BOHINEUST H. o.s.b., Obéissance du Christ, obéissance du chrétien (recension)

BOHINEUST H. o.s.b., Obéissance du Christ, obéissance du chrétien. Christologie et morale chez saint Thomas d’Aquin, coll. Bibliothèque de la Revue thomiste, Paris, Parole et Silence, 2017, 15×23, 872 p., 40 €. ISBN 978-2-88918-911-3. Cet imposant ouvrage est la publication d’une thèse de théologie soutenue à l’Inst. St-Thomas d’Aquin (Toulouse) par un bénédictin de N.-D. de Randol. Se fondant sur la totalité de l’œuvre de St Thomas, il a pour objet l’obéissance, dans toute son extension, et pour problématique de montrer que, en son essence – ratio pour Thomas, logos pour Maxime -, elle est « instrument de coopération et de communion » (p. 783). La thèse se déploie en 3 parties. La 1ère traite de l’obéissance humaine qui, elle-même, se réfracte en métaphysique, morale, psychologie, physique et économie de l’obéissance. La 2ème considère l’obéissance du Christ qui, à l’instar de la médiation, se dédouble, en descendante et ascendante. La 3ème applique ces considérations à l’obéissance du chrétien, considérée en général et dans le cadre de la vie religieuse. L’intention de ce travail est de rapprocher le plus possible l’obéissance, vertu morale chez St Thomas, et la vertu théologale de charité, tout en maintenant le hiatus. Pour ce faire, l’A. emploie la catégorie d’« instrument » : de même que l’humanité du Christ est l’instrument (conjoint) de sa divinité, de même l’obéissance l’est-elle de la charité. L’apport sans doute le plus original est l’application à la doctrine thomasienne d’une distinction entre deux conceptions de l’obéissance, empruntées au grand spécialiste de la règle de St Benoît, le père Adalbert de Vogüé (p. 11-12) : l’obéissance est exercée en vue de la coopération du bien ou en vue de la communion de l’amour – la première finalité étant qualifiée par l’A. d’objective et la seconde de subjective (p. 132s). Si, du premier point de vue, elle est « un instrument de promotion du bien commun », du second, elle est « instrument de cette sortie de soi » qu’est l’amour d’amitié (p. 116-117). Comment ne pas louer cette intention, d’autant plus que l’A. a compris que l’enjeu est de se positionner face aux grandes théologies de l’obéissance élaborées par Barth et Balthasar (p. 792-795) ? Mais, seulement énoncé au terme, le face-à-face en reste à l’intention. On s’étonnera de ce que le concept d’« instrument ››, central dans la démonstration, ne soit pas élaboré pour lui-même. Surtout, la détermination proposée ne cesse de faire de l’obéissance une partie de la justice et donc une réalité accidentelle à la charité en son essence. Qu’il est dommage que, dans le prolongement des théologiens susnommés, surtout du second, il n’ait pas aperçu les ressources offertes par une théologie de l’amour-don, donc de la charité, qui interprète l’obéissance à partir de la réceptivité. _ P. Ide

25.7.2022
 

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