Roger VERNEAUX, Critique de la Critique de la raison pure de Kant, nouv. éd. I. Bitonti, préf. J.-M. Meyer, Paris, IPC, 2014.
Parue dans la Nouvelle Revue Théologique (NRT) 139 (2017) n° 1, p. 142.
On ne peut que se réjouir de l’initiative des Presses de l’IPC de rééditer ce classique des études kantiennes. Son objet est décrit par le titre. En six chap. et une concl., il explicite les concepts centraux du criticisme: le problème critique; les jugements synthétiques a priori; matière et forme de la connaissance ; l’idéalisme transcendantal ; sensibilité et entendement;phénomène et chose en soi ; croire et savoir. Triple est l’intérêt de cet ouvrage qui, bien que datant de plus de quarante ans, n’a pas pris une ride. D’abord, l’A. est un spécialiste de Kant, surtout de la première Critique : il a consacré au philosophe de Königsberg pas moins de 5 ouvrages, dont un fameux Vocabulaire de Kant. Ensuite, son écriture est aussi limpide que rigoureuse. Il n’hésite pas à définir, distinguer, démontrer, serrant au plus près la lettre âpre de Kant, dont une longue fréquentation, y compris dans la langue originale (R.V. a traduit la Lettre à Marcus Herz du 21 fév. 1772),lui donne une réelle familiarité. Les textes sont cités et commentés. Enfin, R. V. ose faire oeuvre de philosophie et pas seulement d”histoire de la philosophie, en proposant une critique de cette Critique. Elle se présente non pas comme un nouvel Anti-Kant (dont le premier est paru, dès 1788, sous la plume de Stattler), mais comme une radicalisation du projet kantien. En réalité, elle réside en un retour à la noétique et la métaphysique thomistes, d’ailleurs très honnêtement présentées (R.V. a écrit 7 ouvrages fameux et très pédagogiques dans la « Bibliothèque thomiste » chez Beauchesne).
Un seul regret : l’esthétique transcendantale se taille la part du lion vis-à-vis de l’analytique transcendantale et de la dialectique transcendantale. Certes, la première suffit à asseoir l’approche critique qui est celle de l’ouvrage, mais les deux autres posent nombre de difficultés qui ne sont donc ni affrontées ni éclairées.
Pascal Ide