Sound of Freedom, biopic et thriller américain d’Alejandro Monteverde, 2023. Avec Jim Caviezel, Mira Sorvino et Bill Camp.
Thèmes
Pédocriminalité, courage.
Si Sound of Freedom n’est pas un grand thriller, il filme d’abord une superbe aventure intérieure.
- Le film d’aventures m’a déçu pour différentes raisons. Certaines sont plus subjectives comme le casting. Si, assurément, Jim Caviezel et Mira Sorvino ne déméritent pas (l’on regretterait plutôt de ne pas assez voir cette dernière), l’on n’en dira pas de même des méchants qui manquent de crédibilité, au féminin comme au masculin.
D’autres sont plus objectives. Les plus importantes concernent le scénario. Assurément, le troisième long-métrage d’Alejandro Monteverde lorgne, dans sa dernière partie, vers l’avant-dernier Johnny Rambo (John Rambo, de et avec Sylvester Stallone, 2008) – d’autant que cet épisode, ainsi que le combat à mort contre le bad guy, sont fictifs. Mais, si les ingrédients sont là, le spectateur n’est pas saisi.
Surtout, la fin étant connue, le suspense se trouve totalement émoussé (même si le rebondissement lié à l’absence de Rocío relance astucieusement l’action).
En multipliant les méchants – par exemple, en substituant à Giselle, qui faisait une figure crédible de la malice, un méchant sensé être encore plus corrompu –, le script les dilue. Bref, à trop vouloir coller au réel, il transforme le film, sinon en documentaire, du moins en témoignage, et annule le suspense.
Enfin, si l’émotion est, depuis que les analyses d’Aristote sur la catharsis nous l’ont montré, ce qui rend le spectacle si gratifiant, elle ne joue son rôle que si elle est spontanée. Or, elle est trop téléphonée (l’on voit Jim Caviezel les larmes aux yeux au moins une dizaine de fois). D’autre part, la psychologie sociale nous l’apprend, l’émotion la plus gratifiante est celle de la gratitude. Or, les scènes finales se centrent beaucoup plus sur le bonheur des retrouvailles familiales, donc la joie reçue, que sur la reconnaissance de l’héroïsme de Tim, donc la joie offerte. Voilà pourquoi l’émotion finale n’est pas à la hauteur de l’action héroïque accomplie par l’agent fédéral. Il suffit, pour s’en convaincre, de comparer avec le final si réussi du biopic, en bien des points comparable, de Mel Gibson, Tu ne tueras point (Hacksaw Ridge, 2016).
- Mais Sound of Freedom est d’abord bienfaisant par son thème. Relevons pêle-mêle.
Comment ne pas se réjouir que que, à force de persévérance, le témoignage de Tim Ballard devant le Congrès des États-Unis ait abouti à l’adoption de lois exigeant que le gouvernement coopère avec les pays étrangers dans les enquêtes sur le trafic sexuel d’enfants (et d’adultes) ?
Comment ne pas applaudir à ce que soit enfin révélé que, selon les mots même de l’épilogue, il y a plus de personnes réduites en esclavage aujourd’hui qu’à tout autre moment de l’histoire, y compris lorsque l’esclavage était légal ?
Comment ne pas être touché par l’exemple admirablement vertueux d’un homme qui joint le courage à la persévérance, la justice à la bonté, le don de soi à la vulnérabilité ?
Comment ne pas saluer l’exploit de se refuser à tout voyeurisme sans pour autant euphémiser la violence ? C’est ainsi que le réalisateur a su susciter le trouble et la gêne seulement en montrant un enfant assis au bord d’un lit d’hôtel, alors qu’un adulte prédateur s’approche de lui, en ébauchant le geste de se dévêtir.
Comment ne pas se féliciter que le film ait bénéficié d’une audience hautement positive, au-delà des clivages républicain-démocrate, qu’il ait rapporté presque vingt fois son budget outre-Atlantique ; et que les spectateurs aient applaudi au terme du visionnement dans la salle où je me trouvais (j’ai fait chorus) ?
- Comment ne pas aspirer à une convergence entre le contenu et la forme ? Rappelons un critère dictant ces critiques qui, lorsqu’elles touchent des films à composante confessionnelle (chrétienne), étonnent parfois le public catholique. Je vais au cinéma d’abord pour voir un film, c’est-à-dire une œuvre du septième art. Or, j’ai appris d’Aristote et saint Thomas, que les règles l’esthétique ne sont pas celles de l’éthique, et d’un de leurs grands disciples, Jacques Maritain, qu’une grande œuvre d’art, c’est avant tout une grande intuition créatrice – et non pas une bonne intention vertueuse, même missionnaire. Cela ne signifie pas que, comme l’a notamment pensé Nietzsche, il faille totalement découpler la beauté du bien, mais qu’un film, comme une symphonie, s’évalue d’abord à l’aune de la première. Ce n’est pas le lieu d’entrer dans le détail, et les lecteurs fidèles de ces recensions savent combien je convoque volontiers les critères éthiques, mais jamais en première ligne.
La conséquence en est que je peux être profondément en accord sur le message éthique ou religieux véhiculé par le film sans pour autant approuver l’œuvre d’art, en l’occurrence, cinématographique. La bonté de l’intention éthique ne saurait sauver ni même excuser la maladresse artistique. Si l’on peut faire de la bonne littérature avec des bons sentiments, la littérature n’est pas bonne à cause de ces bons sentiments. Sinon, que resterait-il de l’œuvre d’un George Bernanos ou d’un Léon Bloy ?
Pascal Ide
En 2013, Roberto Aguilar (José Zúñiga), un pauvre père de deux enfants originaire de Tegucigalpa au Honduras, est approché par une ancienne reine de beauté, Giselle (Yessica Borroto). Elle propose de signer à ses jeunes enfants, Rocío (Cristal Aparicio) et Miguel (Lucás Ávila), des contrats de mannequinat. Il accepte et les emmène à la séance photo. Lorsqu’il revient chercher ses enfants, ils sont partis. Il apprend alors que les enfants ont été vendus pour être utilisés comme esclaves sexuels.
À Calexico, en Californie, Tim Ballard (Jim Caviezel) est agent spécial pour les enquêtes de sécurité intérieure (HSI), où il arrête les personnes qui possèdent et distribuent de la pédopornographie. Ce travail pénible pèse lourdement sur sa vie personnelle, et cela ne fait qu’empirer lorsqu’un autre agent, Chris (Scott Haze), souligne qu’ils ont arrêté de nombreux prédateurs d’enfants, mais n’ont jamais réussi à sauver ne serait-ce qu’un seul enfant de l’exploitation, parce que la plupart d’entre eux se trouvent en dehors des États-Unis.
Profondément marqué par les paroles de Chris, Tim parle à un prédateur qu’il a arrêté, Ernst Oshinsky (Kris Avedisian), en se faisant passer pour un pédophile. Ayant gagné sa confiance, il organise une rencontre avec un enfant victime de trafic et parvient à arrêter Earl Buchanan (Gary Basaraba), l’homme qui a acheté Miguel. Tim sauve Miguel, se lie d’amitié avec lui et lui demande des informations qui l’aideraient à retrouver les autres enfants. En lui apprenant que sa sœur Rocío est toujours portée disparue, Miguel lui demande de la sauver, en lui donnant le collier de sa sœur sur lequel est inscrit « Saint Timothée ».
Les recherches de l’agent le mènent à Carthagène, en Colombie, où il rencontre un ancien comptable du cartel, Vampiro, « Vampire » (Bill Camp), qui travaille désormais à sauver les enfants du trafic sexuel. Ayant entendu parler d’un club sexuel pour enfants en Thaïlande qui a été fermé, Tim décide que c’est la couverture idéale pour acquérir un grand nombre d’enfants enlevés par Giselle dans le cadre d’une opération d’infiltration. Vampiro fait appel à un policier colombien, Jorge (Javier Godino), et à un riche citoyen, Paulo Delgado (Eduardo Verástegui), pour aider Tim dans sa mission. Mais le superviseur HSI de Tim, Frost (Kurt Fuller), est incapable de financer l’opération et lui demande de retourner aux États-Unis.
Soutenu par son épouse Katherine (Mira Sorvino), Tim démissionne alors de son poste plutôt que d’abandonner la recherche de Rocío. Mais Frost parvient à persuader le personnel de l’ambassade américaine en Colombie de participer à l’opération de sauvetage de Tim. Sous couverture, ils convainquent Giselle de leur vendre 54 enfants et réussissent à arrêter tous les criminels. Cependant, contre toute attente, Rocío n’en fait pas partie.
Après avoir interrogé l’un des associés de Giselle, Jorge apprend que Rocío a été vendue aux Forces armées révolutionnaires de Colombie. Mais il n’y a aucun moyen de la récupérer la fille, car ces Forces se cachent au pleine Amazonie, dans une jungle sauvage en grande partie non cartographiée ; de plus, ce territoire rebelle est une zone d’exclusion aérienne pour le gouvernement colombien. Les médecins étant les seuls à être autorisés à entrer dans la région, Tim propose de se faire passer pour des médecins. Mais les rebelles refusent de laisser entrer Vampiro, et seul Tim pénètre en territoire ennemi. Il trouve enfin Rocío qui, détenue avec d’autres enfants, elle doit écraser des feuilles de coca pour produire cocaïne qui finance la guerre rebelle contre le gouvernement colombien. Pire encore, elle est utilisée comme esclave sexuelle personnelle pour le chef rebelle, El Alacrán « Le Scorpion » (Gerardo Taracena). S’introduisant de nuit dans le repère du El Alacrán pour la délivrer, Tim doit s’affronter à lui, le tuer et s’enfuir avec Rocío. Échappant aux rebelles qui les poursuivent, il ramène Rocío à la liberté, lui donne le collier que son frère Miguel lui avait offert et la reconduit dans sa famille, au Honduras.