« Toute personne est une histoire sacrée »

Paris Notre-Dame, 1994

On ne présente plus Jean Vanier, fondateur des communautés de l’Arche où des hommes et des femmes partagent la vie de personnes qui présentent un handicap mental. Toute personne est une histoire sacrée (1), est un ouvrage à la fois biographique et systématique, car Jean Vanier n’a jamais séparé sa vie de son enseignement. Il veut livrer ici, dans un langage accessible à tout homme de bonne volonté et pas seulement au croyant, l’essentiel de ce que son expérience de trente ans lui a fait connaître de l’homme.

Jean Vanier considère d’abord l’homme blessé. La blessure de l’homme se manifeste avant tout par « les murs » qu’il construit (chap. 1) : murs physiques qui séparent les hommes, murs entre les faibles et les forts, murs entre personnes différentes ; mais aussi et d’abord murs intérieurs que nous avons édifiés par peur et par confiance mise en une prétendue supériorité. Mais quelle est la cause de ces blessures (chap. 2) ? Jean Vanier a appris du père Thomas Philippe que l’homme est avant tout un être de communion. Or, l’enfant fait cette expérience dans l’amour de ses parents. Mais, très tôt, il découvre que la communion est dangereuse et peut amener la mort, la culpabilité : c’est évident lorsque les parents sont absents ou violents, mais cela vaut autant lorsque l’amour des parents est trop possessif et étouffant. Cette ambivalence est, pour l’auteur, la source de toute blessure : ce que l’enfant « désirait le plus, la communion, devient ce qu’il y a de plus dangereux » (p. 75). Cette communion brisée devient la cause de tous nos murs qui la cachent et font oublier la souffrance et notre pauvreté.

Comment en guérir ? Jean Vanier va d’abord longuement expliquer ce qu’est la personne : avec un regard très positif, il décrit les étapes de sa croissance, l’enfance, l’adolescence, l’adulte et la vieillesse (chap. 3) ; puis, sans aucun dogmatisme, il énonce ce qu’on pourrait appeler les lois psychologiques structurant la personne, dans un capital chapitre d’anthropologie fondamentale (chap. 4) ; enfin, il resitue la personne dans son milieu humain, indispensable médiation entre l’individu et la société, car il est le lieu où elle découvre la communion et trouve donc son plein épanouissement (chap. 5).

Il est désormais possible d’évoquer le chemin de guérison qui est chemin de paix (chap. 6) ; mais la paix entre les personnes n’est possible que si la personne acccepte de faire la paix à l’intérieur d’elle-même, ce qui passe par trois moyens privilégiés : rechercher l’intériorisation, accepter d’être guéri par le faible, accueillir l’ennemi.

Pascal Ide

(1) Jean Vanier, Toute personne est une histoire sacrée, Paris, Plon, 1994.

11.5.2019
 

Les commentaires sont fermés.