Plaidoyer pour le courage (Dominique Lecourt)

Au terme de son livre-entretien sur le progrès, le philosophe des sciences Dominique Lecourt propose un plaidoyer pour le courage, « la plus cardinale des vertus ». Et, pour cela, il propose un triple discernement [1].

Le premier, historique, distingue le « sens moderne » du courage qui est « l’endurance face à l’adversité » du « sens antique » qui est la « capacité à dépasser la peur pour affronter de grands dangers », et lui préférer le second, car notre époque est avant tout habitée par la peur et affrontée à bien des incertitudes.

Le deuxième, anthropologique, est le paradoxe d’une vertu qui, d’un côté, « plonge ses racines plus profondément que tout autre vertu dans l’émotion » et, de l’autre, « sollicite aussi l’intellect plus que toute autre puisqu’il faut savoir discerner » et ainsi ne pas sombrer dans la témérité.

Le troisième, éthique, réside en un autre « paradoxe » ou je dirais plutôt tension : le courage est à la fois une « vertu ‘privée’ », celle « la force d’âme de l’individu », et « la vertu civique par excellence » (selon l’opinion d’Homère et Machiavel).

J’ajouterai une quatrième tension constitutive : entre l’éthique et l’ontologique, le courage modèle à la fois notre action et notre être. C’est ainsi que Paul Tillich parle d’un courage d’être. En effet, le courage naît singulièrement aux confins de la mort, mais aussi aux frontières de la nouveauté. Voire d’ordre métaphysique : à la lisière entre l’ancien et le nouveau.

Pascal Ide

[1] Dominique Lecourt, L’avenir du progrès. Entretiens avec Philippe Petit, coll. « Conversations pour demain », Paris, Textuel, 1997, p. 114-115.

21.11.2025
 

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