De la petitesse à la grandeur. L’exemple de sœur Elvira, fondatrice du Cenacolo

L’intention de cette fiche n’est nullement d’expliquer ce qu’est la belle mission de cette belle œuvre de Dieu qu’est la communauté du Cenacolo [1], ni même de résumer la vie de sœur Elvira, mais de rendre compte d’une des grandes lois spirituelles de l’amour-don à travers son exemple et témoignage [2].

Comment ne pas être frappé par ce qui, aux yeux du monde, est un contraste, voire un paradoxe, alors que, aux yeux de Dieu, c’est une loi intime de l’amour : la petitesse (la pauvreté) de sœur Elivra et la grandeur de son œuvre (la Communauté du Cenacolo qu’elle a fondée est reconnue par le Saint-Siège, précisément le Conseil Pontifical pour les Laïcs, comme une Association privée internationale de Fidèles ; elle compte aujourd’hui 63 ou 64 maisons, présentes aujourd’hui en Europe, en Amérique et en Afrique) ? Encore faut-il ajouter, ce qui transforme la première dans la seconde : la charité et l’humilité, le tout dans un climat de foi et d’espérance. Et, à cette occasion, les intuitions vécues et transmises par sœur Elvira, confirment ou renouvellent les lois de l’amour.

Quelques anecdotes, mieux que des longues et lassantes analyses, disent tout.

1) Fécondité de la petitesse

L’introduction de la communauté raconte la conclusion du témoignage que sœur Elvira donne lors du Congrès mondial apostolique de la Divine Miséricorde, en avril 2008 à Rome : « Merci ! Je suis très contente d’avoir participé à ce… à ce… » Comme elle ne parvient pas à trouver le mot, l’un des intervenants lui suggère : « Congrès ! » « Sœur Elivra lui répondit : ‘Mais ce sont des mots que je ne dis jamais !’ Tous sourirent. Elle aussi. Elle ajouta ensuite : « Vous devez m’excuser, je suis une pauvre, une pauvre, mais pauvre… je ne voudrais pas dire ignorante… mais je suis une ‘cruche’ ! Mais je suis une ‘bécasse’, toujours contente, et je vis… je vis… je vis [3] !’ ». Faut-il commenter ? Loin d’être une apologie du misérabilisme, l’humble reconnaissance de la pauvreté ou petitesse s’accompagne de quatre signes : l’exigence de vérité (elle refuse de se dire « ignorante »), l’humour (« cruche », « bécasse »), la joie paisible (le sourire et l’aveu « toujours contente ») et la vitalité (la triple répétition « je vis »).

Deuxième témoignage. Le 16 octobre 2009, après 26 ans, le Décret de reconnaissance de la Communauté du Cenacolo est remis à sœur Elvira au Conseil pontifical pour les laïcs. À cette occasion, elle prononce un discours. Elle commence son discours au cardinal Rylko et aux évêques présents pour cette grande occasion. Elle dit tout son étonnement et son immense joie. Elle semble lire un discours écrit que, soudain, elle pose, continuant spontanément :

 

« Tout est arrivé sans que je m’en rende compte, je me suis plongée dans la miséricorde de Dieu, je me suis retroussé les manches pour aimer, aimer, aimer… et servir ! Maintenant, je vous demande pardon, mais je lis pas, savez-vous pourquoi ? Parce que je ne sais pas lire, eh oui, parce que quand je suis allée à l’école, je me suis arrêtée au CE2. J’avais sept frères et sœurs et souvent, je n’y allais même pas, c’est pour ça que je n’ai pas appris à lire. Je ne sais pas pourquoi le Seigneur m’a regardée, moi…, mais j’ai compris qu’il m’a regardée parce que déjà, étant petite, je devais servir tout le monde. Tout le monde avait des attentes et moi, je les ai tous servis. Et j’en suis heureuse ! Maintenant, le père Stefano va me prêter sa voix, son cœur, et c’est lui qui va continuer à lire ».

 

Et « tous ont souri, émus [4] ».

Voilà pourquoi, sans ce ressentiment qui justifie la critique nieztschéenne, sœur Elvira peut affirmer :

 

« Comme c’est beau la pauvreté ! La pauvreté n’est pas quelque chose de négatif ; la pauvreté est liberté ! Nous sommes au-dessus des choses, avant la richesse, avant les ambitions. Nous expérimentons ainsi que la vie vaut plus que les choses [5] ! »

2) La charité

Nous le disions : cette pauvreté a porté tant de fruits parce qu’elle est animée par la vie théologale de sœur Elvira, en particulier par le don divin de la charité. Je souhaiterais juste en souligner quelques traits, puissamment éclairés par l’exemple de la fondatrice du Cenacolo.

a) L’acte de la charité : le service

Sœur Elvira souligne l’acte par excellence qui incarne la charité : le service. Aimer l’autre, c’est le servir. En effet, saint Paul écrit : « La charité est serviable » (1 Co 13,4), ce que l’on peut traduire de manière plus concrète : « La charité rend service ». « Croire veut dire aimer. Aimer veut dire agir. Agir veut dire servir [6] ». Or, Rita qui, plus tard prendra le nom de religion Elivra, l’a appris très tôt (tout en semblant y avoir de grandes dispositions) en famille.

 

« Mon père Antonio aimait le vin ; ça me dérangeait et ça me faisait honte quand j’étais enfant, surtout quand il venait me chercher à ‘lécole un peu éméché, devant mes camardes de classe qui riaient de moi. […] Cependant, maintenant que je peux réfléchir à tout cela, je comprends que mon père, malgré tout, malgré ses fragilités, venait me chercher à l’école. En revanche, tant de papas n’y vont pas, ne vont jamais chercheur leurs enfants.

« Souvent, il n’hésitait pas non plus à me réveiller la nuit pour me dire : ‘Rita, va m’acheter des cigarettes !’ Et moi, je m’en souviens bien, je devais faire un bout de chemin dans l’obscurité et je courais en me pressant, en chantant, pour vaincre la peur : les branches nues des arbres dans la nuit ressemblait à de grands bras menaçants. Quand j’arrivais au bureau de tabac, je frappais à la grille et le monsieur se levait en soupirant, me donnait quelques cigarettes et oust, je repartais à la maison en courant, pour faire plaisir à mon père.

« Toute cette souffrance vécue en famille s’est transformée et illuminée quand j’ai rencontré Dieu. Et aujourd’hui, je veux dire que mon père a été l’université où j’ai appris à aimer à servir tout le monde avec dignité. Il a été le premier pauvre que j’ai dû accueillir, aimer et servir. […] Un père comme celui que j’ai eu à sûrement beaucoup souffert pendant son enfance […]. J’ai tellement aimé mon père, je l’ai tellement servi que c’est pour ça que je n’ai pas honte d’en parler. Quand tu aimes, tu n’as plus honte [7] ».

b) La consécration ou le cœur plus large

Sœur Elvira est si féconde, parce que sa charité est disponible. Or, cette disponibilité est le fruit de sa consécration religieuse : le cœur sans partage à Jésus peut alors se partager à tous ses frères et sœurs. Sœur Elvira témoigne de cet élargissement du cœur où l’introduit la vie d’épouse du Christ :

 

« Quand j’avais dix-sept ans, j’étais fiancée, je sortais avec un garçon qui m’amait bien, on ‘parlait’ d’amour, on ne ‘faisait’ pas l’amour à mon époque. Nous avions déjà programmé d’avoir beaucoup d’enfants… et puis… et puis il s’est passé quelque chose en moi. Un jour, j’ai commencé à me demander : ‘Toute la vie avec lui ? Seulement avec lui ? Seulement pour lui ? Non, je ne pourrai jamais. Ce n’est pas ma voie’. C’était un vêtement dans lequel je me sentais trop à l’étroit. Il y avait un autre époux qui frappaità la porte de mon cœur, qui le faisait grandir. C’était Jésus, le fils du menuisier de Nazareth, charpentier de profession lui aussi, qui allait faire de moi son heureuse épouse [8] ».

 

En même temps que l’appel divin, Sœur Elvira montre que l’amour qu’elle porte en elle est large, universel, totalement disponible à l’autre – ce qui est la transformation de l’amour que devrait vivre toute personne consacrée.

c) L’amour immémorial

Sœur Elvira raconte ou plutôt fait mémoire de l’événement fondateur :

 

« Au cours des premières années de vie à Saluzzo, un jour, j’ai vu un homme arriver au portail et je suis allée à sa renconter. Il avait le regard triste, remplid e honte, déçu par la vie On percevait sur son visage la colère contre lui-même, contre la vie, contre le monde entier. J’ai senti dans mon cœur que je devais lui dire ces simples mots en le regardant dans les yeux et en lui tendant la main : ‘Je t’attendais, enfin te voilà !’ Il a levé les yeux, les larmes lui sont montées aux yeux, il s’est détendu, la confiance est née à nouveau en lui. Quelque temps plus tard, il m’a raconté qu’il n’avait connu ni son père ni sa mère. Il avait été abandonné dès sa naissance et personne dans sa vie ne l’avait jamais attendu ni aimé. Il avait grandi dans divers collèges avec une grande colère contre tout le monde et, ce jour-là, pour la première fois de sa vie, il s’était senti aimé, comme un fils que sa mère accueille enfin. Cet homme est encore avec nous aujourd’hui, parce que la vie se sent bien là où elle trouve l’amour [9] ».

 

L’événement fondateur est voué à se répéter, voire à se ritualiser : « À partir de ce moment-là, ces mots : ‘Enfin, te voilà !’ ont été répétés, à vavers les paroles et les gestes, à chacun des jeunes qui a frappé à notre porte. Pour se sentir aimée, la vie doit se sentir attendue [10] ».

Ces paroles ne disent pas seulement l’amour inconditionnel ni seulement l’amour fidèle ou immortel (pour l’euphonie), mais l’amour immémorial. L’amour depuis toujours déjà là correspond diachroniquement à l’amour inconditionnel synchroniquement. Voire, les trois notes de l’amour embrassent les trois moments du don : depuis toujours (immémorial), cette caractéristique exprime la précédence du don originaire ; sans condition (inconditionnel), elle dit que l’amour s’adresse à l’être de l’autre ; pour toujours (fidèle), elle témoigne de la totalité du don de soi.

Cette superbe intuition de sœur Elivra (« Enfin, te voilà ! ») nourrit un besoin très profond du cœur humain. Nous n’avons pas seulement besoin de savoir que nous sommes aimés aujourd’hui, tels que nous sommes, avec nos ombres et lumières, autrement dit pour ce que nous sommes et non pour ce que nous avons fait, faisons ou ferons (amour inconditionnel) ; pas seulement besoin de savoir que cet amour est digne de foi, c’est-à-dire ne cessera jamais, quoi que nous fassions, quoi que l’autre aimant devienne. Mais nous avons besoin de savoir que tout, dans notre existence, a du sens, que cette contingence extrême qu’est notre conception, que la fragilité indicible de notre surgissement est le revers d’un don désintéressé, et que ce don est le germe d’une mission (amour immémorial). Autrement dit, selon la révélation célébrée dans l’hymne aux Éphésiens (Ép 1,3-10), notre histoire sainte s’inscrit dans la Grande Histoire que Dieu écrit pour nous.

d) L’amour personnel

Sœur Elvira a beau accueillir surtout des drogués (des « tox »), elle ne voit pas dans le jeune un drogué. Elle raconte là encore l’événement fondateur :

 

« Trois jeunes ont fait leur apparition et ont demandé : ‘C’est celle-là la communauté pour les drogués ?’

« Nous ne l’avons pas définie, nous, comme la ‘communauté des drogués’, mais plutôt comme la communauté des jeunes perdus dans leur non-sens, dans l’ennui, dans l’insécurité, incapables de commencer ni de conclure une histoire. Et il y en avait tellement ! […] Nous nous sommes regardés et nous avons dit : ‘Drogués ou pas dorugués, ce sont des jeunes…’ Alors, nous avons répondu : ‘Oui !’ [11] ».

 

Et d’ajouter ce commentaire si important : « Nous étions tous au même niveau ». Ce qu’atteste la vie communautaire :

 

« Ils sont entrés et se sont adaptés à la pauvreté du moment. Les premiers jours, n’ayant aucun mobilier, on dormait sur l’herbe qu’on coupait pendant la journée : c’était le mois de juillet et c’est pour ça que ce n’était pas trop gênant de dormir là, à meme le sol. Ils ont accueilli l’embarras du moment avec simplicité parce que nous le vivions ensemble [12] ».

 

Cet amour inconditionnel se traduit dans l’espérance sur autrui :

 

« Nous voulons aimer non pas en faisant semblant, mais en croyant qu’en chaque jeune, même parmi ceux qui ont échoué, il y a un capital qui n’a pas encore été exploité [13] ».

 

Citons à nouveau l’hymne à la charité, mais au terme de l’énumération de ses quinze actes : « La charité espère tout » (1 Co 13,7). Et le merveilleux commentaire qu’en donne Paul Baudiquey : « Les regards qui nous sauvent sont les regards qui nous espèrent ».

C’est aussi à cause de ce regard adressé à l’être et non à l’apparence ou même à l’agir que sœur Elvira se refuse à parler de thérapie : « Au fond, je ne les voyais pas malades, ils n’avaient pas d’ulcère ni de cancer. C’étaient des jeunes au regard éteint et au cœur mort. Ils ne me demandaient pas de médicaments, mais l’envie de vivre [14] ».

C’est d’ailleurs aussi au nom de cet amour inconditionnel, donc ontologique, que, au commencement, sœur Elvira n’a pas rendu la prière obligatoire : « Au début, nous n’avons pas proposé la prière, parce que nous avions pensé : ‘Accueillons l’homme tel qu’il est’. L’homme est fait à l’image de Dieu, donc il est déjà une prière pour nous qui avons la foi [15] ». Ce n’est que suite à la demande des jeunes et en constatant le caractère reconstructeur, plus, curatif, de la prière, que « la proposition » de celle-ci « est devenue fondamentale dans le chemin de reconnaissance [16] ».

e) Le geste qui incarne l’amour : l’étreinte

Cet amour se traduit dans une réalité qui est aussi un symbole, au point de donner son titre à l’ouvrage autobiographique : L’abbraccio, qui est heureusement traduit par « L’étreinte ».

 

« Après avoir passé un peu de temps dans notre Communauté, Francesco est retourné chez lui pour vérifier comment ça se passe dans sa famille […]. Avant qu’il s’en aille, j’ai dit à Francesco ce que je conseille toujours aux jeunes garçons et aux jeunes filles qui sont blessés, surtout dans leurs relations avec leur père :

« ‘Va chez toi – leur dis-je – et quand tu verras ton père au loin, cours, cours, cours à sa rencontre. Jette-foi dans ses bras, tu dois compter, sans le lâcher, jusqu’à sept. Un… deux… trois… quantre… cinq… six… sept. Tu verras qu’au bout de quelques secondes, il cherchera à se séparer de toi, mais tu dois le serer encore plus fort et alors, lui aussi te serrera plus fort. Ensuite, après ces sept secondes, lâche-le et regarde-le dans les yeux. Ton père pleurera. Tu pleureras. Tout le monde pleurera. Tu auras permis à cet homme de redevenir un père’.

« Pendant ces sept secondes, on s’arrête et on se souvient de son prorpe vécu et, surtout, les manquements du passé ressurgissent. On embrasse à nouveau sonhistoire, ses racines, sa terre. Ce geste entre dans le cœur, parvient jusqu’aux entrailles et fait fondre même les cœurs les plus durs, donnant comme fruit la paix qui naît du pardon.

« Francesco, à son retour, m’a raconté comme tant d’autres, radieux : ‘Elvira, quand j’ai vu arriver mon père, je me suis dit : ‘’Francesco, si tu n’y vas pas maintenant, tu n’iras plus’’. J’ai pris une longue inspiration et j’ai commencé à courir, je l’ai serré très fort dans mes bras. Je ne l’ai pas lâché quand il a voulu se séparer, j’ai compté dans ma tête jusqu’à sept en le serrant très fort… et tous les deux, nous avons pleuré comme des bébés, en nous donnant le pardon’.

« Francesco est un garçon parmi tant d’autres qui a expérimenté la force de l’ Étreinte de la miséricorde [17] ».

 

Par sa profonde expérience, sœur Elvira nomme le caractère symbolique, symbolisateur de ce geste universel d’amour, l’embrassement. À la suite du Christ, Aliocha (en réponse à la légende du Grand Inquisiteur) avait montré que le baiser est le geste d’amour inconditionnel de l’ennemi. Mais non sans lever l’ambiguïté né du baiser de Judas.

Cette étreinte est tellement importante qu’elle devient l’expression même de l’amour. « Les nombreux jeunes qui ont sonné durant les dernières années aux portes de la Communauté de par le monde connaissent bien cette étreinte. Et beaucoup d’entre eux ont touché du doigt la liberté qui est née de cette éterinte dans leur cœur ». Et qu’elle peut s’étendre jusqu’à la forme la plus inattendue : l’étreinte de soi :

 

« Quand le matin, nous ouvrons les yeux et que nous nous rendons compte que nous sommes vivants, nous devons faire un beau sourire et étreinte quelqu’un. Quand je dis ça, mon me demande souvent : ‘Mais à qui est-ce que je dois sourire ? Qui est-ce que je dois serrer dans mes bras ? Mon mari est au travail. Mes enfants dorment encore. Il n’y a que moi et il n’y a personne avec moi’. Je réponds : ‘Mais toi, tu n’es donc ‘personne’ ? Tu dois te sourire à toi-même, à ta vie, tu dois t’embrasser toi-même. Tu dosi t’aimer, accueillir ton être et ton existence tous les jours à nouveau, avec bonheur’.

« Apprenons à nous dire à nous-mêmes, à notre vie, à peine réveillés : ‘Ma vie, je t’accueille, je t’embrasse, je te souris. Chaque jour, je veux vivre en me donnant, je ne veux plus être un cadavre !’ [18] ».

 

Bien entendu, sœur Elvira en a fait l’expérience personnelle : « Je l’ai vécu moi-même : la rencontre avec Dieu m’a fait serrer ma pauvre vie dans mes bras, avec mon histoire blessée, et elle m’a libéré de la honte de la fragilité de mon père. Elle m’a donné la liberté, la paix et la joie [19] ». Voilà pourquoi elle peut exhorter :

 

« Laissez-vous étreindre par la tendresse de la miséricorde de Dieu. Embrassez à nouveau votre vie, votre existence. Dieu est présent dans cette hisotire : cherchez-le et vous le trouverrez, vous le rencontrerez [20] ».

 

Commentons brièvement ces trois phrases si riches de sens. Loin d’être une fuite dans le spirituel (un arrière-monde pour Nietzsche, un opium pour Marx), cette union à Dieu est extrêmement incarnée : « Embrassez à nouveau votre vie, votre existence ». En effet, la fuite fustigée par les Soupçonneur, avec justesse, mais sans compassion, est due à la violence insupportable que ces jeunes ont dû supporter. Pourtant la présence de Dieu s’atteste jusque dans la misère la plus dégradante, ainsi que sœur Elivra en a fait l’intime et féconde expérience : « Dieu est présent dans cette hisotire : cherchez-le et vous le trouverrez, vous le rencontrerez ».

3) Conclusion

Ainsi, le témoignage de sœur Elvira illustre de manière admirable cette loi de l’amour-don qu’est la petitesse comme germe de la grandeur – loi que nous avons vu ébauchée par le microbiote. Il permet ainsi de conjurer la critique si puissante et si récurrente du nietzschéisme selon laquelle le christianisme, religion du ressentiment, aime la petitesse parce qu’il hait la vie – et doublement : la petitesse est le chemin de la grandeur ; la petitesse n’est adéquatement chérie et choisie seulement lorsqu’elle l’est au nom de la charité, qui est la plus exigeante et transformante des énergies de la vie. Enfin, nous avons vu à cette occasion qu’Elvira, non seulement confirme d’autres lois de l’amour-don (comme celle de la symbolisation dans l’étreinte ou le service), mais en ébauche une autre (l’amour comme acte immémorial et donc comme attente du donateur).

Pascal Ide

[1] Je renvoie au site, consulté le 20 août 2019 : http://www.comunitacenacolo.it/fr/

[2] Je me fonde sur l’ouvrage autobiographique de Sœur Elvira, la sœur des drogués, L’étreinte. Histoire de la Communauté du Cenacolo. Propos recueillis par Michele Casella, trad. Jean Perez, Nouan-le-Fuzelier, Éd. des Béatitudes, 2014. Je me fonde aussi sur des propos recueillis de personnes connaissant la communauté du Cenacolo.

[3] Sœur Elvira, L’étreinte, p. 7.

[4] Ibid., p. 115 et 116.

[5] Ibid., p. 21.

[6] Ibid., p. 108.

[7] Ibid., p. 23.

[8] Sœur Elvira, la sœur des drogués, L’étreinte. Histoire de la Communauté du Cenacolo. Propos recueillis par Michele Casella, trad. Jean Perez, Nouan-le-Fuzelier, Éd. des Béatitudes, 2014, p. 25.

[9] Ibid., p. 41.

[10] Ibid., p. 42.

[11] Ibid., p. 42.

[12] Ibid.

[13] Ibid., p. 37.

[14] Ibid., p. 43.

[15] Ibid., p. 55.

[16] Ibid., p. 56.

[17] Ibid., p. 13-14.

[18] Ibid., p. 85.

[19] Ibid., p. 14.

[20] Ibid., p. 14 et 15.

29.8.2019
 

Les commentaires sont fermés.