Astérix : Le Secret de la potion magique

Ce bon film d’animation qui ne manque pas d’animation, a-t-il su sauver l’anima – je veux dire l’âme – de la BD ?

Assurément, les scénaristes ont été à bonne école : ils ont su structurer leur histoire autour d’un axe et d’un seul (le secret de la fameuse potion sera-t-il gardé ou transmis ?) ; le nœud est posé clairement et sans tarder ; l’intrigue nous tient en haleine jusqu’au bout ; la résolution est non seulement inattendue, mais originale (non, pour une fois, je ne la spoilerai pas) ; entre les deux, le climax (le sommet de la tension narrative) est particulièrement réussi, puisque tous les héros sont en difficulté majeure et que les chances de réussite des méchants convergent et s’accroissent démesurément).

Plus encore, le scénario emprunte au film de super-héros (après tout, les druides sont des êtres fantastiques doués de super-pouvoirs) le super-vilain qui apparaît de plus en plus non pas comme un super-costaud ou un super-barjot, mais comme un super-manipulateur super-narcissique, sur les pas du génial Joker (The Dark Night, Christopher Nolan, 2008) ou du réussi Grindelwald (Les Crimes de Grindelwald, David Yates, 2018). En effet, Sulfurix convoque une série d’arguments auxquels nos héros ne rétorquent rien. Et, pour cause, car ils visent juste : pourquoi Panoramix n’a-t-il pas utilisé la potion pour libérer la Gaule de l’envahisseur romain ? Pourquoi le surdoué créatif a-t-il passé toutes ces années à répéter la même chose ? Voire, sa chute ne serait-elle pas un acte manqué ? Panoramix ne serait-il pas tombé de l’arbre pour un problème d’identité ? « Tu ne sais pas faire autre chose. Tu n’es même plus un druide ».

Pourtant, malgré ces atouts indéniables, le film manque du tout au tout son objectif. Si nous attendions un film d’animation nouvelle manière, nous ne pourrions qu’applaudir à l’exploit technique et scénaristique. Le problème est qu’il s’inscrit explicitement dans le sillage de la BD. En cela, les cinéastes ne font que répéter l’erreur, beaucoup plus incompréhensible, d’Albert Uderzo, le dessinateur passé aussi scénariste, à la mort prématurée (51 ans) de son complice René Goscinny. Combien de fois faudra-t-il répéter que celui-ci est un génie comique (rappelons que, à côté des Aventures d’Astérix, on lui doit ces monuments de l’humour français que sont Lucky Luke, Iznogoud et Le Petit Nicolas) parce qu’il est un moraliste (cf. la fiche : Uderzo un moraliste ?) ? Notre Molière de la BD avait compris qu’on rit de ce dont on ne pleure pas. Castigat ridendo mores (« Il châtie les mœurs en faisant rire »). Autrement dit, est risible ce qui est ridicule. Et est ridicule le type moral ou plutôt cette mécanique qu’est la caricature (du dévot au devin, du Gaulois irasible au Français ronchonnant) « plaquée sur du vivant » (Bergson).

Pourtant, objectera-t-on, les spectateurs ne rient-ils pas ? Ne suis-je pas mauvais public ? Assurément, j’ai souri, par exemple, lorsque j’ai entendu demander, à propos d’Agécanonix : « Pourquoi choisit-on toujours le plus sourd pour écouter aux portes ? » Mais tel est justement le hic (pardon, le hix !) : le scénario oscille entre le film fantastique et le film comique. Et, lorsqu’on a barré la route éthique (mais pas étique) du véritable humour, il ne reste plus que la farce ou la multiplication des gags. Qui donc a volé la recette de la potion ludique ?

Pascal Ide

Pour la première fois de sa vie, Panoramix (voix de Bernard Alane) au tropisme écologique inattendu, manque de se tuer en tombant d’un arbre alors qu’il cueille du gui. Se retrouvant avec un pied immobilisé, le druide le plus doué de sa génération prend conscience qu’il met le village en danger en gardant pour lui seul le secret de la potion magique et qu’il doit trouver un successeur jeune, talentueux et honnête, afin de le lui transmettre. Avec Astérix (voix de Christian Clavier) et Obélix (voix de Guillaume Briat), il se rend à la réunion druidique ultrasecrète de la forêt des Carnutes, convoquée d’urgence par Panoramix. Mais l’arrivée intempestive de Sulfurix (voix de Daniel Mesguich), un druide maléfique qui fut autrefois le compagnon de Panoramix, et qui guigne désormais la recette, compromet la réunion. Sans compter que Pectine (voix de Lévanah Solomon), une fillette du village, a décidé sans prévenir d’accompagner notre trio pour prouver son utilité et ses talents de bricoleuse. Ils décident alors de parcourir la Gaule pour trouver le druide. Mais les candidats qui se présentent sont tous évincés pour incapacité. Et le dernier d’entre eux, Téléférix (voix d’Alex Lutz), au talent indéniable, n’est-il pas manipulé par Sulfurix qui profite de sa crédulité ? Surtout, trouveront-ils le druide à temps ? Découvrant que le druide est parti et que les réserves de potion sont en train de se tarir, les Romains des camps fortifiés décident d’attaquer le village des irréductibles gardé par le seul Assurancetourix et les femmes des guerriers.