Descendons des montagnes théologiques et remontons des profondeurs cosmologiques des derniers jours, pour planter notre tente dans notre plaine humaine. Un constat, une expérience, un conseil.
Un constat. Dans votre promenade hygiénique quotidienne, avez-vous remarqué que, parfois, souvent, les personnes font du zèle ? Je ne parle pas du respect de la distance règlementaire qui, elle, n’est que justice, mais de ceux qui, ostentoirement, font un large détour et vous font comprendre, d’un hochement de tête désapprobateur, que vous devriez faire de même. Ou de ceux qui, affichant un air de Schtroumph grognon, se gardent bien de sourire en croisant votre regard (et surtout pas votre route). Oh, je peux comprendre : entre la crainte des projections, l’incertitude des médiations (virales) et les colères des restrictions. Peut-être pensent-ils que le sourire aussi est contagieux ! Ce en quoi, d’ailleurs, ils n’ont pas tort.
Une expérience. Des chercheurs en sciences sociales ont demandé à un premier groupe de sujets de tenir un bref temps un crayon du bout des lèvres, et à un deuxième groupe de le serrer entre leurs dents. Puis, ils leur ont fait effectuer un travail intellectuel comme du calcul mental. Or, les individus qui avaient tenu le crayon entre les dents étaient bien plus efficaces que ceux qui l’avaient tenu du bout des lèvres.
Après le constat, vous avez peut-être anticipé le résultat qui, sans cela, paraîtrait relever de la magie ! Le premier mouvement de la bouche imite la moue, donc le dégoût, peut-être même l’amertume, alors que le second contracte les mêmes muscles que ceux qui sont mis en œuvre dans le sourire. En vous détendant, celui-ci vous rend aussi plus disponible , plus ouvert aux autres, plus efficace dans l’action.
Un conseil. Là encore, vous m’avez vu venir : souriez !
Avez-vous constaté que, même seul, vous souriez spontanément quand vous pensez à un heureux événement ? Avez-vous observé que le visage maussade s’illumine soudain lorsque, le téléphone sonnant, vous décrochez et vous entendez la voix d’une personne aimée ? La gratitude est le chemin le plus assuré vers le sourire spontané et non pas factice !
Sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus, quand elle faisait fonction de maîtresse des novices, demandait à celles-ci de sourire le plus souvent possible ! Et, la première, les photos de l’époque l’attestent, elle s’appliquait ce conseil à elle qui fut guérie, à l’âge de dix ans, par la Vierge au sourire. D’ailleurs, dans sa belle méditation à Lourdes sur le sourire de Marie, en 2008, Benoît XVI attribue à Notre-Dame la parole du psaume : « les plus riches du peuple … quêteront ton sourire » (Ps 44, 13). « Quêter le sourire de la Vierge Marie, commente le pape, n’est pas un pieux enfantillage, c’est l’aspiration de ceux qui sont ‘les plus riches du peuple’ (v. 13). Et il continue en citant la méditation inspirée d’une belle figure spirituelle française, Dom Jean-Baptiste Chautard : « ‘Les plus riches’, c’est-à-dire dans l’ordre de la foi, ceux qui ont la maturité spirituelle la plus élevée et savent précisément reconnaître leur faiblesse et leur pauvreté devant Dieu. En cette manifestation toute simple de tendresse qu’est un sourire, nous saisissons que notre seule richesse est l’amour que Dieu nous porte et qui passe par le cœur de celle qui est devenue notre Mère ».
Marie, la mère du Ressuscité, nous confie son sourire. Transmettons-le ! Oui, il est contagieux ! Comme la grâce de la résurrection !
On dit d’un paysage qu’il est souriant lorsqu’il brille sous le soleil. La résurrection, c’est le Soleil de la recréation qui brille sur le monde ! C’est un lumineux matin de Pâques, le 7 avril 30, que le Ressuscité est apparu à Marie-Madeleine ! Rayonnement de notre visage, le sourrire en est donc la résurrection ! Ceux que nous croisons, aimons-les et sourions-leur, nous aurons des visages de ressuscités !
Pascal Ide