La vertu théologale de foi

« La foi est l’acte fondamental de l’existence chrétienne [1] ».

 

La foi est propre aux religions monothéistes. Dans le bouddhisme, par exemple, l’acte par excellence est le retour en soi : l’adepte ne doit pas sortir de lui, mais peu à peu se délivrer du poids de son individualité. En regard, le chrétien sort de lui pour se remettre entre les mains de plus grand que lui. C’est ainsi que, fondée sur la foi, la prière chrétienne est une rencontre. Mais en quoi consiste cette foi ?

Par certains côtés, la pratique chrétienne fait que nous savons beaucoup de choses sur la foi ; par d’autres, il se pose un certain nombre de questions, voire d’objections qu’il n’est peut-être pas si aisé d’affronter. Ce n’est pas le lieu de faire un cours complet sur la foi ; en revanche, il peut être utile de clarifier un certain nombre de points. Lisez les questions qui suivent et tentez d’y répondre. Les difficultés ici effleurées seront développées plus bas.

– Croire est bon pour l’enfant qui doit faire confiance. Mais une fois adulte, l’homme demande à savoir, à connaître par lui-même. Croire n’est-ce donc pas abdiquer son intelligence ? N’est-ce pas humilier l’homme ?

– L’attitude agnostique (littéralement : « absence de connaissance ») ne serait-elle pas la plus raisonnable ? Face à l’invisible, face au transcendant, l’homme ne peut trancher, ni dans un sens ni dans un autre. Le jugement le plus idoine est la suspension de tout jugement.

– La foi est-elle un don de Dieu ou un acte de l’homme ? Si elle ne vient que de Dieu, elle nie notre autonomie et nous fait violence ; si elle vient aussi de l’homme, la primauté divine est amoindrie et le salut perdu.

– La foi est-elle une vertu de toute la personne ou de l’intelligence ? Si, comme attitude d’obéissance de tout l’être, elle concerne toute la personne, pourquoi avons-nous besoin d’autres vertus ? Si elle ne concerne que l’intelligence, pourquoi s’accompagne-t-elle aussi d’une décision de la volonté, d’une remise de tout son être ?

– La foi se fonde-t-elle sur l’expérience ou sur l’autorité de Dieu ? Quand nous témoignons, nous attestons bien une expérience, ne serait-ce que celle de la rencontre du Christ dans l’effusion de l’Esprit. Pourtant, la foi se fonde sur l’autorité de la Parole de Dieu garantie par le Magistère.

– « Je crois, donc je doute cent fois par jour », disait l’historien Alain Decaux interrogé sur Radio Notre-Dame. La foi est-elle contraire au doute ou à la question ?

– La foi est-elle certaine ? D’un côté, la foi est inévidente, puisque nous croyons ce que nous ne voyons pas (cf He 11,1). De l’autre, l’inévidence est le contraire de la lumière. Comment être certain s’il manque l’évidence ?

1) La foi, indigne de l’homme ?

a) Problème

Dans l’un de ses tout premiers essais, André Malraux fait dialoguer, par lettres, un Européen, A. D., séjournant en Extrême-Orient et, Ling un Chinois voyageant en Europe, et, par delà, il compare les deux pensées, européenne et chinoise. Le Blanc rêve d’action, de maîtrise du réel ; le Jaune rêve de sérénité, d’unisson avec l’univers. Là se trouve le désespoir de l’Occidental.

 

« Pour détruire Dieu, écrit A. D. à la fin, et après l’avoir détruit, l’esprit européen a anéanti tout ce qui pouvait s’opposer à l’homme : parvenu au terme de ses efforts, comme Rancé devant le corps de sa maîtresse, il ne trouve que la mort. Avec son image enfin atteinte, il découvre qu’il ne peut plus se passionner pour elle. Et jamais il ne fit d’aussi inquiétante découverte [2] ».

 

Mais il ajoute qu’il connaît la « foi plus haute : celle que proposent toutes les croix des villages » ; il sait qu’elle est amour, et l’apaisement en elle ». Cependant, il refuse cette attitude de foi : « je ne m’abaisserai pas à lui demander l’apaisement auquel ma faiblesse m’appelle [3] ». Non sans concéder au nietzschéisme, le jeune écrivain et orientaliste de vingt-cinq ans, identifie donc la foi à la faiblesse. Ne disait-il pas ne jamais avoir pu prononcer la troisième demande du Notre Père : « Que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel » ?

Plus globalement, nous sommes faits pour la lumière ; or, la foi est enveloppé d’une ténèbre : je n’ai pas besoin de croire ce que je sais. Voilà pourquoi, pour l’homme des Lumières, la foi n’est plus une attitude digne de lui. Voilà pourquoi il est si difficile de croire aujourd’hui.

b) Réponse

Nous devons constater que, si savants que nous soyons, nous passons notre temps à faire confiance. Plus encore, la confiance est indispensable à la vie. Quel est celui d’entre nous qui est suffisamment savant pour connaître le fonctionnement exact du moteur à explosions, celui de chaque microprocesseur de son ordinateur portable, la composition chimique du médicament qu’il vient d’ingurgiter ? L’usage de la technique, des objets manufacturés m’oblige en permanence à faire confiance… Et il y va parfois de ma vie.

L’on dira que cette attitude de foi vaut pour la vie quotidienne. Mais elle est exclut du lieu même du savoir, de la connaissance par excellence qu’est la science. Est-ce si sûr ? De même, le plus grand chercheur doit faire confiance à ses collègues. Imaginez un physicien reprendre la mathématique et redémontrer toutes les propositions des Eléments d’Euclide… Sinon, il devrait repartir à zéro. C’est même en science que la part de la foi est la plus importante. Les articles scientifiques passent leur temps à citer les autres recherches des collègues. Voilà pourquoi, comme le remarque saint Thomas, l’incrédulité est contre nature [4].

Mais cela ne fait que reculer la question : la foi dont il est ici question équivaut tout de même à une ignorance. Il est tout de même préférable de savoir que de croire. En ce sens « le désir de passer, dans la mesure du possible, de la foi au savoir est juste et raisonnable, au moins [5] ».

Mais sur quoi se fonde ma confiance ? Sur l’autorité de celui qui parle. Mais encore ? Sur le fait qu’il voit ce qu’il dit. Par ailleurs, si le savoir n’est pas toujours accessible en lui-même, il l’est, indirectement, en ses effets. Et la foi se fonde sur cette efficacité. « La décision de foi a aussi une portée théologico-scientifique [6]», autrement dit, à la dimension proprement descendante, divine s’adjoint une dimension ascendante, humaine ; plus encore, la première cause la seconde.

Résumons les acquis de notre analyse sur la place de la foi dans la vie quotidienne et dans les sciences. Nous sommes en possession d’une phénoménologie de l’acte de croire :

– La foi est nécessaire, mais elle a moins de valeur que le savoir.

– La foi se fonde toujours sur quelqu’un qui sait et qui, justement, est digne de foi : ces personnes sont dites crédibles.

– La foi est faite pour la vision. La vue, pour l’Évangéliste Jean, est à la fois corporelle et spirituelle. Commentant la parole de Jésus à Philippe : « Qui m’a vu a vu le Père » (Jn 14,9), l’exégète Ignace de la Potterie remarque : « Cette ‘vue’ est essentiellement une vue corporelle de l’homme Jésus ? Mais elle est même temps un regard de foi ; la vue est devenue contemplation [7] ».

– La foi se vérifie expérimentalement par ses conséquences.

– La foi présente une véritable valeur existentielle, dans la vie quotidienne.

2) La tentation de l’agnostique

a) Problème

 

Un dessin de Piem montre le sculpteur Rodin expliquer à un visiteur comment son modèle a pris la pose du penseur : « Je lui ai simplement demandé : ‘Dieu, pour vous, c’est quoi ?’ Et tout de suite il a pris la pose [8] ».

 

Nous avons vu qu’il était déraisonnable de refuser de croire et de vouloir tout savoir. Mais n’est-il pas tout aussi raisonnable de croire ? N’est-ce pas un saut dans l’absurde ? En effet, l’humilité de la pensée face à l’inconnaissable n’est pas de la révoquer, de la décliner ; elle n’est pas non plus d’y adhérer. L’athéisme scientifique, nous le savons maintenant, est une prétention orgueilleuse et absurde. Mais la foi n’est-elle pas une mainmise sur le divin, outrepassant les capacités de l’homme, ou, au moins, un refuge, une lâcheté ? La véritable attitude, digne de la pensée critique est de suspendre son jugement : ce que l’on appelle l’agnosticisme. Voilà pourquoi, pour beaucoup, celui-ci est la seule attitude honnête. C’est ce chemin qu’a tracé le philosophe allemand Emmanuel Kant : bornons nos capacités. Sachons reconnaître nos limites, les bornes infranchissables de notre nature humaine. N’est-ce pas plus raisonnable ?

Ces réflexions toutes en équilibre sont-elles si sages qu’il paraît ?

b) Réponse

Mais attaquons-nous à la thèse même de l’agnosticisme pour en déceler la portée. La question est la suivante : l’agnosticisme apporte-t-il une réponse satisfaisante au désir de l’homme d’aujourd’hui ? Constitue-t-il une sagesse de vie consistante ? Son projet est-il réalisable ?

En réalité, l’agnostique oublie un élément essentiel. La vie d’une personne présente deux dimensions : spéculative et pratique. Sur le plan théorique, l’intelligence peut bien demeurer en suspens : Dieu existe-t-il ? Mais, au plan pratique, je suis obligé de choisir, sinon dans les mots, du moins dans les faits. En effet, la question de Dieu est une question éminemment pratique : elle engage la finalité et toutes les valeurs morales ; or, agir, c’est poursuivre une fin et se référer, mesurer son action à des valeurs. Donc, toute personne, agnostique ou non, vit soit en faisant comme si Dieu existait, soit en faisant comme si Dieu n’existait pas. Or, l’expérience montre que la plupart des agnostiques théoriques sont des athées pratiques ; ils se comportent comme si Dieu n’était pas, ce en quoi réside la définition même de l’athéisme.

Nous avons la confirmation de cette distinction à partir de l’expérience même du croyant : je peux professer une foi chrétienne et – malheureusement – me comporter comme un athée pratique. Cette schizoïdie est probablement l’un des grands drames de notre temps et aussi l’un des pires contre-témoignages que l’on puisse donner.

Concluons avec le cardinal Ratzinger :

 

« En tant que théorie, l’agnosticisme semble extrêmement brillant, mais il est par nature plus qu’une théorie : la pratique de la vie y est en cause. Et lorsque l’on essaie de le «pratiquer» dans ses véritables conséquences, il glisse entre les mains comme une bulle de savon ; il éclate, car on ne peut éluder le choix qu’il voudrait justement éviter. L’homme ne peut rester neutre devant la question de l’existence de Dieu. Il ne peut répondre que par oui ou par non, et en tirant dans chaque cas toutes les conséquences de ce choix jusque dans les plus petits détails de la vie [9] ».

 

Tirons-en une conséquence pratique pour notre foi. Celle-ci n’existe réellement qu’à être vécue : « La foi doit être une foi réelle, pratique, vivante. Croire en Dieu doit signifier vivre de telle manière que la vie ne pourrait être vécue si Dieu n’existait pas. Alors l’espoir terrestre en l’Évangile pourra devenir la force vivificatrice de l’histoire temporelle [10] ».

c) La tentation de l’utilitarisme

L’attitude agnostique se fonde aussi aujourd’hui sur une autre raison. Constatant ce désintérêt pour les questions fondamentales concernant le sens ultime, le jésuite Bernard Pottier propose le diagnostic suivant :

 

« L’homme rationnel contemporain est habitué à calculer la rentabilité de toute action. Il se fait ainsi un raisonnement de type qualité/prix – tâche à laquelle il est hautement exercé [11]. Trancher ces questions radicales sur l’existence de Dieu et la dignité ultime de l’homme exigerait beaucoup d’efforts et de prises de décision. Se convertir à quelque chose de plus élevé, se décider profondément pour l’homme et sa dignité, même si l’on en a parfois la noble intention, imposerait des remaniements de la vie tranquille, exigerait des renoncements déchirants. Tant qu’on n’y est pas forcé, on attend… c’est le meilleur calcul qualité/prix [12] ».

 

On peut systématiser le raisonnement de l’utilitariste de la manière suivante : l’homme contemporain est utilitariste, cherchant le meilleur rendement au moindre coût ; or, la foi paraît peu rentable et présente un coût, une énergie élevée : il faut payer trop cher pour un retour sur investissement qui ne semble pas évident ; donc, l’homme d’aujourd’hui ne peut accorder la moindre seconde d’attention à la foi et, plus généralement à toute question autre qu’immédiatement technoscientifique et utile. Notre contemporain n’est donc plus accessible au pari de Pascal.

La systématisation de l’argumentation montre où gît la difficulté : le primat accordé à l’intelligence mathématique et utilitariste (encore plus que le matérialisme qui n’en est au fond que la conséquence). En regard, d’autres époques, comme le Moyen Âge, et aujourd’hui d’autres civilisations, par exemple les religions traditionnelles africaines, ont développé et valorisé la raison supérieure, la sagesse. En effet, pour un médiéval, pour un Africain, le non-visible et le non-immédiat sont premiers.

3) La foi, don de Dieu ou acte de l’homme ?

a) Problèmes

Ci-dessus, nous posions deux questions auxquelles il nous faut maintenant répondre : la foi est-elle un don de Dieu ou un acte de l’homme ? La foi est-elle une vertu de toute la personne ou de l’intelligence ?

b) Première réponse : la foi, don et réponse

D’un côté, la foi est une grâce, un don. Voici ce qu’affirme le Catéchisme de l’Église catholique :

 

« Lorsque S. Pierre confesse que Jésus est le Christ, le Fils du Dieu vivant, Jésus lui déclare que cette révélation ne lui est pas venue ‘de la chair et du sang, mais de mon Père qui est dans les cieux’ (Mt 16,17 ; cf. Ga 1,15 ; Mt 11,25). La foi est un don de Dieu, une vertu surnaturelle infuse par Lui. « Pour prêter cette foi, l’homme a besoin de la grâce prévenante et aidante de Dieu, ainsi que des secours intérieurs du Saint-Esprit. Celui-ci touche le cœur et le tourne vers Dieu, ouvre les yeux de l’esprit et donne ‘à tous la douceur de consentir et de croire à la vérité’ » (Dei Verbum, n. 5) [13] ».

 

De l’autre, la foi est aussi une décision, précisément le consentement au don de Dieu, donc la réponse. Jeanne Bourin, la célèbre romancière médiéviste a perdu la foi jeune et l’a retrouvé à quarante ans :

 

« Ma mère avait la foi du charbonnier et mon père, lui, était athée. Il croyait que le socialisme et la science sauveraient le genre humain. À l’âge de seize ans, les idées de mon père me paraissaient intellectuellement plus séduisantes. J’ai alors abandonné toute pratique et même toute quête.

« Et puis, aux approches de mes quarante ans, j’ai fait des rêves tout à fait extraordinaires. L’un d’eux m’a beaucoup impressionnée. J’étais assise près d’un mort. Sa main, posée sur la mienne, était chaude, souple, vivante, tandis que mes doigts demeuraient froids et glacés. Il y avait là un étrange renversement. Moi, la vivante, j’avais perdu toute tiédeur alors que lui, le mort, dégageait une chaleur rayonnante. Je compris alors que la vie n’était que l’envers d’une réalité beaucoup plus intense, plus chaleureuse… Je me réveillai avec une certitude bouleversante : Dieu existait ».

 

Voilà pour le don. « Il attendait que je lui dise ‘oui’ ». Et voilà pour la réponse de la liberté dont le fruit est immédiat : « ‘Et voici que vous êtes quelqu’un tout à coup’, dit Claudel après sa conversion. Pour moi, ce fut cela [14] ».

c) Seconde réponse : la foi, acte de tout l’homme ou de l’intelligence ?

En fait, il faut tenir les deux. D’un côté, la foi est un acte de l’intelligence. En effet, celle-ci se caractérise comme faculté de la vérité ; or, par la foi, l’homme s’ouvre à la vérité de la Révélation divine. De l’autre, la foi engage tout l’homme, puisqu’elle ne va pas aussi sans une adhésion de la liberté. Voilà pourquoi les affirmations magistérielles prennent ces deux aspects en compte. Par exemple : « Par la foi l’homme soumet complètement son intelligence et sa volonté à Dieu. De tout son être l’homme donne son assentiment à Dieu révélateur (cf. DV, n. 5). L’Écriture Sainte appelle ‘obéissance de la foi’ cette réponse de l’homme au Dieu qui révèle (cf. Rm 1, 5 ; 16, 26) [15]». Articuler ces deux aspects relève de la théologie.

Une conséquence de cette double caractéristique de l’acte de foi est qu’elle « est le seul moyen prochain et proportionné pour l’union de l’âme à Dieu, car la ressemblance qu’il y a entre elle et Dieu est si grande qu’il n’y a pas d’autre différence qu’entre voir Dieu et croire en Dieu. Dieu est infini, elle nous le propose infini ; Dieu est Trinité en personnes et Unité en nature, et c’est ainsi que la foi nous le propose. Dieu est ténèbres pour notre entendement, la foi elle aussi est ténèbres et obscurité pour notre entendement. La foi est le seul moyen par lequel Dieu se manifeste à l’âme dans cette divine lumière qui surpasse tout entendement. Aussi plus une âme a de foi, plus elle est unie à Dieu [16] ».

d) La foi comme vertu

Enfin, la foi n’est pas seulement un acte mais un vertu. Or, toute vertu grandit par les actes (même si, dans le cas des vertus théologales qui sont infusées par Dieu, nos actes ne font que disposer à cette croissance car celle-ci vient de Dieu qui donne le surcroît de foi à la mesure de ces actes). Posons donc des petits actes de foi. Voici ce qu’affirme le Catéchisme :

 

« La foi est un don gratuit que Dieu fait à l’homme. Ce don inestimable, nous pouvons le perdre ; S. Paul en avertit Timothée : ‘Combats le bon combat, possédant foi et bonne conscience ; pour s’en être affranchis, certains ont fait naufrage dans la foi’ (1 Tm 1,18-19). Pour vivre, croître et persévérer jusqu’à la fin dans la foi nous devons la nourrir par la Parole de Dieu ; nous devons implorer le Seigneur de l’augmenter (cf. Mc 9,24 ; Lc 17,5 ; 22,32) ; elle doit ‘agir par la charité’ (Ga 5,6 ; cf. Jc 2,14-26), être portée par l’espérance (cf. Rm 15,13) et être enracinée dans la foi de l’Église [17] ».

4) La foi : sentiment, expérience ou saut hors du ressenti ?

a) Problèmes

Pour beaucoup de nos contemporains, la foi est un sentiment – que ce soit pour adhérer à cette affirmation ou pour la critiquer. Cette conception sentimentale de la foi remonte à Frédéric Schleiermacher qui, face à la menace que les Lumières représentaient pour la religion, a tenté de la sauver en affirmant : « Son essence n’est ni pensée, ni action, mais contemplation et sentiment […]. La pratique est de l’art, la spéculation, science ; la religion, sens et goût de l’infini [18] ». C’est aussi la conception mise en place par François-René de Chateaubriand dans son Génie du christianisme. Le xixe siècle leur a largement emboîté le pas. On perçoit encore aujourd’hui l’impact de cette opinion. Pour combien de personnes, la religion est de l’irrationnel et relève de la sphère des sentiments, aussi élevés que l’on veut, mais des sentiments ?

Or, si la réaction face au rationalisme du siècle précédent était légitime, le moyen et la mesure ne l’étaient pas. En effet, cette conception de la religion avalisait la dichotomie raison-sentiment en survalorisant celle-ci et en y plaçant la religion. Mais la paix naît de l’unité, de la réconciliation. Aussi la prétendue réconciliation voulue par Schleiermacher cache-t-elle en fait une division profonde de l’homme. La religion se résigne à perdre la raison, pour ne pas perdre l’existence. Or, la raison est la capacité de la vérité. C’est donc inéluctablement faire de la religion une opinion subjective. En perdant la raison, en refusant d’être non pas rationnelle, mais raisonnable, la foi perd sa crédibilité, donc son être et sa dignité. De plus, en étant corrélée à la gratification du ressenti, la religion ne risque-t-elle pas de devenir utilitaire ? En effet, si Dieu fait sentir sa présence, comment être assuré que je ne préfère pas ce ressenti à cette présence ? Et si je perds le sentiment de cette présence de Dieu, que devient ma foi ? Enfin, comment faire coexister l’expérience et la nuit de la foi dont le cardinal Henri de Lubac nous dit, après tant d’autres, qu’il l’a éprouvée ?

 

« Ma lumière n’est que nuit. Je ne puis même pas dire, par paradoxe, que c’est une nuit lumineuse. Son obscurité, néanmoins, discerne mieux que toute lumière. De toutes les lumières, qui ne lui seraient pas amies, de toutes les fausses lumières, elle m’écarte, en toute lumière. ‘Ô nuit qui me guide plus sûrement que la lumière de midi’ [19] ».

 

Pourtant, la religion ne nie pas le sentiment, puisqu’elle cherche la paix. D’ailleurs, la foi est rencontre du Dieu vivant et nous savons combien, le plus souvent, l’effusion de l’Esprit est une expérience à fort retentissement sensible.

b) Première réponse : la foi et le sentiment

La place du sentiment est la part de vérité présente dans l’opinion de Schleiermacher. Mais ce sentiment n’est pas le critère de la vérité ni de la raison d’être de la religion. « Aimer Dieu, c’est vouloir ce qu’Il veut […]. Ce n’est pas sentir qu’on L’aime », écrivait Charles de Foucauld le 24 août 1914 [20].

Dom Augustin Guillerand propose une heureux critère de discernement :

 

« Il faut bien distinguer entre le sentiment de Dieu et la possession de Dieu. Les âmes sont innombrables qui possèdent Dieu et qui ne jouissent pas de lui. La possession goûtée de Dieu est douce, mais elle n’est pas nécessaire. La vie est affaire de foi et de volonté. Croyons que Dieu nous aime et que, si nulle faute ne l’a mis à la porte de notre âme, il est là, il y vit, il s’y donne [21] ».

 

En expliquant l’accès de l’âme au second gradin du Pont (symbole du Christ), sainte Catherine de Sienne nous a laissé quelques pages très claires sur la place de la consolations dans la vie spirituelle. Jésus parle à la sainte tertiaire dominicaine, de l’âme qui est privée de consolations sensibles, ce qui fut le cas des Apôtres entre la Résurrection et la Pentecôte.

 

« Pour amener l’âme à la perfection […] je me retire d’elle, non par la grâce, mais par le sentiment. […] Pour faire sortir l’âme de son imperfection, je me retire d’elle, en la privant de la consolation qu’elle ressentait auparavant. Quand elle était dans l’état de péché mortel, elle s’était séparée de moi, et je l’avais privée de la grâce à cause de sa faute, parce qu’elle m’avait fermé la porte du désir. […] Mais elle a reconnu ce qu’elle était, elle a pris conscience de ses ténèbres, elle a ouvert sa fenêtre à la lumière et vomi sa souillure par une sainte confusion. Dès lors je suis retourné dans l’âme par ma grâce, et si je me retire aujourd’hui, ce n’est pas ma grâce que je lui enlève, mais la jouissance qu’elle en éprouvait ».

 

Pourquoi ? Le docteur de l’Église donne trois raisons :

 

  1. « Si je le fais, c’est pour l’exercer à me chercher Moi-même en toute vérité, pour l’éprouver à la lumière de la foi et lui apprendre la prudence. Si elle aime avec désintéressement, avec une foi vive, avec la haine d’elle-même, elle est en joie dans le moment même qu’elle souffre, parce qu’elle se juge indigne de la paix et du repos de l’esprit ».
  2. « Toute ma conduite envers elle [l’âme] est pour lui faire sentir que, si je me retire d’elle, elle ne doit pas cependant regarder en arrière, mais persévérer avec humilité dans ses exercices, et demeurer enfermée dans la connaissance d’elle-même et de moi, pour attendre avec une voi vive l’avènement du Saint-Esprit, c’est-à-dire moi-même qui suis le foyer même de la charité. Elle m’attend, non dans l’oisiveté, mais en prière continuelle […]. Pendant que l’intelligence se tient ainsi éveillée dans la connaissance d’elle-même et de moi, l’âme, par la disposition d’une bonne et sainte volonté, s’adonnera continuellement à l’oraison ».
  3. « Je me retire d’elle encore pour qu’elle voit et connaisse son péché. En se voyant en effet privée de la consolation, elle en éprouve une peine qui l’afflige, elle se sent faible, incertaine, prête au découragement, et cette expérience lui fait découvrir la racine de l’amour-propre spirituel qui est en elle. Ce lui est un moyen de se connaître, de s’élever au-dessus d’elle-même, de siéger au tribunal de sa conscience, pour ne pas laisser passer ce sentiment sans lui infliger réprimande et correction, en arrachant la racine de l’amour-propre avec le couteau de la haine, avec la haine de cet amour même, par amour de la vertu [22] ».

c) Seconde réponse : la foi et l’expérience

La foi chrétienne présente une double dimension, subjective et objective.

Du premier point de vue, elle est une expérience, une expérience que nous fait faire l’Esprit-Saint. « Personne ne peut dire : ‘Jésus est Seigneur, Jésus est Die’» si ce n’est dans l’Esprit-Saint » (1 Co 12,3). Cette affirmation de saint Paul rejoint ce que Jésus lui-même avait dit à Simon-Pierre le jour où celui-ci avait reconnu en Lui le Messie à Césarée de Philippe. « Ce ne sont ni la chair ni le sang qui t’ont permis de reconnaître en moi le Messie. Cela vient de mon Père » lui avait dit Jésus (Mt 16,17).

Il nous faut voir maintenant le deuxième aspect de la foi. Tout en étant une rencontre de Dieu absolument personnelle, la foi est également la faculté de repérer son passage à travers les signes qu’Il nous adresse. Car le Dieu auquel nous croyons est Celui qui s’est révélé dans l’Histoire à partir d’Abraham, qui s’est manifesté de façon privilégiée en Palestine sous Ponce Pilate, et qui continue à se manifester de façon très spéciale au milieu de son Église. Il est donc normal que le chrétien cherche dans l’Histoire des traces objectives de ce passage.

Reprenons ce qui fut dit plus haut à propos de l’analyse phénoménologique de l’acte de foi dans la vie courante ou chez le savant. Pour connaître, il nous faut passer par le témoignage d’autrui. Nous ne sommes pas seulement des aveugles tâtonnant dans l’obscurité. Il y a des personnes à qui il a été donné de voir. C’est ainsi que Jésus affirme : « Abraham a vu mon Jour et il a été dans la joie » (Jn 8,56).

Mais le Voyant par excellence qui est au cœur de notre foi, c’est bien entendu Jésus. « Dieu nul ne l’a jamais vu, mais le Fils unique, qui est dans le sein du Père, lui nous l’a révélé » (Jn 1,18). Plus encore, toute sa vie terrestre, Jésus a vu : il est essentiel que Jésus ait cheminé non pas dans la foi mais dans la vision.

En conséquence, dans son essence, la foi chrétienne est participation à la vision du Christ. Voilà qui nous rapproche singulièrement de lui. Je ne pourrais pas croire si Jésus ne savait pas.

Et je crois Jésus, car il est digne de foi. Et il est digne de foi, parce qu’il a été au bout de l’amour pour moi. Et qu’il en laisse des signes (notamment historiques) objectifs du passage de Dieu dans l’Histoire des hommes. La foi chrétienne est adhésion à une Personne qui est passée dans l’Histoire. Elle ne peut donc se dispenser, pour être solide, d’une étude critique, d’une étude historique de ce qui s’est passé sous Ponce Pilate.

Et, pour boucler avec le premier point, ces signes n’apparaissent dans toute leur valeur de signe qu’à ceux qui ont reçu « les yeux de la foi ». Il n’empêche que ces signes existent et que le chrétien peut et doit se les remémorer s’il veut rendre compte de sa foi à ses propres yeux et aux yeux de ses frères incroyants ou mal-croyants.

Dans la vie de saint Jean de la Croix, on raconte que ce dernier assiste, avec quelques Pères, à la mort d’un petit frère du nom de frère Albert. Frère Albert ferme les yeux un moment puis les rouvre en disant : « Ah, je l’ai vu, je l’ai vu. – Qu’avez-vous vu, frère Albert ? », demande saint Jean de la Croix. « L’Amour, l’Amour », lui est-il répondu. Et frère Albert meurt en le disant. Charles Journet commente : « Ce n’était pas encore la Vision, c’était la vision de la foi qui fait comme voir les choses crues [23] ».

5) La foi : évidence, certitude ou doute ?

a) Problèmes

Certains estiment que le doute constamment coexiste avec la foi : c’est une donnée de fait ; plus, c’est un signe de la véritable foi. Dans un très bref chapitre, intitulé « Touche à mon doute ! », l’ancien recteur de l’Université catholique de Louvain, Gabriel Ringlet, fait l’éloge de Thomas le douteur, Thomas qui ose poser la question que tout le monde se pose – sans oublier qu’il accepte aussi de croire, lorsqu’il a compris qu’il n’y a pas de preuve. Et de citer la réflexion du père Mourlon Bernaert : « Thomas est bien le jumeau de chaque chrétien, «le jumeau qui doute», notre double [24] ».

Inversement, certains croyants semblent déjà installés dans la tranquillité de la vision. Or, une telle attitude nie l’obscurité de la foi qui peut aller jusqu’à une épreuve insupportable. Avec grande lucidité, le pape Pie XII notait que la foi est difficile à cause de son éloignement du sensible, ce qui suscite le doute :

 

« Ce qui a trait à Dieu et qui concerne les relations qui existent entre Dieu et l’homme, sont des vérités qui dépassent absolument l’ordre des choses sensibles ; et lorsqu’elles doivent s’appliquer à la conduite de la vie et lui donner forme, elles exigent qu’on se donne et qu’on se renonce. L’esprit humain cependant, pour acquérir de semblables vérités, souffre difficulté du fait de l’impulsion des sens et de l’imagination, ainsi que des mauvais désirs nés du péché originel. De là vient que dans ces matières les hommes se persuadent facilement de la fausseté ou du moins du caractère douteux de ce dont ils ne veulent pas que cela soit vrai [25] ».

b) Première réponse : la foi certaine mais non évidente

La question n’est pas matière à opinion, elle n’est pas laissée à la libre discussion des théologiens. Le Magistère a en effet tranché :

 

« La foi est certaine, plus certaine que toute connaissance humaine, parce qu’elle se fonde sur la Parole même de Dieu, qui ne peut pas mentir. Certes, les vérités révélées peuvent paraître obscures à la raison et à l’expérience humaines, mais ‘la certitude que donne la lumière divine est plus grande que celle que donne la lumière de la raison naturelle’. ‘Dix mille difficultés ne font pas un seul doute’ [26] ».

 

Mais comment tenir les deux ensemble ? La foi est cette lumière « qui luit dans un lieu obscur » (2 P 1,19). La foi, disait Jean de la Croix, c’est minuit, alors que Dieu c’est midi. La foi est donc une certitude sans évidence, la certitude obscure en attente de la lumière suprême de midi. Avec les mots du génial Pascal :

 

« Il y a assez de clarté pour éclairer les élus et assez d’obscurité pour les humilier. Il y a assez d’obscurité pour aveugler les réprouvés et assez de clarté pour les condamner et les rendre inexcusables [27] ».

 

Il y a donc deux contrefaçons qui sont autant de réactions contre la foi :

– le refus du manque d’évidence : la modernité qui identifie la vérité à l’évidence ; ou le témoignage qui croit fonder sa foi sur une évidence, celle des signes.

– le refus de la certitude : « Je crois, mais je doute », pensant que le doute est consubstantiel à la foi.

 

Inversement, il faut tenir deux choses : la foi est certaine ; la foi n’est pas évidente.

D’un côté, la foi est certaine. On peut le dire d’une autre manière. En effet, nous avons vu que la foi est une vertu en quelque sorte régionale qui surnaturalise l’intelligence en l’ouvrant à la vérité divine, mais aussi qu’elle est une disposition plus globale qui surélève toute la personne. Or, la certitude est une qualité de l’intelligence : est certain un jugement qui adhère sans hésiter à une proposition, à une vérité. Mais l’on peut formuler de manière plus personnaliste, donc plus globale cette certitude comme une stabilité. Par lui-même, l’homme ne possède pas la stabilité ; son autonomie n’est que relative ; voilà pourquoi Dieu lui donne un socle. On peut le concevoir de deux manières : soit cette stabilité est extérieure, elle est une protection. En ce sens, les Psaumes appellent le Seigneur « rocher », « bouclier », « forteresse », « citadelle », « refuge » (cf. Ps 18,2-3 ; etc.). Soit cette stabilité est intérieure : Dieu fait participer l’homme à sa propre stabilité. Dès lors, celle-ci devient interne. Or, c’est la foi qui procure cette stabilité interne. En effet, la foi est l’origine des vertus car elle est un fondement stable. C’est ce qu’évoque la racine hébraïque du verbe croire : elle signifie « stabilité, fermeté, solidité ». Aussi, à la forme simple ‘aman, le verbe veut dire : « être stable, ferme, solide » et à la forme causative, « rendre stable, ferme, solide ». Par conséquent, « je crois » signifie : « je rends stable ». Donc, en donnant la foi, Dieu stabilise la personne croyante. Ainsi, le prophète Isaïe, lorsqu’il veut montrer au peuple d’Israël que son existence se fonde sur la foi en Dieu et pour y inciter, il écrit en jouant sur les deux formes, causative et simple, du verbe : « Si vous en croyez pas, vous ne vous maintiendrez pas » (Is 7,9). Littéralement : « Si vous ne vous rendez pas stables, vous ne serez pas stables ». Un autre texte dit de même : « Croyez en YHWH et vous vous maintiendrez » (2 Ch 20,20).

De l’autre, la foi est une certitude dans l’obscurité, autrement dit inévidentes, alors que les certitudes dans l’ordre rationnel opèrent dans la lumière de l’évidence. Laissons Monsieur de Sales nous exprimer avec son langage inimitable cette paradoxale présence de certitude dans l’obscurité : « Quand Dieu nous donne la foi, il entre en notre âme et parle à notre esprit, non point par manière de discours, mais par manière d’inspiration, proposant si agréablement ce qu’il faut croire à l’entendement, que la volonté en reçoit une grande complaisance et telle qu’elle incite l’entendement à consentir et acquiescer à la vérité sans doute ni défiance quelconque ; voici la merveille, car Dieu fait la proposition des mystères de la foi en telle sorte que nous ne voyons pas les vérités mais seulement les entrevoyons, comme il arrive quelquefois que la terre étant couverte de brouillard, nous ne pouvons pas voir le soleil, mais voyons seulement un peu plus de clarté du côté où il est. Et néanmoins cette obscure clarté de la foi étant entrée dans notre esprit non par force de discours ni d’argument, mais par la seule suavité de sa présence, elle se fait croire et obéir à l’entendement avec tant d’autorité, que la certitude qu’elle nous donne de la vérité surmonte toutes les autres certitudes du monde et assujettit tellement tout l’esprit et tous les discours d’y celui, qu’ils n’ont point de crédit en comparaison. O mon Dieu, la foi, pourrais-je bien dire, est la grande amie de notre esprit : elle peut bien parler aux sciences humaines [pas au sens actuel !] qui se vantent d’être plus évidentes et claires qu’elle, comme l’Épouse parlait aux autres bergères : «Je suis noire, mais je suis belle.» Oh ! discours humains, oh ! sciences acquises ! je suis noire car je suis entre les obscurités des simples révélations qui sont sans aucune évidence apparente et me font paraître noire, me rendant presque méconnaissable ; mais pourtant je suis belle en moi-même à cause de mon infinie certitude, et si les yeux des mortels me pouvaient voir telle que je suis par nature, ils me trouveraient toute belle [28] ».

Un signe subjectif, vécu de cette dualité certitude et non-évidence est l’absence de repos (quies, en latin) ou irréquiétude (j’ajoute : l’absence de repos dans l’absence de trouble, c’est-à-dire dans la paix). Lisons la belle explication qu’en donne le théologien fribourgeois Charles Journet :

 

« La foi ne nous apporte pas une certitude d’évidence. Bien sûr que non : elle brille dans la nuit. Aussi ne va-t-elle pas empêcher ce que saint Augustin appellera l’irrequietudo. Ce mot, il ne faudrait pas le traduire par inquiétude, ce qui risquerait de cause un terrible malentendu ; il signifie un non-repos. C’est Dieu que je crois, et tout ce qu’il me dira je le crois avec la même certitude avec laquelle je crois Lui. […] Cette certitude n’exclut pas l’irréquiétude : je voudrais tellement voir ces choses-là et je ne les vois pas… J’en suis sûr, mais c’est dans la nuit… Il y a comme un ardent désir de déboucher un jour dans la lumière. […] ‘Lorsque sa gloire apparaîtra, tous nos désirs seront satisfaits’ (Ps 16,15) A ce moment-là seulement. Ainsi, vous le voyez, la foi, en même temps qu’elle est une certitude, comporte toujours une inquisition, une recherche. Mais attention ! Pas la recherche de l’homme qui se trouve en montagne, de nuit, à un carrefour : il s’agit de reconnaître le vrai sentier, on cherche… Est-ce qu’on va pouvoir en sortir ? Cela, c’est l’incertitude, l’angoisse. La recherche dont je vous parle, c’est : ‘Voilà le vrai sentier ; est-ce que nous arriverons pour le lever du soleil ?’ Oui, en se dépêchant… A ce moment-là on cherche encore, mais c’est tout autre chose. Donc une irréquiétude, mais pas une incertitude [29] ».

 

La vie chrétienne est donc une alternance non pas de doute et de foi, mais de lumières consolatrices et de ténèbres désolantes.

Une conséquence de cette certitude sans évidence est qu’elle rend plus difficile l’attention. Voilà pourquoi il est singulièrement requis de fixer celle-ci durant la prière.

c) Seconde réponse : la foi sans doute mais non sans question

Dans un autre dessin de Piem, on voit des moines jouer à un jeu de l’oie christianisé dont chaque case représente un objet religieux. L’un d’eux pioche une carte et lit : « Vous doutez : reculez de trois cases [30] ».

 

Il est bon de préciser un second point, effleuré ci-dessus avec la citation de Newman : la foi va sans doute mais non sans question. D’une part, la foi ne doute pas. En effet, la foi est adhésion ferme à la Révélation, alors que le doute opine, hésite. Lisons ce témoignage sur le père de Jean Vanier : « Ceux qui eurent le privilège de connaître intimement Georges Vanier découvrirent rapidement la place que Dieu occupe dans la vie d’un vrai croyant. Le doute n’effleura jamais son âme et la foi diamantine qui guidait toute sa vie fut le mobile de ses actions [31] ».

D’autre part, la foi interroge, car elle est en quête de lumière. Ainsi que nous le disions plus haut, la foi n’accepte d’adhérer dans l’obscurité sans pour autant renoncer à plus de lumière, dès cette vie, en attente de la lumière définitive de la vision. L’exemple emblématique en est la différence d’attitude de Zacharie et de Marie. À tous deux, l’ange Gabriel apparaît et offre, de la part de Dieu, un message incroyable d’un contenu relativement similaire : la conception et la naissance d’un enfant chez une femme âgée et réputée stérile, la conception et la naissance d’un enfant chez une femme vierge. Tous deux interrogent : « Qu’est-ce qui m’en assurera ? », demande Zacharie, reprenant les mots d’Abraham (Gn 15,8). « Comment cela se fera-t-il, puisque je ne connais pas d’homme ? » (Lc 1,34). Pour autant, la question du premier naît d’un doute, alors que l’interrogation de la seconde naît de la foi. La preuve est que le premier sera puni par l’ange et deviendra muet, alors que la seconde sera au contraire « bienheureuse » (v. 45 et 48) et louée pour sa foi par « toutes les générations » (v. 48). Une seconde preuve est que Zacharie demande un signe, alors que Marie n’en demande pas mais en reçoit un, a posteriori, par surcroît : « Voici qu’Elisabeth, ta parente, vient, elle aussi, de concevoir un fils en sa vieillesse » (v. 36).

Cette histoire comporte trois enseignements :

– La foi peut non seulement coexister avec la question mais même grandir grâce à celle-ci.

– La question est, par nature, ambivalente. Elle peut exprimer autant la foi que le doute.

– Le critère permettant d’opérer la différence est : non pas les signes, puisque Zacharie en a reçu un (d’ailleurs pour sa honte) ; mais d’abord l’attitude intérieure, d’adhésion confiante (dont on a vu qu’elle se caractérise par la stabilité et, ici, par le bonheur : « Bienheureuse celle qui a cru ») ou au contraire de défiance (qui ne s’accompagne jamais de paix et de joie) ; puis les fruits : la reconnaissance de l’attitude de Marie par les « générations », le témoignage de la louange d’autrui.

L’analogie avec l’amour humain peut éclairer. D’une part, l’on sait combien l’affection entre des époux ou entre des amis ne peut coexister avec la défiance, mais requiert la stabilité de la confiance. Mais d’autre part, l’amour et l’amitié suppose aussi un intérêt pour l’autre et s’accompagne donc d’un désir de toujours mieux le connaître. Par conséquent, dans la relation interpersonnelle, la question peut venir soit du doute, ce qui mine toujours cette relation (le psychanalyste jésuite Denis Vasse remarquait que la volonté de savoir, qui pousse à questionner, caractérise le jaloux : celui-ci veut savoir, alors qu’il ne peut que croire), soit de l’intérêt (ce qui n’est pas la curiosité), et la relation en sort grandie.

Enfin, ce questionnement dans la foi caractérise en propre la théologie. Celle-ci se définit, à la suite d’une parole fameuse de saint Anselme, comme « fides quaerens intellectum », « foi en quête d’intelligence ». La Somme de théologie de saint Thomas d’Aquin est composé de 2669 questions (ou plutôt articles se présentant tous sous la forme : « Est-ce que ? »), dont l’une des toutes premières est : « Est-ce que Dieu existe ? » Or, bien évidemment, le Docteur angélique ne doute pas, mais, dans la lumière de la foi, affronte très sérieusement les objections que l’athéisme peut poser à l’affirmation de l’existence de Dieu, tentant de rendre compte de la pensée adverse le plus sereinement et révérencieusement possible.

Là encore, donnons un équivalent plus personnaliste et global de l’attitude plus régionalisée et intellectuelle de doute : la quête. La foi aimante se caractérise non seulement par la possession mais aussi par la recherche de celui auquel nous croyons. Jésus aime qu’on le cherche, dans la foi. Comme la fiancée du Cantique des Cantiques cherche son Bien-aimé : « Dites-moi où on l’a mis ».

6) Parcours biblique

Un bel exemple est donné par Naaman le syrien (2 R 5).

7) Illustration cinématographique

Contact, science-fiction américain de Robert Zemeckis, 1997. Inspiré du roman éponyme de Carl Sagan, 1985. Avec Jodie Foster, Matthew McConaughey, John Hurt.

La scène (37) se déroule du début : 2 h. 2 mn. 35 sec. à 2 h. 12 mn. 25 sec.

 

Certains font du film de Zemeckis le plus grand film de science-fiction depuis Rencontre du troisième type. D’autres, en revanche, lui reprochent son manque de mystère : quittant l’utopie pour sa réalisation, finalement il « s’embourbe[r] illico dans le plus rabâché des débats sur […] le conflit science-religion [32] ». Pour ma part, sans l’idéaliser, je trouve que ce film présente une bien intéressante réflexion sur les relations entre le savoir, la foi et la crédulité.

a) Résumé de l’histoire

Ann Harroway (Jodie Foster), orpheline de père et de mère, Palmer Joss (Matthew McConaughey) professeur David Drumlin (Tom Skerritt)

Le professeur Eleonore Ann Harroway (Jodie Foster) est une sommité dans son domaine de compétence : l’astrophysique, en particulier le SETI (la recherche d’intelligence extraterrestre). Pourtant, elle est aussi considérée comme « tenace » et « enquiquineuse ». Elle est incapable d’entrer en… contact avec l’autre. Cette attitude sauvage et solitaire s’explique parce qu’Ellie est orpheline d’abord de mère, puis de son père Théodore, disparu d’un accident cardiaque alors qu’elle avait neuf ans. À ce manque se joint une culpabilité : « J’aurais dû lui apporter ses médicaments ».

La mort de sa mère avait déjà décidé de ses goûts et de ses futures orientations scientifiques qui sont autant de protections : « Papa, tu crois qu’on pourrait parler à maman ? » Mais Ellie n’a pas retenu la leçon : « Même la radio la plus puissante ne le pourrait pas ». Alors, la quête va se redoubler avec la disparition du père : « Ici, Éléonore, Papa, réponds ». L’appel tourné vers le cosmos, mais adressé à plus loin, à ses parents, se transformera en un appel adressé au cosmos, à l’impossible visite des extraterrestres, avec une énergie tenace qui n’a d’égale que la profondeur de sa déréliction et de son isolement.

b) Point de départ : l’incroyance

Ce monde de la solitude et de la méfiance est aussi celui de la froide raison raisonnante. Lorsque Palmer explique, avec simplicité, la raison de ses études de théologie et le pourquoi de sa foi (peu orthodoxe, plutôt Nouvel Age) en Dieu : « C’était Dieu », Ellie fait appel à l’explication réductionniste et scientiste la plus classique : « C’est vrai, car tu en as besoin ». Lorsqu’elle est interrogée par le même pasteur : « Croyez-vous en Dieu ? », Ellie répond : « En tant que scientifique, je me fie à des preuves. Il n’y en a pas ».

Car il y a un mauvais usage de la passivité (et la foi est une certaine passivité, une réception d’un donné) qu’Ellie va rencontrer de plein fouet. Le professeur David Drumlin reconnaît l’injustice, mais en voulant passer pour un martyre de l’incontrôlable. Nullement dupe de cette déresponsabilisation manipulatrice, Ellie rétorque en rappelant l’inaliénabilité de l’autonomie responsable : « J’ai toujours pensé que le monde était ce qu’on en faisait ».

Plus encore, au moins à deux reprises, Ellie rencontre une foi qui est une abdication de l’intelligence : au catéchisme, lorsqu’elle pose des questions sensées ; à la mort de son père, lorsque le pasteur cherche vainement à la consoler : « Nous ne savons pas pourquoi. Il faut parfois seulement accepter les faits selon la volonté de Dieu ». On imagine, au vu de son évolution ultérieure, ce que cette phrase a pu engendrer de révolte en elle. Ellie n’aura plus confiance qu’en ses oreilles, surtout lorsqu’elles sont démultipliées par douze ou vingt-six radars ultra-performants pointés vers l’espace.

Il y a quelque chose de Simone Weil dans ce tempérament radical autant que blessé.

c) L’évolution

Elle va finalement réussir à capter un signal SETI. Puis, avec l’aide d’un mystérieux milliardaire, S. R. Hadden qui vit dans un avion afin de ne pas mourir et pilote la vie d’Ellie depuis la naissance. Or, avec ce signal, elle découvre un code prodigieusement complexe et évolué qui permet de construire une machine excessivement chère (500 milliards d’euros). Grâce à elle, elle va entrer en relation avec un peuple situé à 26 années lumière, les Végans. Or, l’expérience qu’elle va faire n’a laissé aucune trace dans les enregistreurs.

d) Point d’arrivée : une ouverture à la foi

Ellie va enfin quitter son arrogance, sa totale maîtrise intellectuelle. Elle va faire l’épreuve, au double sens du terme, d’un au-delà du discours, et cela face à la raison en sa forme la plus violente, l’Esprit objectif, l’institution. Elle va subir dans sa chair ce qu’elle a fait subir pendant tant d’années.

À vrai dire, plusieurs expériences se conjugueront pour la conduire de la vérité-évidence de la science à la vérité-mystère à laquelle ouvre la foi. Plusieurs traits disent ici la vertu de foi :

La démarche de foi naît de la reconnaissance d’un mystère non maîtrisable, d’un donné. Or, Ellie dit : Plus encore, si en avance Véga soit-elle au plan technoscientifique, cette civilisation n’est pas la source ultime du savoir : le chemin (les vortex successifs [33]) a été construit par d’autres. Les Végans se sont reçus d’autre qu’eux.

– La foi comme vertu, donc comme attitude personnelle

L’expérience de la foi est personnelle, elle engage ; elle est aussi incommunicable, elle isole.

– La foi comme un don

Une formule l’exprime : « Il m’a été donné quelque chose de nouveau ».

– L’objet de la foi dépasse la raison

La démarche de foi naît de la reconnaissance d’un mystère non maîtrisable, d’un donné. « Comment l’expliquez-vous ? – Je ne le peux pas ».

Décisive sera surtout l’épreuve de l’impuissance des mots et du langage rationnel, le seul qu’elle ait appris à dominer : « C’est un événement céleste, commente-t-elle, arrivée sur Véga. Ils auraient dû envoyer un poète. C’est tellement beau… » Aveu d’impuissance verbale qui traduit une impuissance beaucoup plus décisive : « Je n’en avais pas la moindre idée ».

– L’objet de la foi est l’amour

La foi a pour objet l’amour. Or, tel est le message des Végans : « Aucun de nous n’est seul ».

– Le dépassement des capacités rationnelles et sensibles

Jamais les extraterrestres ne nous sont présentés. Certains ont reproché au film de ne pas rester dans la réserve de Rencontre du troisième type ; mais ils sont passés à côté du sens, tout autre, de Contact. Je ne parle pas seulement de la rencontre finale sur Véga dont on a vu que son secret présente un sens profond. Je veux parler de tout le film : le Terrien n’a jamais accès à un Végan, mais à sa communication. Celui-ci ne se donne à voir et à contempler qu’à travers des signes.

– Le fondement dans une expérience

Face à tous ces arguments qu’elle ne connaît que trop, Ellie, soudain très pauvre, ne peut qu’opposer son expérience : « Je ne retire pas ce témoignage ».

– Une condition : l’humilité

Or, lorsqu’elle est interrogée dix-huit mois plus tard, Ellie répond humblement : « La meilleure réponse est toujours de chercher ». D’ailleurs, le départ pour Véga n’a rien du départ spectaculaire mais au total violent par lequel une fusée s’arrache à la pesanteur terrestre.

En effet, l’humilité consiste à accepter de dépendre. Or, Ellie rentre progressivement dans la dépendance. Pour être sauvée de sa fermeture scientiste, elle a eu besoin des multiples médiations : il a fallu que Palmer lui pardonne et la comprenne, que Kent l’aime et la suive fidèlement, que Rachel Constantine (du gouvernement) la croit.

– Le contraire de la foi

La foi est confirmée par son contraire. Ellie s’entend rétorquer par le président Clinton lui-même l’argument qu’elle a toujours avancé : « Tenir compte des seuls faits ». Ellie a droit à tout le cortège des arguments scientistes : « L’explication la plus simple est la meilleure », sans oublier la réduction psychologisante puisqu’elle est suspectée d’hallucinations d’auto-soutien.

– La « contagion » de la foi ou le témoignage missionnaire

La foi est par nature missionnaire. La raison en est profonde : au don reçu répond au don offert ; or, la foi est un don, le plus grand de tous, celui de la vie divine. Le prosélytisme, au sens respectueux, est un signe de la vertu théologale de la foi.

Or, Ellie avoue : « Aucun de nous n’est seul. Je souhaite partager cela. Sentir cette béatitude, cette humilité, cet espoir. Cela continue à être mon souhait ».

De fait, son témoignage exerce une véritable influence. Certes, la foule. Cette dramatique opposition entre le monde scientiste de l’isolement et le monde de la foi et de l’ouverture à l’irruption à l’autre, au Tout-Autre, devient celle des technocrates et de la foule qui l’accueille avec enthousiasme et l’appelle par son prénom, symbolique du contraste entre le confinement du tribunal et de l’ouverture infinie du dehors. Il demeure que le contraste ne vaut que lorsqu’on oublie combien le comportement de la foule est infantile et versatile. Plus important est le témoignage de Palmer : « Quelle est votre opinion, lui demande-t-on à propos d’Ellie ? – Nous avons le même but : la recherche de la vérité. Alors moi, je la crois ». Il s’agit en effet désormais de foi.

– Quelle conception de la foi ?

La conception de la foi comme paradoxe et saut dans la foi, comme appropriation subjective et incommunicable, est peut-être plus inspirée du penseur danois protestant Kierkegaard que catholique. Elle n’en demeure pas moins juste et profonde.

8) Bibliographie sélective

a) Sources bibliques

– Jean-Noël Aletti, « L’acte de croire pour l’apôtre Paul », RSR, 77 (1989), p. 233-250.

– Jean-Marie Faux, La foi du Nouveau Testament, Bruxelles, IET, 1977.

– Stanislas Lyonnet, Foi et salut selon Saint Paul, Rome, Institut biblique pontifical, 1970.

– Pierre Michalon, « La foi, rencontre de Dieu et engagement envers Dieu selon l’Ancien Testament », NRTh, 85 (1953), p. 587-600.

– Ceslas Spicq, « Foi et fidélité », Théologie morale du Nouveau Testament, Paris, Gabalda, 2 vol., 1er vol., 1965.

b) Sources magistérielles

– Pape François, Lettre encyclique Lumen fidei sur la foi, 29 juin 2013.

– Henri de Lubac, La foi chrétienne. Essai sur la structure du Symbole des Apôtres, Paris, Aubier, 1969, réédité dans Œuvres complètes, Paris, Le Cerf, tome 5, 2008.

c) Sources traditionnelles

– S. Thomas d’Aquin, Somme de Théologie, IIa-IIæ, q. 1-16.

d) Manuels et monographies

– Michel Labourdette, Cours de théologie morale. 8. La foi, IIa-IIæ, q. 1-16, Toulouse, 1959-1960.

– Michel Labourdette, La foi. « Grand cours » de théologie morale, t. 8, coll. « Bibliothèque de la revue Thomiste », Paris, Parole et Silence, 2015.

– Cardinal Charles Journet, Dieu à la rencontre de l’homme. La voie théologale, Paris, DDB, Fribourg (Suisse), Saint-Paul, 1981.

– Joseph Ratzinger, Regarder le Christ. Exercices de foi, d’espérance et d’amour, trad. Bruno Guillaume, Paris, Fayard, 1992.

Pascal Ide

[1] Cardinal Joseph Ratzinger, Regarder le Christ. Exercices de foi, d’espérance et d’amour, trad. Bruno Guillaume, Paris, Fayard, 1992, p. 13.

[2] André Malraux, La tentation de l’Occident, coll. « Le livre de poche », Paris, Grasset, 1926, p. 158-159.

[3] Ibid., p. 159.

[4] Cf. Somme de théologie, IIa-IIae, q. 10, a. 10, ad 1um.

[5] Joseph Ratzinger, Regarder le Christ, p. 15.

[6] Heinrich Schlier, « Qui est Jésus ? », Neues Testament und Kirche. Für Rudolf Schnackenburg, Hrssgb von J. Gnilka, Freiburg-in-Brisgau, Herder, 1974, p. 364.

[7] La vérité dans saint Jean, Rome, Institut Biblique, 1977, 2 volumes, tome 1, p. 76-77.

[8] Piem, Dieu et vous, coll. « La Bibliothèque du dessinateur », Paris, Le Cherche midi éditeur, 1996, chap. 4, sans page.

[9] Joseph Ratzinger, Regarder le Christ, p. 22.

[10] Jacques Maritain, La signification de l’athéisme contemporain, coll. « Courrier des Îles », Paris, DDB, 1949, p. 42.

[11] L’auteur développe cette idée dans le paragraphe suivant : « L’homme contemporain est en effet accoutumé à ces calculs économiques de probabilité et de rentabilité. Il a développé de manière stupéfiante son intelligence calculatrice et il travaille constamment à maximiser le profit immédiat » (p. 11).

[12] Bernard Pottier, « L’agnosticisme, choix évident pour l’homme contemporain », NRT, 129 (janvier-mars 2007), p. 4-16, ici p. 11. Souligné dans le texte.

[13] Catéchisme de l’Église catholique, 8 décembre 1992, n. 153.

[14] Vermeil. Inventer l’espérance, n° 173, février 1977, p. 6.

[15] Catéchisme de l’Église catholique, n. 143.

[16] Saint Jean de la Croix, La Montée du Carmel, in Œuvres spirituelles, trad. Grégoire de Saint-Joseph, Paris, Seuil, 1947, L. II, chap. 8, p. 132.

[17] Catéchisme de l’Église catholique, n. 162.

[18] Friedrich Schleiermacher, über die Religion. Reden an die Gebildeten unter ihren Verächtern, Berlin, 1799, Ed. H. J. Rothert, Hambourg, Felix Meiner, 1958, p. 29.

[19] Henri de Lubac, Paradoxes, suivi de Nouveaux paradoxes, Paris, Seuil, 1959, p. 169.

[20] Cité par Jean-François Six, in Maurice Serpette, Foucauld au désert, Préface de Théodore Monod et Postface de Jean-François Six, Paris, DDB, 1997, p. 251.

[21] Dom Augustin Guillerand, Silence cartusien, Correrie de la Grande Chartreuse, 1961, p. 88. C’est moi qui souligne.

[22] Sainte Catherine de Sienne, Le dialogue, chap. 63 en numérotation continue, trad. J. Hurtaud, Paris, Téqui, 1976, p. 210-213.

[23] Cardinal Charles Journet, Dieu à la rencontre de l’homme, p. 94-95.

[24] Éloge de la fragilité. L’actualité à fleur d’Évangile, Paris, Louvain-La-Neuve, 1990, p. 151 et 152.

[25] Pie XII, Encyclique Humani generis, 12 août 1950, Dz. 3875.

[26] Catéchisme de l’Église catholique, n. 157. Cite d’abord S. Thomas d’Aquin (Somme de théologie, IIa-IIæ, q. 171, 5, obj. 3), puis le cardinal John Henry Newman (Apologia pro vita sua).

[27] Blaise Pascal, Pensées, n° 582, in Œuvres complètes, éd. Jacques Chevalier, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », Paris, Gallimard, 1954, p. 1273. L’on peut aussi faire appel au sens de l’ouïe pour conjuguer les deux pôles de la foi. À l’objection de celui qui dit que Dieu est lointain, saint Augustin répondait invariablement : « Ad me aures, ad illum ! », « A moi vos oreilles, à Lui votre cœur » (In Jo Ev., I, 7, BA 71, p. 141-143).

[28] Saint François de Sales, Traité de l’amour de Dieu, L. II, chap. 14.

[29] Cardinal Charles Journet, Dieu à la rencontre de l’homme. La voie théologale, Paris, DDB, Fribourg (Suisse), Saint-Paul, 1981, p. 38.

[30] Piem, Dieu et vous, chap. 5, sans page.

[31] Cardinal Léger, Homélie à la messe de funérailles dans la Basilique d’Ottawa, le 8 mars 1967, cité par Jean Vanier, Ma faiblesse, c’est ma force. Un aperçu de la vie intérieure du général Georges P. Vanier gouverneur général du Canada de 1960 à 1967, coll. « Essais pour notre temps » n° 8, Montréal, Bellarmin, Paris, DDB, 1970, p. 36, note 1. Souligné dans le texte.

[32] Jean-Claude Loiseau, Télérama, n° 2488, 17 septembre 1997, p. 37. Ce jugement hâtif n’est pas argumenté.

[33] On sait que Zemeckis a demandé l’aide du scientifique américain réputé Carl Sagan et que celui-ci a pris part personnellement à la réalisation. Le film lui est dédié (la dernière image porte « Pour Carl »).

23.5.2020
 

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