Le munus dans l’Église. Son articulation au pouvoir et à la juridiction. Une relecture à la lumière de l’amour-don 3/3

5) Détermination à la lumière de l’amour-don

a) Thèse

Redisons-le, nous adhérons en tous points à la thèse défendue avec audace et acribie par le père Pinet. Elle nous paraît apaisante, d’abord parce qu’elle est clarifiante, c’est-à-dire vraie. Cheminant entre les deux excès des positions que nous avons appelées d’unitaire et duelle, il adopte une posture équilibrée que, par comparaison, l’on pourrait qualifier, d’un adjectif emprunté à Soloviov, d’uniduelle.

Il est hors de question de reprendre le dossier des sources théologiques qui est instruit avec précision par le père Pinet : Écriture [1], Tradition patristique [2] et médiévale [3], et Magistère [4]. Je noterai seulement un texte, d’une importance singulière, car il articule implicitement ordre et juridiction à partir des trois munera.

 

« La consécration épiscopale confère aussi, avec la charge de sanctifier, celle d’enseigner et de gouverner ; cependant, de par leur nature, ces charges ne peuvent être exercées que dans la communion hiérarchique avec le Chef et les membres du Collège [Episcopalis autem consecratio, cum munere sanctificandi, munera quoque confert docendi et regendi, quae tamen natura sua nonnisi in hierarchica communione cum Collegii Capite et membris exerceri possunt] [5] ».

b) Principe

Nous proposons de réinterpréter ces différentes questions en clé d’amour. La raison ultime en est théologique. Repartons du point de départ. En effet, nous l’avons vu, munus se comprend à partir du pouvoir, donc de la puissance. Or, en Dieu même, la puissance est un attribut postérieur à l’amour qui se notifie à partir de celui-ci. Par ailleurs, Dieu communique sa puissance à l’Église. Donc, analogiquement, le munus doit être interprété à partir de l’amour :

 

« La véritable puissance qui donne la force au pouvoir ecclésial est la puissance de l’amour, puissance du Dieu trinitaire […]. La mission de l’Église donne au pouvoir avant tout juridique qu’elle exerce une nature spécifique qui s’exerce pour le salut des hommes et qui manfieste la Loi du Royaume de Dieu que l’Église doit annoncer : la loi de l’amour [6] ».

 

De fait, il serait possible de proposer une relecture du dernier Concile à partir de la dynamique de l’amour et de montrer que, loin d’être d’abord ecclésiologique, il est profondément animé par une vision théo-logique, précisément trinitaire. Or, les Pères conciliaires ont aussi adopté spontanément une interprétation amative (et donc sociale) de la Trinité, à partir du Père, qui est « Amour fontal » ou « Amour dans la source » [7]. Et nous avons vu que, implicitement, le père Pinet adopte cette vision amative en proposant le schéma descendant et ascendant de l’exitus-reditus, qui fait tout sortir du Père et revenir à Lui.

Appliquons cette clé universelle de lecture au munus et, pour cela, repartons d’abord des trois questions que nous avons posées au terme du bref résumé que nous avons proposé de la thèse du père Pinet.

c) La nature du munus

L’amour-don épouse une triple dynamique : unitaire (réception-appropriation-donation), binaire (donation, réception, donation en retour et réception en retour) et ternaire ou plutôt trinitaire (le donateur aimant ne peut se donner et, ultimement, se recevoir en retour, le récepteur aimé peut se recevoir puis se donner en retour seulement parce qu’il est communicable comme esprit circulant entre les personnes) [8].

Or, l’Église est l’Épouse du Christ (cf. Ép 5,21-33), une de « l’unité du Père, du Fils et de l’Esprit-Saint [9] ». Elle est donc bien rythmée par ces différentes dynamiques. Et comme la première loi de l’amour-don est la communication, l’Église est riche des dons parfaits que lui octroie « le Père des lumières » (Jc 1,17). Ainsi, le munus doit d’abord s’interpréter comme un don reçu du Dieu unitrine par la médiation du Christ. Avant d’être un pouvoir, une fonction, il est un don. Or, le don (passivement) reçu ne n’accomplit que dans le don (activement) communiqué : « Vous avez reçu gratuitement, donnez gratuitement » (Mt 10,8). C’est alors que le munus devient une mission, une charge, une fonction.

Nous aboutissons donc à la même conclusion que le père Pinet qui reconnaissait « la double dimension de don et d’obligation [10] » traversant et constituant le munus – la détermination explicite (à la lumière du don) de la nature de la relation unissant les deux faces du munus en plus. Mais il y a davantage. Nous l’évoquions plus haut : entre la réception et la donation, un moment d’appropriation est nécessaire. C’est ce qu’évoque implicitement l’aoriste dans la parole du Christ, qui brise la symétrie : nous aurions été en droit d’attendre : « Vous recevez gratuitement, donnez gratuitement ». Si le premier verbe est au parfait, c’est pour signifier que le bénéficiaire a mémorisé, intériorisé le don, bref, se l’est approprié. Or, nous parlons ici d’une intériorisation opérative, en quelque sorte éthique, alors que le munus relève d’abord de l’être : le munus baptismal transforme l’être du baptisé et le munus sacerdotal l’être du prêtre. Donc, pour définir adéquatement le munus, il convient de cerner cette transformation ontologique, ce qui manque à la détermination du père Pinet. Or, cette transformation fait justement du munus une source d’actes nouveaux (ceux qui se distribuent selon les trois munera), autrement dit une potestas, et une potestas sacra, puisqu’elle est un don du sacrement (le baptême ou l’ordre).

Nous reviendrons plus bas sur la iuridictio, qui vient préciser et déterminer encore davantage ce pouvoir. Nous voulons seulement insister sur la nécessaire précision à apporter sur la nature du munus. Disons-le avec d’autres mots. En ne parlant de la dynamique à la réception et à la donation, comme c’est si souvent le cas, nous réduisons le bénéficiaire à n’être qu’un canal traversé par le don, voire nous courrons le risque d’en faire un moyen instrumentalisé par le bienfaiteur. Or, si Dieu bénit l’autre par notre médiation, il ne le fait jamais sans bénir le médiateur. Ainsi, de même, le munus doit être considéré pour lui-même dans toute sa consistance transformante, comme un pouvoir octroyé et délégué, sans craindre ni le mot, ni la chose. Pour résumer en une phrase ce qui demanderait de longs développements doctrinaux et historiques, disons que l’on sort de la dialectique du Dieu omnipotent du nominalisme et du déisme, d’une part, et du Dieu impuissant d’un certain nombre de théologies actuelle, d’autre part, qu’en comprenant que le Dieu qui fait toutes choses « avec sagesse et par amour » n’est tout-puissant que pour autant qu’il communique le plus possible cette puissance : « Amen, amen, je vous le dis : celui qui croit en moi fera les œuvres que je fais. Il en fera même de plus grandes » (Jn 14,12).

Ainsi, en revalorisant la notion de potestas qui est au cœur du munus, l’on prend en compte le souci de la vision duelle d’accorder davantage au pouvoir, sans pour autant craindre de retomber dans une vision seulement sociétaire et hiérarchique de l’Église.

d) L’articulation entre munus et communio

Le deuxième point appelant une précision est la relation entre munus et communio, donc, la relation entre munus et iuridictio. En effet, si l’intuition est puissante et profonde, elle demande à être pensée : quelle est la nature de la relation entre munus et communio, et pensée en harmonie avec la thèse première de la pulsation entre les deux faces du munus que sont le don reçu et le don offert.

Or, une nouvelle fois, la dynamique totale du don présente de riches sources pour expliciter ces connexions. En effet, l’une des lois les plus fondamentales de l’amour-don affirme que le don est pour la communion. De plus, l’une des dernières lois énonce que le don en cascade (A donne à B qui donne à C) s’intègre toujours dans le don en boucle, c’est-à-dire en communion (ultiment, C, etc., redonne à A). Or, ici le Père donne au Fils qui donne à l’Église ; le pape donne à l’évêque qui donne au prêtre qui donne au baptisé ; etc. Voilà pourquoi le munus, qui relève de la cascade, ne trouve son achèvement que dans la communio, qui relève de la boucle. Nous allons bientôt revenir sur ce point en traitant du conflit des deux ecclésiologies, et nous montrerons que toute la domination implicitement contenue dans la notion de pouvoir n’est définitivement écartée que dans la communion.

Et puisque la juridiction s’incarne dans le service de la communio, la relation entre munus (épiscopal) et iuridictio (ou entre munus et potestas par la médiation déterminante de la iuridictio) ne doit pas seulement être pensé comme exercice, exécution ou actualisation, mais aussi dans les catégories proprement théologiques de l’amour-don comme achèvement du don dans la communion. Voilà pourquoi, comme l’observe Joseph Ratzinger, ordre (sacrement) et juridiction « sont présentés sous un jour nouveau à la lumière originelle de la théologie patristique ». Ils ne doivent donc pas être séparés, au nom de la distinction entre corpus verum et corpus mysticum qui ne sont plus aujourd’hui aussi séparés que certains théologiens veulent le dire :

 

« La théologie actuelle reconnaît à nouveau que corpus mysticum et corpus verum sont coordonnés l’un à l’autre. Le corps réel du Seigneur nous est donné pour que le Corps mystique s’édifie par sa vertu, car ce n’est que par là que le corps réel trouve son sens parfait. C’est pourquoi il est impossible de séparer l’un de l’autre les deux aspects du ministère selon leur objet formel, car ils constituent une unité de service au corps du Seigneur [11] ».

 

Notons – sans pouvoir l’approfondir, car il s’agit d’un sujet à part entière – que derrière ces problématiques se profile celle de l’articulation entre primat romain et Églises locales. En effet, « à bien des égards, les fondements théologiques du pouvoir dans l’Église se sont construits autour de la question de la primauté du pouvoir pontifical [12] ». Or, ce que nous venons d’évoquer et ce que nous allons ébaucher sur les ecclésiologies, contiennent peut-être la possibilité de penser cette primauté et ce pouvoir en termes de service de la communion.

e) La distinction des tria munera

Le troisième point à notre sens insuffisamment déterminé dans le propos du père Pinet nous semble être celui de la distinction des trois munera. À la suite du Concile, il les pose, sans les penser dans leur distinction. De plus et a fortiori, il ne considère pas cette tripartition à partir de la logique première du biface réception-donation qui, pour notre théologien, structure le munus. Pourtant, les textes conciliaires ne parlent pas tant de munus que de munera, dans leur triplicité. Ils les envisagent non pas d’abord dans leur généralité, mais dans la concrétude de leur distinction. Ce manque est d’autant plus regrettable que leur différence est à la racine du différend opposant les tenants de l’interprétation unitaire et ceux de l’interprétation duelle (pour le dire simplement, le pouvoir d’ordre recouvre le munus sanctificandi et le pouvoir de juridiction le munus docendi et le munus regendi).

Or, si la dynamique du don peut éclairer cette question, c’est ici en se laissant enrichir, enseigner par elle. En effet, nous l’avons vu, dans cette perspective, le munus apparaît comme un don intériorisé, un pouvoir ouvrant à une communication. Or, triple est la communication, voire toute communication. Et le triple munus, analogiquement interprété, structure toute autodonation. Osons proposer une induction scalaire parcourant les différents degrés de l’être ou plutôt les différents ordres de Pascal (corps, esprit, charité), enrichis de celui de la vie.

Avec la « chasse » aux exoplanètes, l’astrophysique découvre que nombreuses sont les étoiles possédant un système planétaire. Or, le soleil ne se contente pas d’être la source de la matière qui, expulsée de l’astre, constitue le corps de la planète, mais lui communique deux caractéristiques : d’une part, l’attraction qui satellise la planète autour de lui (sinon, elle ne serait même pas une comète, mais un astre errant) ; d’autre part, le rayonnement qui, au minimum, l’éclaire et, au maximum, se transforme en réchauffement, voire produit la photosynthèse. Donc, l’étoile offre ce que que, analogiquement, l’on peut appeler trois dons : l’être, le direction et la lumière.

Le propre du vivant est d’engendrer d’autres vivants. Mais il ne se contente pas de communiquer la vie à ses descendants. Avec cette vie, il leur donne aussi de quoi se nourrir et de quoi se diriger. Certes, ces communications sont plus ou moins apparentes selon la part d’inné et d’acquis. Par exemple, chez ce procaryote qu’est la bactérie, la communication de la direction qui, ultimement, s’identifie à la propagation de l’espèce, est intégralement contenue dans la transmission du génome de la cellule-mère à la cellule-fille, alors que, chez les orang-outans, l’éducation des enfants prend pas moins de sept années de la vie des parents.

Chez l’homme, être d’esprit, à la procréation se joint la double œuvre de communication des savoirs (incluant les savoir-faire) et du savoir-être, c’est-à-dire de l’instruction et de l’éducation, c’est-à-dire, en termes éthiques précis, des vertus intellectuelles et des vertus morales.

L’on peut enfin remonter jusqu’au Créateur. Or, pour saint Bonaventure autant que pour saint Thomas, la raison et la cause de la distinction entre les créatures se trouve dans les processions divines. Et, chez le premier mais non chez le second, la structure au sein de la créature réside aussi dans la participation à la vie trinitaire, de sorte que tout étant est constitué d’une origine qui le fait exister (cause efficiente), d’une forme qui le structure (cause exemplaire) et d’une opération qui le fait agir (cause finale).

Or, outre cette large induction qui montre à la fois, en aval, comme des préparations au trois munera et brise une compréhension trop équivoque des relations nature-liberté et nature-grâce, et en amont, leur participation à la vie intime des Personnes trinitaires, nous avons vu que les communications ne sont pas égales. Entre elles, il y a comme une hiérarchie. La première accorde l’être, alors que les deux autres perfectionnent cet être une fois donné pour le porter à son achèvement – ultimement dans la ligne du vrai et dans la ligne du bien.

Or, cette différence hiérarchisée entre les dons, n’est-ce pas ce que veut sauver la posture duelle, en distinguant, d’un côté le pouvoir d’ordre et de l’autre, le pouvoir de juridiction ? On se souvient que Charles Journet, qui distinguait bien les trois munera (sans toutefois les nommer comme tels) comme trois régimes de communication, les ordonnait selon la double causalité : instrumentale (ou seconde instrumentale) pour la communication de la sanctification ; et seconde (ou seconde principale) pour la double communication de l’enseignement et du gouvernement. En graduant les trois donations, sans pour autant nier qu’elles ont en commun d’être des auto-communications, nous pouvons à la fois sauver la part de vérité de la posture duelle (la distinction et la hiérarchie entre les deux potestates) et en écarter la part d’erreur (poser une distinction originaire entre deux potestates) que corrige l’affirmation conciliaire relative à l’unique potestas sacra.

Notons en passant que cette proposition de relecture ouvre, latéralement, à une compréhension nouvelle de la différence si difficile à cerner entre les sacrements de baptême et de confirmation : elle s’enracine dans la nécessité de distinguer entre le don de l’être et le don de ce qui perfectionne l’être (ce qui est différent de la simple croissance).

f) Les deux ecclésiologies

Il est bien entendu hors de question de nous affronter à la question si importante des deux ecclésiologies en opposition polaire. Notons seulement deux ressources présentes dans la dynamique du don.

  1. L’on oppose, en effet, volontiers l’Église-institution et l’Église-charisme, la première privilégiant la structure visible et la seconde l’Esprit qui invisiblement l’anime – avec toutes les conséquences sur l’appartenance ecclésiale qu’un catholique Français n’a nulle difficulté à identifier. Or, la troisième dynamique, trinitaire, souligne l’importance de l’esprit pour unifier les personnes en communion, c’est-à-dire en acte de se donner et de se recevoir. Mais elle montre aussi que cet esprit ne peut agir efficacement sans se soutenir d’une organisation, voire sans la secréter. Faisons à nouveau appel à l’induction cosmologique tant l’esprit s’ébauche dans la nature et tant l’Esprit la remplit de sa gloire (« le ciel et la terre sont remplis de ta gloire ») : assurément, un animal ne peut agir que par l’énergie que, à chaque instant, le sang apporte à chaque cellule de son organisme ; mais que serait le système vasculaire sans le système osseux qui lui offre structure et tenue ? Donc, loin de s’opposer ces deux visions de l’Église se complètent, mais non sans un ordre : née de la vie de l’Esprit, l’institution est totalement à son service.
  2. L’on oppose aussi beaucoup et peut-être encore davantage l’Église-hiérarchie et l’Église-communion, la première privilégiant la verticalité et la seconde l’horizontalité – là encore, avec toutes les applications en sociologie religieuse que nous connaissons si bien. Bien qu’opposées, elles disent pourtant chacune quelque chose du mystère de l’Église : sans hiérarchie et de hiérarchie visible, dans la seule circulation des biens, l’on ne perd pas seulement l’autorité et la primauté, mais beaucoup plus gravement l’initiative risquée et totalement gratuite du don ; sans communion, l’on ne perd pas seulement la joie imprenable de l’amitié, mais la seule relation qui conjure toute violence née de la dénivellation, y compris celle provenant du don gratuit.

Or, ainsi que la formulation même des risques et des chances le laisse déjà pressentir, la deuxième dynamique, binunitaire, permet de sauver ce que chacune de ces ecclésiologies dit du mystère de l’unique Église. En effet, nous l’avons vu, elle affirme que le don est pour la communion. Autrement dit, l’initiative asymétrique de la donation trouve son achèvement dans l’échange mutuel de donation et réception qui est l’essence de la communion. Or, la donation structure symboliquement l’espace en haut (le donateur) et en bas (le récepteur), à l’image du rayonnement solaire ou de la pluie qui descendent (cf. Is 55,10-11), alors que la réciprocité horizontalise les relations. Donc, derechef, la dynamique dative réconcilie la double vision de l’Église, tout en les ordonnant : l’Église-hiérarchie est au service de l’Église-communion. Ainsi, le concept de communion hiérarchique, cher à Ghirlanda, se trouve éclairé, non sans un discernement qui asymétrise les deux termes, ainsi que le père Congar l’avait exprimé. Et ce n’est pas un hasard si le mystère de l’Église doit être contemplé non pas seulement à partir de sa relation sponsale au Christ-Époux, mais à partir de la vie trinitaire. C’est seulement en elle que, sans rien nier de l’asymétrie et de la primauté (le Père est la première Hypostase divine, parce que seul il est « Amour fontal », ainsi que nous le rappelions ci-dessus), la donation conjure définitivement toute dénivellation et toute domination pour s’horizontaliser parfaitement dans la communion.

6) Conclusion

« La relation entre pouvoir d’ordre et pouvoir de juridiction – écrit Alfonso M. Stickler – nécessite un approfondissement scientifique des deux conjointement […]. En particulier, l’ordre comme principe de la juridicion dans la structure hiérarchique de l’Église, n’a pas été suffisamment expliqué et examiné [13] ». Le jugement du cardinal autrichien, qui faisait le bilan dix ans après la promulgation de Lumen gentium, est toujours de saison. Ainsi que le disait l’introduction, l’un des intérêts de la théologie du munus est sa secrète anastomose avec les autres parties de la théologie, attestant ainsi la connexio mysteriorum. Nous avons bien conscience que nous n’avons fait qu’effleurer des problématiques complexes et que notre proposition n’a pas fait de propositions pastorales pour l’incarner. Du moins introduit-elle non seulement quelques concepts nouveaux, mais elle les articule, attestant en retour la fécondité d’une théologie centrée sur l’amour-don et l’amour-communion, donc pleinement pensée à partir du cœur même de la Révélation : Deus caritas est.

Pascal Ide

[1] Ibid., p. 108-157.

[2] Ibid., p. 158-187.

[3] Ibid., p. 188-191.

[4] Ibid., p. 191-208 ; et tout le chap. 1.

[5] Lumen gentium, n. 21, § 2.

[6] Jean-Marie Aubert, « Pouvoir », Encyclopédie Catholicisme, Paris, Letouzey & Ané, 1988, tome 11, col. 696 à 718 , ici col. 706.

[7] « … ‘l’amour dans sa source’, autrement dit la charité du Père [ex ‘fontali amore’ seu caritate Dei Patris] » (Concile Œcuménique Vatican II, Décret Ad gentes sur l’activité missionnaire de l’Église, 7 décembre 1965, n. 2).

[8] Il appartient à une métaphysique de l’amour-communion, actuellement en cours d’élaboration, d’établir en détail ces différents dynamiques.

[9] Lumen gentium, n. 4.

[10] Martin Pinet, La notion de munus au concile Vatican II et après, p. 457. Souligné dans le texte.

[11] Joseph Ratzinger, « La collégialité épiscopale. Développement théologique », Guilherme Baraúna (éd.), Yves Marie Congar (éd. Française), Vatican II. La Constitution dogmatique sur l’Église Lumen gentium. L’Église de Vatican II, 3 vol., tome 3. Commentaires, coll. « Unam Sanctam », Paris, Le Cerf, 1966, p. 769.

[12] Martin Pinet, La notion de munus au concile Vatican II et après, p. 459.

[13] Alfonso Maria Stickler, « La bipartición de la potestad eclesiástica en su perspectiva histórica », p. 71.

3.10.2022
 

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