Forrest Gump
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Country:
Américain
Release date:
5 octobre 1994
Duration:
2 hours 20 minutes
Évaluation:
****
Director:
Robert Zemeckis
Actors:
Tom Hanks, Gary Sinise, Robin Wright...
Age restriction:
Adolescents et adultes

Forrest Gump

Forrest Gump, romance française de Robert Zemeckis, 1994.

Thème principal:

Amour

Thèmes secondaires:

Don de soi, amour de soi, handicap

 

La comédie dramatique américaine de Robert Zemeckis (1994), trois fois oscarisée, est reconnue par beaucoup comme un chef-d’œuvre témoignant de la vie aux Etats-Unis à travers le regard d’un simple d’esprit : elle nous fait visiter le pays, de la Nouvelle Angleterre aux Rocheuses, croiser trois présidents et Elvis Presley, assister aux bouleversements sociaux de la désagrégation raciale et du pacifisme des années 60, jusqu’à l’essor de la micro-informatique et l’apparition du Sida dans les années 80.

Pourtant, à mon sens, la clé du film est ailleurs : la fabuleuse histoire de sa vie que, assis sur un banc, en attendant le bus, Forrest Gump (merveilleux Tom Hanks) raconte à ses voisins est d’abord une histoire d’amour.

Forrest ne veut vivre que d’aimer. Qu’il confonde la firme Appel avec une coopérative fruitière ne l’empêche pas de souhaiter rendre heureux ceux qui l’entourent. « Je ne suis pas très malin, dit-il à Jenny qui un jour deviendra sa femme. Mais je sais pouvoir aimer ». Tout ce qu’il fait ne vient que de là. Même sa course éperdue de plus de trois années, n’est qu’une manière d’oublier l’amour qu’il croit impossible avec Jenny.

L’amour de Forrest est élan. Lorsque, sur un crevettier, il apprend par radio, que sa maman est malade, il ne s’embarrasse pas : il plonge aussitôt tout habillé dans l’eau et arrive à la maison en courant.

Cet amour est confiance et confiance dans la parole de l’autre. C’est cette absolue confiance qui lui donne de devenir champion de ping-pong. Forrest obéit scrupuleusement à la règle qu’on lui a enseignée : « Il suffit de ne jamais perdre la balle des yeux ».

Cet amour est fidélité. Forrest a promis à Babou de faire de la pêche aux crevettes : « J’ai promis et je tiens toujours mes promesses », dit-il en allant voir la famille de Bouba. Sa fidélité lui donne une force sans limite ; c’est un véritable vaccin contre le découragement.

Cet amour, enfin, est salvateur : en sauvant le corps du lieutenant Dan Taylor de la mort, Forrest l’ignorait, mais il préparait, à long terme, le salut de son âme. Surtout, il délivre Jenny de son désespoir suicidaire. Au dernier moment, lorsqu’elle s’apprête à se défenestrer, son regard s’attarde sur le ciel. Petite, elle s’était enfuie parce que son père la battait ; elle avait demandé à Forrest qui était venu la rejoindre de prier Dieu. Or, aujourd’hui, elle se tourne à nouveau vers le firmament. N’entend-elle pas alors, les mots prononcés un jour par la seule personne qui l’ait jamais chérie pour elle-même : « Je t’aime » ?

Si Forrest aime, c’est qu’il a reçu de l’amour. Certes, il n’a pas eu de père ; de l’absence de figure paternelle, il a hérité une difficulté à prendre des initiatives, une peur à affronter les obstacles. Mais il fut chéri par sa mère. La confiance, la fidélité, le don de soi que Forrest vit à son tour, il les a déjà vus exercés par cette mère qui ne cesse de lui répéter : « Tu n’es pas différent des autres ».

Pourtant, cette affection ne saurait suffire pour qu’il s’aime lui-même. Une blessure secrète ronge Forrest : il est assez intelligent pour savoir qu’il ne l’est pas autant que les autres. Cette tare ne l’empêche pas de vivre, mais il ne veut pas la transmettre. Or, l’amour de sa mère ne peut suffire à le rassurer. Aussi, quand il apprend de Jenny qu’il est papa, sa première question est-elle : « Est-il normalement intelligent ? » La réponse fuse : « C’est l’un des premiers de sa classe ». Elle ne peut imaginer quel bonheur elle lui donne, ni à quel point cette révélation le guérit : toute malédiction est conjurée. Le fils et l’époux peut devenir père, donc accomplir pleinement sa vocation d’homme. En transmettant, en donnant à son tour, Forrest fait que la boucle de l’amour est bouclée.

Enfin, à côté de l’amour des autres et de soi-même, un amour d’un autre ordre est discrètement évoqué. Au terme du film, sur la tombe de Jenny, Forrest s’interroge : « Est-ce le destin ou nous nous laissons portés par le hasard comme sur une brise ? » Une nuée d’oiseaux s’envole, à l’instar de celle qui avait suivi la prière de la petite Jenny. Si Forrest a décidé de faire séjourner la plume dans son livre, celle-ci est venue du ciel et y retourne sans qu’il le choisisse : l’amour terrestre ne trouve-t-il pas sa source et son terme au-delà de lui ?

Certains bouderont en disant que cet innocent aux mains pleines ne doit son bonheur qu’à une suite d’heureux et très improbables hasards et une innocence qui lui interdit de mesurer la tragédie de la réalité. Certains se sont aussi offusqués : lire l’histoire américaine à travers l’esprit de Forrest, c’est exclure toute volonté de comprendre. À moins que l’explication ne soit ailleurs. Jean Vannier ne cesse de répéter que les pauvres (en esprit) sont nos maîtres car ils nous reconduisent, sans fard ni détour, à l’essentiel : les deux besoins à la fois les plus universels et les plus profonds du cœur de l’homme, aimer et être aimé.

Pascal Ide

 

Histoire

Une plume s’envole et atterrit aux pieds de Forrest Gump, un « simple d’esprit », assis sur un banc en attendant le bus à Savannah, en Géorgie. Il va raconter la fabuleuse histoire qu’est sa vie aux passants qui viendront s’asseoir tour-à-tour sur le banc. La vie de Forrest Gump sera à l’image de la plume, que l’on aperçoit au début et à la fin du film, qui se laisse porter par le vent tout comme Forrest Gump se laisse porter par les événements qu’il traverse dans l’Amérique de la seconde moitié du xxe siècle.

Entre son enfance, souffre-douleur de sa classe du fait de ses handicaps mentaux et pour la marche, et le moment même où il raconte son histoire, devenu milliardaire, Forrest Gump sera champion de football américain, diplômé d’une université, soldat au Viêt Nam (il recevra la Médaille d’Honneur du Congrés), champion de ping-pong dans l’équipe militaire américaine, marathonien exceptionnel (il court sans s’arrêter pendant plus de 3 ans), capitaine de crevettier et fera la couverture du magazine Fortune. Se trouvant au cœur des principaux événements de l’histoire des États-Unis entre les années 1950 et 1980, il en devient un des acteurs décisifs, inspirant notamment et sans le vouloir à Elvis Presley sa façon de se déhancher, à John Lennon les paroles d’Imagine, reçu à la Maison-Blanche par trois présidents et participant à lareprise des relations diplomatiques entre la Chine et les États-Unis, révélant le scandale du Watergate et initiant quelques-unes des principales tendances socio-culturelles des années 1980.

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