Parue dans la Nouvelle Revue Théologique (NRT) 138 (2016) n° 3, p. 520.
Yann Vagneux, Co-esse. Le mystère trinitaire dans la pensée de Jules Monchanin (1895-1957), coll. « Sedcontra », Paris, DDB, 2015.
L’abbé Jules Monchanin (1895-1957), prêtre du diocèse de Lyon avant de devenir moine ermite dans le Bhârat (Inde en sanskrit), est connu grâce à l’amitié pleine de gratitude d’Édouard Duperray et d’Henri de Lubac. En revanche, sa pensée qui est ramassée dans quelques rares publications et des écrits denses jusqu’à l’obscur, est demeurée dans l’ombre. Le père Yann Vagneux vient de la déployer dans une volumineuse thèse de théologie soutenue à l’Univ. Grégorienne. Partant d’une lettre programmatique de 1940, il en montre l’unité et l’originalité, toute (épi)centrée sur le mystère trinitaire, lui-même contemplé comme co-esse. Ce terme (qui signifie « être-avec » et que Monchanin traduit parfois, à partir du grec, par le néologisme synontologie et rend en sanskrit par sam-sat), est emprunté au Journal métaphysique de Gabriel Marcel et désigne la communion dans l’être, dont il permet de penser l’unité dans la différence. Cette intuition se réfracte de manière ternaire. Une 1re partie contemple le co-esse dans la vie des Trois hypostases divines, autrement dit dans la circumincession trinitaire, en regard de la métaphysique platonicienne et néoplatonicienne de l’Unité. Dans une 2e partie, la synontologie est étendue à l’unité du cosmos à partir du Plérôme eschatologique, comme panchristisme. Enfin, la dernière partie se fonde sur cette double compréhension, incréée et créée, du sam-sat, pour entrer dans un dialogue exigeant avec la philosophie hindoue, métaphysique de l’un et du multiple s’il en est.
Nous saurons d’autant plus gré à l’A., prêtre des Missions étrangères de Paris actuellement en mission à Bénarès, de nous avoir introduit à cette pensée exodale profondément missionnaire qui est trop souvent supplantée par les théologies beaucoup plus approximatives de son ami Henri Le Saux et de Jacques Dupuis (cf. le développement et la longue note salutaire, p. 569-573).
Pascal Ide