The lighthouse

Comment ce film épouvantable (aux deux sens du terme) a-t-il pu mériter d’être qualifié de « mystique » – dans une critique qui m’a malheureusement incité à le visionner ? (et je ne dis rien des admirations extatiques allant jusqu’à se pâmer face à ce qu’il y a « de plus beau cette année » cinématographique…).

Rien de mystérieux ni d’élevé dans ce huis clos charbonneux qui, à travers un symbolisme mille fois visité (le phare phallique, la mouette vengeresse, la tempête défoulement, etc.) met en scène la chute téléphonée de deux hommes dans une hyperviolence désespérée et désespérante, pour des raisons elles aussi transparentes : cosmologique (qui ne deviendrait pas fou dans cette tourmente hurlante ?), psychosociale (qui ne deviendrait enragé jusqu’à la haine meurtrière à être enfermé avec un autre homme qui, de surcroît, n’est pas un parangon d’équilibre ? C’est ce qu’a montré l’expérience russe de cosmonautes, pourtant triés sur le volet et au nombre de trois, enfermés ensemble pendant une année) et psychologique (qui ne sombrerait dans la paranoïa entre un autoritaire intrusif entretenant des relations quasi-conjugales avec la flamme-femme aux mille feux miroitants et aux mille formes hallucinantes, et un taiseux croyant pouvoir fuir et refouler la violence de ses pulsions frénétiques et plus encore d’une culpabilité dévorante ?). Bref, ce long-métrage aussi sombre que sa pellicule esthétisante en noir et blanc – qui est purement et simplement à éviter – montre le contraire même de ce que le mystère (authentique, lui) nous donne de célébrer : Celui qui, par nature invisible, s’est rendu visible fait « renaître en lui la création déchue » et « remet l’homme égaré sur le chemin » du salut (seconde préface de la Nativité).

Pascal Ide