Solo
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Thème (s):
Amitié, Amour, Récit, Solitude
Date de sortie:
23 mai 2018
Durée:
2 heures 15 minutes
Directeur:
Ron Howard
Acteurs:
Alden Ehrenreich, Woody Harrelson, Emilia Clarke

 

Solo: A Star Wars Story, film de science-fiction américain de type space western de Ron Howard, 2018. Spin-off de la franchise Star Wars. Avec Alden Ehrenreich, Emilia Clarke, Donald Glover et Woody Harrelson.

Thèmes

Récit, amour, amitié, solitude.

Ron Howard a trop de métier pour que le spectateur s’ennuie ; mais celui-là est trop lié pour que celui-ci soit saisi.

 

Certes, l’on se rappellera longtemps (et l’on revisionnera avec joie) la scène du train, aussi spectaculaire que créative. Mais elle résume à elle seule les ressources et les ratages du film : inédite et ingénieuse, elle multiplie les rebondissements et donc les suspenses, jusqu’à en être surdopée ; elle introduit de nouveaux personnages, renouvelle constamment l’intérêt jusqu’à saturer notre (en tout cas ma) capacité de compréhension ; nous attachant aux héros, elle réussit même à dramatiser la disparition d’une des figures-silhouettes du pilote tétramane, mais pas jusqu’à nous arracher de la mélancolie ; enfin et surtout, en mobilisant beaucoup de notre attention, la scène l’a plutôt détournée, sans pouvoir l’intégrer dans le scénario principal et ainsi enrichir l’intrigue. À moins qu’il ne s’agisse d’une métaphore au second degré : le film ressemble étrangement à ce train fou lancé à pleine vitesse dont on ne sait ni qui le guide ni où il va…

Mais la raison fondamentale de l’échec gît ailleurs que dans cette erreur scénarique : une raison qui tient peut-être à son essence même et rend la défaillance inguérissable. Pour le comprendre, opérons un zoom arrière pour embrasser la totalité de la saga et osons une analogie anatomique.

La trilogie initiale (les épisodes IV à VI), malgré son déficit technique, demeure le tronçon le plus génial, parce que le réalisateur et scénariste George Lucas a pu librement et audacieusement donner libre cours à son immense créativité en inventant une histoire d’emblée pensée comme un tout se déployant en trois « segments » (un peu comme un abdomen, un thorax et une tête). La structure initiale s’est considérablement compliquée lorsque, vingt-deux ans plus tard, le même cinéaste s’est attaqué à la trilogie initiale ou prélogie (les épisodes I à III) dont la fin était déjà connue et le supense abrasé : aboutir à la naissance secrète des deux jumeaux de Padmé, qui sont les artisans principaux de la rébellion, et surtout raconter l’histoire inverse de la première trilogie, la trans(dé)formation d’Anakin Skywalker en Dark Vador. Et l’on sait que si les deux premiers épisodes ont tâtonné, le renouvellement lié à l’introduction massive du numérique et la volonté affichée par le monomane Lucas de subcréer un véritable univers, ont permis de patienter pour aboutir à ce pur chef d’œuvre tragique qu’est la chute de l’ange Jedi et sa diabolisation intime, mais point irréversible, dans le troisième (La revanche des Siths). Pour reprendre la métaphore anatomique, ce qui n’était au départ que des membres difformes ajoutés à l’abdomen s’est métamorphosé en celui-ci pour parfaitement s’ajuster à ce qui est devenu un céphalothorax.

La troisième et nouvelle trilogie (en cours, puisque nous attendons fébrilement l’épisode conclusif), elle, s’est retrouvée dans la même libre posture que Lucas et donc possède les mêmes chances que celui-ci, deux handicaps en plus : les réalisateurs ne sont plus le cinéaste créateur ; surtout, ils se sont multipliés – courant le risque immense non seulement de ne point assurer l’unité organique du tout, et de ne pas articuler intrinsèquement la troisième à la deuxième, c’est-à-dire lui façonner une tête qui ne serait qu’un monstrueux prolongement. Si les deux premiers épisodes n(e m)’ont point du tout déçu, « attendons la fin »…

Passons le premier spin-off, Rogue one (2016) qui, racontant le vol des plans de l’Étoile de la mort par les rebelles, s’achève quelques instants avant les premières images de Un nouvel espoir. En assurant une césure, il redoublait la contrainte du point de départ (l’épisode III) par celle du point d’arrivée (l’épisode IV). Un cadre aussi bridé ne pouvait qu’aboutir à un scénario étriqué. Et comme la créativité d’une intrigue se déploie entre la nouveauté de l’état initial et l’imprévisibilité de l’état final, la conclusion de mon jugement-raisonnement sera aussi prévisible que l’intrigue. Exit Rogue one !

 

De prime abord, la problématique de Solo diffère et permet un renouvellement de la franchise : révéler le septénaire décisif d’années précédant l’entrée dans la légende d’un des personnages centraux. De fait, comment ne pas se réjouir : de voir se constituer la constellation du légendaire pilote contrebandier, tant sont rares ses amis (qui se limite au très grand, velu et onomatopéique Chewbacca), multiples ses ennemis et ambigus ses contacts – au premier rang desquels Lando Calrissian ; révéler l’origine de sa compétence de pilote hors pair (qui s’avère être beaucoup plus : une mission, voire une vocation) et l’acquisition de son mythique symbole (le Faucon Millenium) ; mettre en place ses traits de caractère (comme son cynisme désinvolte) et jusqu’à ses traits physionomiques (quelle trouvaille de faire mimer à Alden Ehrenreich le sourire-rictus qui soulève le coin droit de la lèvre supérieure, si caractéristique de l’humour désabusé d’Harrison Ford !). Et surtout élaborer le traumatisme qui transforme une âme droite et généreuse en un hors la loi, certes attachant, mais sans attache. Trauma en l’occurrence répété : l’abandon initial autant qu’involontaire de sa compagne Qi’ra, si violemment douloureux qu’il explique le nom, Solo, adopté par Han, s’amplifie démesurément par l’abandon final autant qu’intentionnel par lequel elle le trahit en faveur d’un seigneur Sith qui ressemble étrangement à Dark Maul (pourtant décédé au terme de l’épisode I : La Menace fantôme).

Bref, dans Solo, le centre d’intérêt se déplace de l’histoire vers un protagoniste. Mais profiler un personnage, même principal, constitue-t-il un objectif suffisant et surtout peut-il se substituer à la narration d’une histoire, surtout dans un film d’action ? Tel est le carambolage qui explique le ratage (je ne dirais pas le naufrage) du film : autant la naissance de Solo est réussie, autant l’intrigue est manquée. Filons une dernière fois la métaphore biologique : bien que situé entre La Revanche des Sith et Un nouvel espoir, le récit n’est pas un nouveau segment comme Rogue one, mais adjoint un appendice latéral à l’organisme constitué par les neuf épisodes ; or, l’anatomie (voire l’embryologie) n’est pas la physiologie ; autrement dit, la structure (ou son devenir) n’est pas l’action. Voilà pourquoi, indépendamment du choix de ne pas même mentionner l’univers mythique de Star Wars (la force et sa double déclinaison, lumineuse chez les Jedi et obscure chez les Siths) et de l’absence cruelle de la magique musique (John Williams s’est contenté d’inventer l’air de Solo), le film pèche par déficit d’un réel méchant, d’un objectif précis, et donc d’un suspense qui crée cette tension constitutive du récit (ainsi que le montre l’ouvrage décisif de Raphaël Baroni (La tension narrative. Suspense, curiosité et surprise, coll. « Poétique », Paris, Seuil, 2007). La conséquence en est que ce film trop ténébreux (c’est l’un des effets latéraux les plus coûteux d’une technique, la 3D, dont je peine à décliner les avantages) n’est paradoxalement ni assez sombre ni assez lumineux.

 

Le quatrain d’octosyllabes qui ouvre cette recension critique ne mérite assurément pas un prix international de poésie, mais il rappelait que la magie Star Wars rime avec poésie. Ce film riche d’atouts s’avère finalement pauvre en atour.

 

Pascal Ide

L’histoire se déroule sept ans avant Un nouvel espoir. Sur la planète Corellia spécialisée dans la construction navale, Han (Alden Ehrenreich), 18 ans, vit ou plutôt survit avec sa compagne Qi’ra (Emilia Clarke), vole du coaxium, le précieux hyper-carburant. Afin d’échapper aux griffes d’un gang criminel local, dirigé par la répugnante Lady Proxima, ils corrompent un officier impérial en échange d’une place sur un vol interplanétaire. Mais, à l’ultime moment, Qi’ra est appréhendée par leurs poursuivants et les deux jeunes gens séparés.

Han lui promet de revenir et s’engage dans la Marine Impériale. Nous le retrouvons trois ans plus tard, expulsé de l’Imperial Flight Academy pour insubordination. Alors qu’il sert comme fantassin lors d’une bataille sur la planète Mimban, il rencontre une bande de criminels se présentant comme des soldats impériaux menés par Tobias Beckett (Woody Harrelson). Solo tente de les faire chanter, mais Beckett le fait arrêter pour désertion et jeter dans une fosse où une bête doit le nourrir. Or, cette bête s’avère être un Wookie nommé… Chewbacca (Joonas Suotamo). Han survivra-t-il et, surtout, pourra-t-il enfin revenir sur Corellia et sauver sa Belle ?

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