Le 6 janvier 2001, saint Jean-Paul II a écrit une importante lettre apostolique, Novo millennio ineunte, qui, ainsi que son titre l’indique, est appelée à éclairer tout le troisième millénaire. Une anecdote très fondée raconte d’ailleurs que le pape polonais a reçu dans la prière, un matin de l’Année sainte, l’intégralité du contenu de cette lettre. Quoi qu’il en soit, elle est traversée par la dynamique don. En un mot le don appelle le don. En effet, elle fait d’abord mémoire du don reçu pendant le Jubilé (chap. 1). Puis il invite à s’enraciner dans le Christ (chap. 2). Enfin, il invite à mettre en œuvre un « programme pastoral post-jubilaire […] efficace » (n. 15) (chap. 3).
Connexion globale
La dynamique du temps présente une dimension temporelle évidente : « vivant le Jubilé non seulement comme mémoire du passé mais aussi comme prophétie de l’avenir. » (n. 3) D’un côté, « l’expérience jubilaire […] laisse beaucoup de souvenirs imprimés en nous. » De l’autre, « nous devons maintenant regarder devant nous » et « avancer au large » (Duc in altum). Mais, ce programme jubilaire ne sera possible que si l’on est « profondément enraciné dans la contemplation et dans la prière. » Il s’agit de s’enraciner dans le présent du Christ, « fondement absolu de toute action pastorale » (n. 15).
Or, se tourner ainsi vers le visage du Christ, c’est chercher « à ‘être’ avant de ‘faire’. » Deux choses nous évoquent le don 2 : le présent et le verbe ‘être’ qui se distingue de recevoir et de ‘faire’ (donner).
Connexion anthropologique
Ce lien présente une dimension anthropologique qu’il vaut la peine de souligner. Jean-Paul II parle en termes de réflexion : « Il est donc temps maintenant que chaque Eglise, en réfléchissant sur ce que l’Esprit a dit au peuple de Dieu durant ette année spéciale de grâce […] se livre à un examen de sa ferveur et trouve un nouvel élan pour son engagement spirituel et pastoral. » (n. 3) Il parle aussi en terme de conscience : « Je souhaite que […] beaucoup aient bénéficié de cette grâce, en pleine conscience de son caractère exigeant. » (n. 30)
Or, cette mise en œuvre de l’intelligence éveille l’affectivité. Voilà pourquoi dans le passage ci-dessus du n. 3, Jean-Paul II parle de trouver « un nouvel élan ». Dans « la célébration du Jubilé », nous devons « puiser un élan renouvelé pour notre vie chrétienne, en en faisant même la force inspiratrice de notre cheminement. » (n. 29) A l’ « élan » s’ajoute donc la « force inspiratrice ». Il dit aussi que « les expériences vécues doivent » non pas « justifier une sensation d’assouvissement et encore moins nous amener à une attitude de démobilisation », mais « susciter en nous un dynamisme nouveau » (n. 15).
Le lien entre l’enracinement dans le Christ et la mission est aussi fortement marqué : « C’est dans la conscience de cette présence du Ressuscité parmi nous que nous nous posons aujourd’hui la question adressée à Pierre à Jérusalem, aussitôt après son discours de la Pentecôte : ‘Que devons-nous faire ?’ (Ac 2,37) » (n. 29)
Connexion éthique
Ce lien, de ce fait, engage l’action. Jean-Paul II a plusieurs fois appel au prescriptif « doit » dans les expressions déjà citées. Il parle d’ « engagement » (n. 3). Bref, comme le dit une formule ramassée : « le don se traduit à son tour en une tâche » (n. 30).
Pascal Ide