BumbleBee, science-fiction américain de Travis Knight, 2018. Avec Hailee Steinfeld, John Cena, Jorge Lendeborg Jr.
Thèmes
Amitié, famille, travail de deuil.
Déjà Bumblebee était le plus aimé des Autobots – pour mémoire, le genre Transformer qui désigne des robots ayant un principe spirituel et pouvant être transformés en véhicules, se divise en deux principales factions qui sont comme deux espèces : les bons que sont les Autobots et les méchants que sont les Decepticons – à cause de sa (relativement !) petite taille, de son caractère facétieux, mais aussi de son énergie belliqueuse (c’est un soldat), de sa vélocité, de son courage qui le fait s’attaquer, parfois victorieusement à des Decepticons bien plus puissants que lui, et enfin de sa générosité.
Avec ce spin-off sans prétention (là encore, relativement : le budget est moitié moindre que la moyenne des cinq autres épisodes de la franchise, ce qui représente tout de même la coquette somme de 128 millions de dollars…) produit par Steven Spielberg, il conquerra le cœur des adolescents, et surtout des adolescentes.
En effet, B-127 devient l’improbable ami d’une orpheline aigrie, aussi vide de relations qu’avide de compassion. Certes, nous sommes loin, très loin, du génial E.T. L’extra-terrestre (Steven Spielberg, 1982), mais le spectateur finit par croire à cette relation symétrique où deux vulnérabilités riment avec complicité et finalement avec amitié. Celle-ci, selon Aristote, ne se caractérise-t-elle pas par la bienveillance, la réciprocité et la convivialité ? Bien sûr, spin-off oblige, nous apprenons en passant pourquoi B-127 parle par émission de radio interposée, est rebaptisé Bumblebee, fait l’objet d’une singulière affection de la part d’Optimus Prime, etc. Mais la réussite du film est d’intégrer l’apport attendu d’informations sur le héros bien-aimé à l’histoire d’amitié.
Voire, autre ternaire observé par le philosophe grec, triple est l’amitié : utile, agréable et vertueuse ; or, observe-t-il avec profondeur, la dernière, qui seule cherche le bien de l’ami pour lui-même, loin d’exclure les deux autres, en intègre tous les avantages en en récusant l’inconvénient (aimer autrui pour son propre intérêt).
Telle est peut-être la plus belle réussite du film – même si l’on aurait souhaité parabole un peu moins transparente pour qu’elle puisse pleinement jouer son rôle métaphorique et donc donner à plein sa puissance thérapeutique, ainsi que l’a montré Milton Erickson. La jeune fille isolée est d’abord une orpheline esseulée et désolée qui a besoin d’être consolée – quatre adjectifs qui sont tous formés sur la racine latine solus, « seul ». En pleine réactivation œdipienne, c’est-à-dire en pleine période de réidentification avec son père (jusque dans l’amour du bricolage et des belles voitures), Charlie n’a pas eu le temps de faire son deuil, selon l’expression consacrée, et se sent incomprise par une mère qui a peut-être trop vite remplacé le père chéri par une nouvelle figure, certes, aimante et même douée (belle reconnaissance finale de ses talents de pilote : « Tu conduis super bien ! »), mais tellement maladroite (pathétique scène des cadeaux d’anniversaire à double message !). Et l’ami inattendu, mi-grand frère, mi-père, va opérer en accéléré ce deuil : revivre la tristesse de la séparation brutale, consentir au détachement trop précoce au nom de la mission propre à chacun (« Il y a des gens qui ont besoin de toi. Il faut que je te laisse partir »), faire mémoire de ce que le cher disparu lui a apporté (ses talents multiples de plongeuse bricoleuse et courageuse) et qu’elle remise pour ne pas redoubler la souffrance de l’abandon et découvrir que celui qui disparaît au dehors continue à vivre au dedans : non pas dans un souvenir muséalisé qui confine le trépassé en un passé dépassé, mais dans un mémorial plein de gratitude (« Merci, grâce à toi, je me trouve enfin. Je ne t’oublierai jamais ») qui transforme (!) le commencement en fondement toujours là, c’est-à-dire en source jaillissant en permanence.
Mais le père de substitution qui autorise le transfert guérissant demeure aussi l’ami, grâce à la touchante vulnérabilité par laquelle non seulement il se laisse toucher, mais il sait aussi délicatement toucher le cœur (et le corps) de la jeune fille. D’ailleurs, autre fécondité d’autant plus autorisée qu’elle n’est pas visée, cette fragilité désarmée, obéissante (répétons-le, l’Autobot est un soldat) et compatissante, bref, par son anima, va éveiller le garçon manqué à sa part féminine. Émouvante trouvaille de cet Autobot qui, replié en posture de stress post-traumatique, adopte, là encore involontairement, la position basse permettant d’être approché. Hilarante scène où ce Mr Catastrophe trop grand dévaste en le découvrant l’univers trop petit qu’est la maison de son amie. Métaphore à peine voilée de ce que l’adolescente, malgré toute sa bonne foi, met K.O. et voue au chaos tout ce qu’elle touche et qui, au moment même où elle tente de réparer, commet involontairement l’irréparable.
Osons-le dire, ce gilet jaune avant et hors la lettre (le générique final rappelle combien Bumblebee doit son nom à l’abeille) nous est si sympathique parce que, loin d’être un victimaire qui attend tout de l’autre, est un battant qui emploie toutes ses ressources pour se battre et réussir.
Pascal Ide
Sur la planète Cybertron, la guerre civile qui fait rage entre les Autobots, conduits par Optimus Prime (voix : Peter Cullen) et les Decepticons, tourne en faveur de ceux-ci. Optimus décide alors d’envoyer B-127 (voix : Dylan O’Brien) sur Terre, afin que la planète serve de base secrète pour le regroupement des Autobots. Le futur Bumblebee arrive en plein exercice d’une unité secrète du gouvernement appelée Secteur 7 qui a justement en charge les activité extra-terrestres. Le colonel Jack Burns (John Cena) qui la conduit soupçonne B-127 d’être un hostile et l’attaque. C’est alors que le Decepticon Blitzwing (voix : David Sobolov) survient, élimine les hommes et intime à l’Autobot de révéler les desseins d’Optimus, détruisant sa voix et endommageant sa mémoire. Mais B-127 réussit à détruire son adversaire, avant de sombrer dans l’inconscience.
Petite ville balnéaire de Californie, 1987, c’est-à-dire vingt ans avant les événements du premier Transformers. Charlie Watson (Hailee Steinfeld) est une adolescente traumatisée par la mort de son père. Amère à l’égard de sa mère Sally (Pamela Adlon) remariée qui, selon elle, a trop vite tourné la page, jalouse de son jeune frère Otis (Jason Drucker) et ignorant les avances de son voisin amoureux, Memo (Jorde Lenderborg Jr), elle s’isole toujours plus. Chez son oncle Hank (Len Cariou) qui est garagiste et possède une décharge de voitures, elle trouve une Coccinelle jaune 1967 qu’elle réussit à se faire offrir en cadeau d’anniversaire pour ses 18 ans. Mais, ignorant que la Volkswagen est la transformation camouflant B-127, Charlie la fait démarrer et active un signal permettant aux Decepticons Shatter (voix : Angela Bassett) et Dropkick (voix : Justin Theroux) qui sont à la recherche de l’Autobot de le détecter. Arrivant rapidement d’une des lunes de Saturne sur la Terre et accueilli par le Secteur 7, Burns en tête, Shatter révèle avec un rare sens de la manipulation, que la Terre est gravement menacée par un criminel nommé B-127, et qu’il faut donc impérativement retrouver. Suspense insoutenable : y arriveront-ils et extermineront-ils tous les Autobots avec, comme effet latéral, la destruction de la Terre ? Suspense autrement essentiel : Charlie se réconciliera-t-elle avec sa famille ? Je vous laisse deviner.