Captive State, science-fiction post-apocalyptique américain, dirigé et co-écrit Rupert Wyatt, 2019. Avec John Goodman, Ashton Sanders, Jonathan Majors, Machine Gun Kelly et Vera Farmiga.
Thèmes
Point de bascule.
Qui novi sub sole, celui, magique de la lanterne cinématographique ?
Qu’un film de science-fiction appartenant au sous-genre dystopique explique la catastrophe par des Aliens envahissant la Terre, on l’a déjà vu des dizaines de fois, à commencer dans Independance Day (Roland Emmerich, 1996).
Que des extra-terrestres manipulateurs se fassent passer pour des sauveurs et soient courtisés par les happy few qui croient bénéficier de leurs avantages, est malheureusement le scénario de toutes les tyrannies que, fins psychologues, les Aliens utilisent, et la trame de nombreux films d’anticipation, comme La planète des singes. Les Origines (2011) du même réalisateur Rupert Wyatt.
Que les héros soient une famille de Noirs américains qui, aux liens du sang, ajoutent ce sens si africain de la famille (longue scène, qui se veut émouvante, de retrouvailles entre les deux frères, mais qu’interdit l’impossible identification avec un ado en révolte et un adulte inconnu), combien de fois y a-t-on eu droit, y compris dans un récent film de SF et plus encore fantastique qui en a fait son miel : Black Panther (Ryan Coogler, 2018) ?
Que le protagoniste principal finisse par l’emporter contre les méchants en sacrifiant héroïquement sa vie et laisse ainsi sa place à son successeur, rien de nouveau non plus, puisque cela fut déjà maintes fois mis en scène en science-fiction, par exemple dans Armageddon où le vilain, là, est un astéroïde (Michael Bay, 1998).
Qu’un Élu qui l’ignore, doute, fuie et s’avère être ici le successeur de (Number) One, anagramme de Néo, et vaincra parce qu’il est l’objet d’un amour (ici maternel), est-ce suffisamment matriciel pour qu’il y ait besoin de préciser davantage ?
Qu’un film emboîté et compliqué où le complice s’avère être le bon, la faillite totale être la réussite totale et où tout se retourne au dernier moment, est si téléphoné que c’est devenu la trame commune de toutes les intrigues à suspense, au point que, prévenant la duperie, le spectateur un tantinet averti ne peut pas ne pas suspecter un commandant trop omniprésent pour n’être qu’un pion et trop compréhensif pour faire un méchant crédibe.
Des vaisseaux Alien configurés comme celui du suprême Méta-Barron et qui demeurent en relation avec les mondes extérieurs, abritant de vulnérables extra-terrestres, oui, on l’a aussi rencontré, et dans un grand film de science-fiction, Premier contact (Denis Villeneuve, 2016).
Un petit film à petit budget (25 millions de dollars), en science-fiction, c’est, malheureusement, du déjà vu, mais c’est surtout une catastrophe qui nous vaut des images de synthèse aussi rares que ratées. Le spectateur sort frustré de ne pas avoir visionné l’impressionnante construction du monde underground ou à sa jouissive destruction, ni rencontré face à face, autrement que de nuit et par cascade, un Alien. Raconter au lieu de montrer reconduit le cinéma à la radio, la pire erreur que puisse commettre un scénario. Y aurait-il donc des manipulateurs aussi parmi les intraterrestres ?
Une omniprésence de la ville de Chicago, personnage principal du film, dont les lieux phares sont nommés (Soldier Field, Pilsen, Wicker Park) comme s’ils étaient connus du monde entier, de nombreux films l’ont fait, comme Le Fugitif (Andrew Davis, 1993). Mais c’est d’abord une erreur de casting…
Enfin, le retournement d’un opprimé contraint au travail par et pour l’oppresseur, n’est-ce pas ce que raconte l’éternelle histoire, génialement scénarisée par Hegel dans la dialectique du maître et de l’esclave ?
Alors, reposons la question : que reste-t-il d’inédit (hors l’indigente convergence) ? Peut-être une idée qui est comme le gingle du film : « Provoque une étincelle et déclenche la guerre [spark a match and ignite a war] ». La révolte s’avèrera singulièrement efficace parce qu’elle met en œuvre le dynamisme appelé le point de bascule (tipping point), qui est un équivalent anthropologique de l’effet papillon, autrement dit, une réalisation de cette loi contre-intuitive : « Petite cause, grands effets ». Pourtant, sussurera un esprit un tantinet pointilleux, un système extra-terrestre au fond très fragile que, par effet boule de neige, l’introduction d’un minuscule virus (informatique) détraque aussi rapidement que totalement, n’est-ce pas si réchauffé que le premier plagiat mentionné (Independance Day) l’a génialement utilisé ?
Allons ! Ne boudons pas notre plaisir de voir se lever sur un film post-apocalyptique une espérance comme le soleil sur une terre ténébreuse. On prête à Lénine vieillissant cette parole : « Je me suis trompé. Il aurait fallu dix saint François d’Assise ». Le Carême que nous vivons ne nous prépare-t-il pas à un événement qui, bien qu’étant totalement inaperçu aux yeux des historiens de l’époque, a fait basculer le monde ? Par sa Passion et sa Résurrection, le Christ a définitivement transformé la mort en vie et la violence en amour.
Pascal Ide
En 2019, Chicago est envahie avec succès par des extra-terrestres et placée sous la loi martiale. La famille Drummond, les deux parents avec leurs deux jeunes fils, tente de fuir la ville. Mais leur voiture est arrêtée sous un pont par les Aliens qui vaporisent le père et la mère, et laissent vivants leurs enfants.
9 ans plus tard, le monde a capitulé face aux envahisseurs qui ont le pouvoir, notamment, de contrôler l’électricité. Ceux-ci se font appeler « les Législateurs », car ils imposent leurs lois à travers les gouvernements humains. Ne supportant pas la lumière, ils se sont fait construire des habitations souterraines par les hommes dans des « Zones fermées » où seules les autorités terrestres ont accès. Alors qu’ils font croire qu’ils ont apporté la paix et augmenté les ressources naturelles du globe, les E.T. ont en réalité appauvri les hommes, instauré un régime de terreur par la délation généralisée et introduit un implant sous la peau du cou de chaque humain pour pouvoir le tracer.
Mais certains résistants se sont organisés sous le nom de Phoenix, commandés par un mystérieux Numéro 1 et concrètement dirigés par Rafe Drummond (Jonathan Majors), le frère aîné de la famille vue au début du film. Toutefois, son implant a été détruit, signe qu’il est mort et que le groupe a été neutralisé.
Raphaël Drummond (Ashton Sanders), le frère de Rafe, vit dans une zone misérable de Pilsen. Un jour, il est pris à parti et interrogé par le commandant de police William Mulligan (John Goodman). Ayant été le partenaire de son père avant l’invasion, il est convaincu, à rebours de ce que tout le monde croit, que les résistants n’ont pas été neutralisés. Mais Gabriel refuse de jouer à l’indic.
Plus tard, le jeune homme reçoit un message enroulé dans un papier de cigarette et est contacté par un membre de Phoenix qui parasite les effets de son implant par un collier, le conduit à Wicker Park… et lui fait rencontrer Rafe. Émotion des retrouvailles. Tandis que Gabriel lui transmet la cigarette, Rafe lui révèle qu’un groupe de six membres de Phoenix va attaquer les extra-terrestres et les hautes autorités lors d’une rencontre de l’Unity Rally au stade de Soldier Field.
Mais comment les aliens vont-ils réagir à une telle attaque ? Connaît-on les intentions réelles de Mulligan, un homme complexe, cet homme droit qui pourtant ne semble pas en accord avec son supérieur, Eugene Igoe (Kevin Dunn), compromis avec le pouvoir, ce dur qui pourtant trouve une tendre consolation auprès de Jane Doe (Vera Farmiga), la belle-de-nuit tenant la maison close de Pilsen ? Qui est le Numéro 1 ? Et quelle est la mission réelle de Gabriel ?