qu’aucun mécanisme adéquat de contrôle, de révision périodique et de sanction en cas de manquement, n’a été établi. Les principes énoncés demandent encore des moyens, efficaces et souples, de mise en œuvre pratique [1] ». En outre, « les négociations internationales ne peuvent pas avancer de manière significative en raison de la position des pays qui mettent leurs intérêts nationaux au-dessus du bien commun général. Ceux qui souffriront des conséquences que nous tentons de dissimuler rappelleront ce manque de conscience et de responsabilité [2]».
Cinquième partie. Le remède particulier : les conférences sur le climat. Prospective [« 5. Que peut-on espérer de la COP28 de Dubaï ? »]
1) Existence (pertinence)
a) La difficulté
- Les Émirats Arabes Unis accueilleront la prochaine Conférence des Parties (COP28). C’est un pays du Golfe Persique qui se définit comme un grand exportateur d’énergies fossiles, bien qu’il ait fait d’importants investissements dans les énergies renouvelables. Pendant ce temps, les compagnies pétrolières et gazières ambitionnent de réaliser de nouveaux projets pour augmenter encore la production.
b) Réponse : espérer
Dire qu’il n’y a rien à espérer serait un acte suicidaire qui conduirait à exposer toute l’humanité, en particulier les plus pauvres, aux pires impacts du changement climatique.
- Si nous avons confiance dans la capacité de l’être humain à transcender ses petits intérêts et à penser en grand, nous ne pouvons renoncer à rêver que cette COP28 conduira à une accélération marquée de la transition énergétique, avec des engagements effectifs et susceptibles d’un suivi permanent. Cette Conférence peut être un tournant si elle démontre que tout ce qui a été fait depuis 1992 était sérieux et en valait la peine, sans quoi elle sera une grande déception et mettra en péril tout le bien qui a pu être accompli jusqu’à maintenant.
2) Contenu
a) Le diagnostic
- Malgré de multiples négociations et accords, les émissions mondiales ont continué à augmenter. Il est vrai que l’on peut affirmer que, sans ces accords, ils auraient augmenté plus encore. Mais sur d’autres sujets liés à l’environnement, des résultats très significatifs ont été obtenus lorsqu’il y a eu de la volonté, comme cela a été le cas pour la protection de la couche d’ozone. En revanche, la transition nécessaire vers les énergies propres comme les énergies éolienne et solaire, en abandonnant les combustibles fossiles, ne vas pas assez vite. Par conséquent, ce qui est fait risque d’être interprété comme un simple jeu de diversion.
b) Les remèdes
1’) Leur nécessité
a’) En général
- Nous devons cesser de sembler être conscients du problème, mais n’ayant pas, dans le même temps, le courage de faire des changements substantiels. Nous savons qu’à ce rythme nous dépasserons dans quelques années seulement la limite souhaitable de 1,5 °C et que nous pourrions atteindre en peu de temps 3 °C, avec le haut risque d’atteindre un point critique. Même si nous n’arrivons pas à ce point de non-retour, il est certain que les conséquences seraient désastreuses et que des mesures devraient être prises hâtivement, avec des coûts énormes et des conséquences économiques et sociales extrêmement graves et intolérables. Si les mesures que nous prenons maintenant ont des coûts, ceux-ci seront beaucoup plus lourds si nous attendons encore plus longtemps.
b’) Nécessité de remèdes autre que techniques
Il va de soi que la compétence du pontife romain n’est pas technique, mais éthique.
- Je considère qu’il est impératif d’insister sur le fait que « chercher seulement un remède technique à chaque problème environnemental qui surgit, c’est isoler des choses qui sont entrelacées dans la réalité, et c’est se cacher les vraies et plus profondes questions du système mondial [3] ». Il est vrai que des efforts d’adaptation sont nécessaires face aux maux qui sont irréversibles à court terme. Certaines interventions et avancées technologiques, qui permettent d’absorber ou de capturer les gaz émis, sont positives. Mais nous courons le risque de rester enfermés dans la logique du colmatage, du bricolage, du raboutage au fil de fer, alors qu’un processus de détérioration que nous continuons à alimenter se déroule par-dessous. Supposer que tout problème futur pourra être résolu par de nouvelles interventions techniques est un pragmatisme homicide, comme un effet boule de neige.
2’) Contenu
a’) En négatif : conjurer les critiques
- Finissons-en une bonne fois avec les moqueries irresponsables qui présentent ce sujet comme étant uniquement environnemental, “vert”, romantique, souvent ridiculisé par des intérêts économiques.Acceptons enfin qu’il s’agit d’un problème humain et social aux multiples aspects. C’est pourquoi le soutien de tous est nécessaire. Lors des Conférences sur le climat, les actions de groupes fustigés comme “radicalisés” attirent souvent l’attention. Mais ils comblent un vide de la société dans son ensemble qui devrait exercer une saine “pression” ; car toute famille doit penser que l’avenir de ses enfants est en jeu.
b’) En positif. Les critères de la transition énergétique
- Si l’on veut sincèrement que la COP28 soit historique, qu’elle nous honore et nous ennoblisse en tant qu’êtres humains, on ne peut qu’attendre des formes contraignantes de transition énergétique qui présentent trois caractéristiques : efficaces, contraignantes et facilement contrôlables ; cela pour parvenir à initier un nouveau processus radical, intense et qui compte sur l’engagement de tous. Cela n’est pas advenu sur le chemin parcouru jusqu’à présent, mais ce n’est que par un tel processus que la crédibilité de la politique internationale pourra être rétablie, car ce n’est que de cette manière concrète qu’il sera possible de réduire notablement le dioxyde de carbone et éviter à temps les pires maux.
3’) Les artisans de la transition énergétique
- Espérons que ceux qui interviendront seront des stratèges capables de penser au bien commun et à l’avenir de leurs enfants, plutôt qu’aux intérêts circonstanciels de certains pays ou entreprises. Puissent-ils montrer ainsi la noblesse de la politique et non sa honte. Aux puissants, j’ose répéter cette question : « Pourquoi veut-on préserver aujourd’hui un pouvoir qui laissera le souvenir de son incapacité à intervenir lorsqu’il était urgent et nécessaire de le faire [4] ? ».
Sixième partie. Le remède spirituel [« 6. Les motivations spirituelles »]
Nous considérons enfin l’attitude propre aux fidèles catholiques à qui le pape François s’adresse dans cette dernière partie.
0) Introduction
- Je ne veux pas manquer de rappeler aux fidèles catholiques les motivations qui naissent de leur foi. J’encourage les frères et sœurs des autres religions à faire de même, car nous savons que la foi authentique donne non seulement des forces au cœur humain, mais qu’elle transforme toute la vie, transfigure les objectifs personnels, éclaire la relation avec les autres et les liens avec toute la création.
1) Le regard de foi sur la création [« À la lumière de la foi »]
a) Ce que dit l’Ancien Testament (la foi dans le Créateur)
1’) La Terre appartient à Dieu
- La Bible raconte que « Dieu vit tout ce qu’il avait fait : cela étaittrès bon» (Gn 1,31). À lui appartiennent « la terre et tout ce qui s’y trouve » (Dt 10, 14). C’est pourquoi il nous dit : « La terre ne sera pas vendue avec perte de tout droit, car la terre m’appartient et vous n’êtes pour moi que des étrangers et des hôtes » (Lv 25,23). Par conséquent, « cette responsabilité vis-à-vis d’une terre qui est à Dieu implique que l’être humain, doué d’intelligence, respecte les lois de la nature et les délicats équilibres entre les êtres de ce monde [5] ».
2’) La diversité de la Terre est un bien
- D’autre part, « l’ensemble de l’univers, avec ses relations multiples, révèle mieux l’inépuisable richesse de Dieu ». Par conséquent, pour être sages, « nous avons besoin de saisir la variété des choses dans leurs relations multiples [6] ». Sur ce chemin de sagesse, il n’est pas sans importance pour nous que nombre d’espèces disparaissent et que la crise climatique mette en danger la vie de tant d’êtres.
b) Ce que dit le Nouveau Testament (la foi dans le Christ)
1’) Le Christ pendant sa vie terrestre
- Jésus « pouvait inviter les autres à être attentifs à la beauté qu’il y a dans le monde, parce qu’il était lui-même en contact permanent avec la nature et y prêtait une attention pleine d’affection et de stupéfaction. Quand il parcourait chaque recoin de sa terre, il s’arrêtait pour contempler la beauté semée par son Père, et il invitait ses disciples à reconnaître dans les choses un message divin [7] ».
2’) Le Christ ressuscité
- En même temps, « les créatures de ce monde ne se présentent plus à nous comme une réalité purement naturelle, parce que le Ressuscité les enveloppe mystérieusement et les oriente vers un destin de plénitude. Même les fleurs des champs et les oiseaux qu’émerveillé il a contemplés de ses yeux humains, sont maintenant remplis de sa présence lumineuse [8] ». Si « l’univers se déploie en Dieu, qui le remplit tout entier, il y a donc une mystique dans une feuille, dans un chemin, dans la rosée, dans le visage du pauvre [9] ». Le monde chante un Amour infini, comment ne pas en prendre soin ?
2) Le regard de foi sur l’homme [« Marcher en communion et avec engagement »]
a) Sur l’être de l’homme
1’) En négatif : l’isolement de l’homme
- Dieu nous a unis à toutes ses créatures. Pourtant, le paradigme technocratique nous isole de ce qui nous entoure et nous trompe en nous faisant oublier que le monde entier est une “zone de contact” [10].
2’) En positif : le lien de l’homme avec le cosmos
- La vision judéo-chrétienne du cosmos défend la valeur particulière et centrale de l’être humain au milieu du concert merveilleux de tous les êtres, mais aujourd’hui nous sommes obligés de reconnaître que seul un “anthropocentrisme situé” est possible. Autrement dit, reconnaître que la vie humaine est incompréhensible et insoutenable sans les autres créatures parce que « nous et tous les êtres de l’univers, sommes unis par des liens invisibles, et formons une sorte de famille universelle, une communion sublime qui nous pousse à un respect sacré, tendre et humble [11] ».
3’) Synthèse
- Cela n’est pas le produit de notre volonté, cela a une autre origine qui est à la racine de notre être, car « Dieu nous a unis si étroitement au monde qui nous entoure, que la désertification du sol est comme une maladie pour chacun ; et nous pouvons nous lamenter sur l’extinction d’une espèce comme si elle était une mutilation [12] ». Ainsi, nous mettons fin à l’idée d’un être humain autonome, tout-puissant et illimité, et nous nous repensons pour nous comprendre d’une manière plus humble et plus riche.
b) Sur l’action de l’homme
1’) Énoncé et difficulté
- J’invite chacun à accompagner ce chemin de réconciliation avec le monde qui nous accueille, et à l’embellir de sa contribution, car cet engagement concerne la dignité personnelle et les grandes valeurs. Toutefois, il faut être sincère et reconnaître que les solutions les plus efficaces ne viendront pas seulement d’efforts individuels, mais avant tout des grandes décisions de politique nationale et internationale.
2’) Exposé et réponse
a’) En général
- Cependant, tout s’ajoute, et éviter l’augmentation d’un dixième de degré de la température mondiale peut déjà suffire à épargner des souffrances à de nombreuses personnes. Mais, ce qui compte est une chose moins quantitative : rappeler qu’il n’y a pas de changement durable sans changement culturel, sans maturation du mode de vie et des convictions des sociétés, et il n’y a pas de changement culturel sans changement chez les personnes.
b’) En particulier
- L’effort des ménages pour polluer moins, réduire les déchets, consommer avec retenue, crée une nouvelle culture. Ce seul fait de modifier les habitudes personnelles, familiales et communautaires nourrit l’inquiétude face aux responsabilités non prises des secteurs politiques et l’indignation face au désintérêt des puissants. Nous remarquons donc que, même si cela n’a pas immédiatement un effet quantitatif notable, cela aide à mettre en place de grands processus de transformation qui opèrent depuis les profondeurs de la société.
c’) Un exemple singulier
- Si nous considérons que les émissions par habitant aux États-Unis sont environ le double de celles d’un habitant de la Chine, et environ sept fois supérieures à la moyenne des pays les plus pauvres [13],nous pouvons affirmer qu’un changement généralisé du mode de vie irresponsable du modèle occidental auraient un impact significatif à long terme. De la sorte, avec les décisions politiques indispensables, nous serions sur la voie de l’attention mutuelle.
3) Conclusion
- « Louez Dieu » est le nom de cette lettre. Parce qu’un être humain qui prétend prendre la place de Dieu devient le pire danger pour lui-même.
Donné à Rome, Saint-Jean-de-Latran, le 4 octobre, fête de saint François d’Assise, de l’année 2023, la onzième de mon Pontificat. François
Pascal Ide
[1] Ibid., n. 167 : AAS 107 (2015), p. 914.
[2] Ibid., n. 169 : AAS 107 (2015), p. 915.
[3] Ibid., n. 111 : AAS 107 (2015), p. 982.
[4] Ibid., n. 57 : AAS 107 (2015), p. 870.
[5] Ibid., n. 68 : AAS 107 (2015), p. 874.
[6] Ibid., n. 86 : AAS 107 (2015), p. 881.
[7] Ibid., n. 97 : AAS 107 (2015), p. 886.
[8] Ibid., n. 100 : AAS 107 (2015), p. 887.
[9] Ibid., n. 233 : AAS 107 (2015), p. 938.
[10] Cf. Donna Haraway, When Species Meet, Minneapolis 2008, pp. 205-249.
[11] Laudato sì, n. 89 : AAS 107 (2015), p. 883.
[12] Pape François, Evangelii Gaudium. Exhortation apostolique post-synodale sur l’annonce de l’Évangile dans le monde actuel, 24 novembre 2013, n. 215 : AAS 105 (2013), p. 1109.
[13] Cf. United Nations Environment Program, Emission Gap Report 2022 : https://www.unep.org/resources/emissions-gap-report-2022