Annette
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Pays:
franco-germano-belge
Thème (s):
Amour, Passion
Date de sortie:
7 juillet 2021
Durée:
2 heures 20 minutes
Évaluation:
*
Directeur:
Leos Carax
Acteurs:
Adam Driver, Marion Cotillard, Simon Helberg
Age minimum:
Adolescents et adultes

Annette, drame musical franco-germano-belge, de Leos Carax, 2021. Avec Adam Driver et Marion Cotillard.

Thèmes

Amour-Passion.

Il est aussi important de scruter les raisons pour lesquelles certaines critiques se font le thuriféraire d’un prétendu chef d’œuvre que de, selon moi, s’y refuser.

 

Les raisons avancées en appellent à la créativité d’un réalisateur dont l’œuvre en pointillé (six films en trente-sept ans), chacun unique, voire inoubliable, à la virtuosité inventive de la technique, servie par la photographie de Caroline Champetier, à la partition des Sparks qui brise presque constamment avec la rythmique classique et dont le thème du film (« We Love Each Other So Much ») est interprété par les deux acteurs eux-mêmes sur scène, aux références multiples au septième art (par exemple à King Vidor que le générique remercie, ou à Franz Murnau lorsqu’Henry singe Nosferatu le vampire), à la dénonciation des médias à scandale et des violences à l’ère #MeToo dans le monde de la féerie pop.

Mais sur le fond éthique, rien ou une concession totale au tragique néo-romantique le plus complaisant. Au terme de son étincelant parcours de toute la pensée occidentale (Im Raum der Metaphysik) qui est une histoire de la beauté, Balthasar note que, en ses derniers avatars, l’esthétique s’entropise en esthétisme. Le beau superficialisé en simple charme s’est totalement affranchi du vrai qu’il est sensé manifester et du bien qu’il est voué à incarner.

 

Que nous raconte Leos Carax ? Une banale histoire d’amour passion aveuglée qui rapproche deux êtres que tout sépare (symboliquement la distance longuement parcourue à moto, le casque-masque, significativement l’apparence physique, à commencer par la chevelure masculinisant la femme et féminisant l’homme, réellement les tempéraments, violent versus doux, profondément l’égotiste déconstruction du monde, du public et de soi-même d’un côté, l’humble service d’un rôle, de l’autre ; l’amour de soi jusqu’à la mort d’autrui, du public, bientôt de la femme, du rival et de l’enfant, d’un côté et l’amour de l’aimé jusqu’à l’effacement de soi, de l’autre).

Le cinéaste innove toutefois doublement. En rendant cet amour fécond (les grands couples romantiques sont le plus souvent hors filiation et hors institution) et en l’annonçant via la presse people (l’éros passionnel est privé, hors toute publicité, mais non hors tout scandale). Mais Henry et Ann enfantent une marionnette muette. Or, ce qui va lui donner vie et parole, c’est la seconde nouveauté, détestable, multipliée de la manière la plus convenue. En effet, l’anti-héros est la concentration de tous les scandales actuels : de l’abus sexuel de la femme ou plutôt des femmes à la faveur de son statut d’artiste à l’instrumentalisation réifiant l’enfant, en passant par l’abus de pouvoir contre les collaborateurs jusqu’à l’élimination pure et simple du rival. Le tout sur fond néopaïen de négation de toute possible rédemption. Et pour que le spectateur étouffe toute velléité de réconciliation possible de l’enfant avec son bourreau, dans la scène finale, Annette acquiert son corps humain, donc passe de la mort à la vie, de la servitude à la liberté, au moment où elle renie son père : elle coupe ses ficelles de marionnette en coupant son lien à la paternité. Elle accède à l’autonomie en tuant symboliquement son géniteur.

Inutile d’invoquer la figure chrétienne du Père « riche en miséricorde » (Ép 2,4), l’Anti-Œdipe (Deleuze et Guattari) ou l’éviction de la filiation diagnostiquée par Hannah Arendt (« la modernité souffre d’un ressentiment à être né », dit-elle dans les Origines du totalitarisme) pour récuser cette idéologie funeste. Il suffit d’en appeler à la critique faite par la revue Esprit voici un quart de siècle à propos du drame de l’inceste, alors que la tendance massive des jugemente était de destituer les pères abuseurs de toute paternité : mieux vaut un père indigne (dont il faut bien entendu protéger l’enfant) que pas de père du tout. Autrement dit, après le nécessaire exercice de la justice, sauver le lien de paternité qui est constitutif de l’être, et ouvrir au moins en espérance à la seule libération qui délie de l’amertume mortifère : le pardon.

 

Qu’est donc le réalisateur des Amants du Pont Neuf devenu ? Ah oui, il se renouvelle ! Pourtant quoi de plus cyclique que ce pathétique romantique acédique ?

 

Pascal Ide

Los Angeles, de nos jours. Henry McHenry (Adam Driver) est un comédien de stand-up à l’humour féroce et Ann (Marion Cotillard), une cantatrice de renommée internationale. Ensemble, sous le feu des projecteurs, ils forment un couple célèbre, envié et glamour. Qui plus est, ils ont la joie d’accueillir un enfant, Annette. Mais ce bébé étrange a tout d’un Pinocchio au féminin, la voix en moins. Avec cette fillette mystérieuse, que va devenir le couple scruté par la chronique mondaine ? Se pourrait-il qu’Henry ait, par une sombre nuit de tempête sur leur bateau, tué sa propre femme ?

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