Lupin. Dans l’ombre d’Arsène, série télévisée française policière de George Kay et François Uzan, 1 saison, janvier 2021. Diffusé sur Netflix. Inspirée par la série de livres Arsène Lupin de Maurice Leblanc. Avec Omar Sy.
Thèmes
Arsène Lupin, pardon.
Sans turlupiner, ce Lupin est loupé… Comment expliquer l’impressionnant décalage entre la critique des « experts » et celle des spectateurs (sur Allo Ciné, respectivement 3,4 et 2,1) – le goût de ceux-ci étant souvent beaucoup plus assuré que l’interprétation de ceux-là ?
Assurément, le choix de Louis Leterrier (à qui l’on doit des blockbusters autant français comme les deux premiers Transporteur, qu’américains comme les deux Insaisissables) est réjouissant et les trois premiers épisodes rondement menés, voire palpitants. Mais pourquoi avoir à nouveau cédé à cette manie de multiplier les cinéastes (ceux des deux derniers épisodes diffèrent) ? Faut-il mépriser à ce point l’histoire et le spectateur pour leur faire croire que la seule continuité superficielle des dirigés (les acteurs, dont Omar Sy, omniprésent) suffit à assurer celle, profonde, des directeurs (les réalisateurs) et, plus encore, la direction (c’est-à-dire l’intrigue) ? Pour ne prendre qu’une illustration, la troisième trilogie de Star Wars, dont nous avons loué ici bien des mérites, n’a-t-elle pas suffisamment souffert de cette alternance-turbulence (J.J. Abrams, Rian Johson, J.J. Abrams) pour que l’on puisse en tirer les leçons ? Quelle est donc la logique de fond de ce type de télévision et de cinéma à la chaîne et enchaîné : l’impatience, donc la cupidité, ou bien l’art ?
Assurément aussi, le troisième épisode de la première saison est le plus saisissant. Pour deux raisons psycho-éthiques qui dopent le scénaristique : la profondeur complexe du bad guy, Gabriel Dumont qui, par son retournement inattendu, retourne à son tour Lupin ; et ce deuxième retournement qui, conversion au sens étymologique du terme, n’est rien moins qu’un pardon au complice de l’assassinat de son père. Mais alors, pourquoi, en toute cohérence avec sa métamorphose intime, le commissaire n’abandonne-t-il pas sa profession ? La mise en lumière d’une telle défection à l’égard de sa mission devait le conduire, en toute logique, à une dé-mission. Là encore, autant de visages (de réalisateurs), autant de virages (dans la réalisation)…
Mais venons-en à l’essentiel : le décalage, j’allais dire mensonger, en tout cas erroné, entre l’intention et son exécution. Ou, plus précisément, entre la lettre et l’esprit. La lettre qui vise à accrocher le chaland, c’est le légendaire et la légende Arsène Lupin. Depuis le titre jusqu’aux allusions omniprésentes en passant par le prénom Hassane ou le profil de personnalité, gentleman, tout nous parle du plus célèbre et du plus aimé des cambrioleurs français.
Quant à l’esprit, c’est la débandade… Précisons d’abord que l’auteur de ces lignes n’est pas un nostalgique de la série télévisée des années 1970 : certes, il s’enchante du (et chantonne le) générique de Jacques Dutronc, et il a hautement apprécié le jeu tout en finesse humoristique et aristocratique de Georges Descrières ; mais il décrie l’indigence d’une histoire qui n’a pas su restituer la magie des romans qu’elle prétend pourtant épouser. En revanche, il est nostalgique des Aventures d’Arsène Lupin (et d’ailleurs de toute l’œuvre romanesque de Maurice Leblanc) que, enfant, il a dévorées dans les éditions originales illustrées, précieusement conservées dans le grenier de la maison familiale…
Certes, je ne regrette en rien le machisme du gentleman-cambrioleur (en réalité, je n’y ai porté attention qu’en relisant récemment ce bijou qu’est La demoiselle aux yeux verts). Par contre, je rêve toujours aux deux traits selon moi les plus puissants, les plus inégalés, voire (malheureusement !) les plus inédits de ces Aventures : le sens de l’énigme qui confine au mystère (ah, « In robore fortuna », Alcor, 813, le triangle d’or, le bouchon de cristal, l’aiguille creuse qui, pour ces quatre derniers, avant d’être des titres de romans sont des logogriphes qui nous ouvrent sur des trésors insoupçonnés) ; l’enracinement historique français, concentré dans cette Normandie si chère au jeune Maurice et mythifiée par Leblanc devenu conteur. Or, que reste-t-il de ce lupin, hors les deux anagrammes usés (Paul Sernine et Luis Perenna), un vague pèlerinage à Étretat et de poussives allusions à des énigmes jamais détaillées ? C’est entendu, la réalisation s’est refusée à répéter, décalquer, photocopier. Mais, justement, c’est de cela que je parle : la véritable imitation créative (puisque la reprise du nom dit bien mimésis) n’échappe au mimétisme que si elle est intérieure et non pas extérieure. Derechef, nous parlons d’esprit et de lettre, de l’esprit en sa profondeur impondérable (sic !) et de l’insoutenable légèreté de cette lettre. Et ce clivage entre le fond et l’apparition réduite à une simple apparence, nous le retrouvons aussi dans les multiples reprises manquées plus ajournées que mises à jour de l’ennemi juré de Lupin, Herlock Sholmès, pardon, Sherlock Holmes, dont nous abreuvent Anglais et Américains.
Décidément, cette Ombre d’Arsène n’en est vraiment que l’ombre.
Pascal Ide
En 1995, le jeune Assane Diop (Mamadou Haidara), 14 ans, est bouleversé par la mort de son père Babakar (Fargass Assandé), accusé du vol d’un collier, celui de la reine Marie-Antoinette, que, apparemment, il n’a pas commis.
Nous retrouverons Assane (Omar Sy) aujourd’hui, 25 ans plus tard. En fait, le bijou appartenait à la riche famille Pellegrini, Hubert (Hervé Pierre), marié à Anne (Nicole Garcia) et parents de Juliette (Clotilde Hesme). Aujourd’hui exposé au musée du Louvre, il est mis aux enchères. Pour se venger de cette famille qui, selon lui, a injustement accusé son père, Assane décide d’organiser le vol de ce collier mythique. Pour cela, il s’inspire de son personnage fétiche : le « gentleman cambrioleur » Arsène Lupin. Les policiers chargés de l’affaire, le capitaine Romain Laugier (Vincent Londez) et le lieutenant Sofia Belkacem (Shirine Boutella), se perdent en conjecture, sauf l’un d’entre eux, Youssef Guedira (Soufiane Guerrab), un autre fan d’Arsène, et le Commissaire Gabriel Dumont (Vincent Garanger), qui fut mêlé de près à l’affaire il y a un quart de siècle (Johann Dionnet).
En parallèle de ses activités illégales, Assane tente également de s’occuper davantage de son fils Raoul (Etan Simon), qui vit aujourd’hui avec sa mère, Claire (Ludivine Sagnier) dont il est toujours amoureux, bien qu’ils soient séparés.