Désabuser. Se libérer des abus spirituels
Laurent Lemoine
Morale et droit – Recenseur : Pascal Ide
NRT 142-2 (2020)
Le sujet est grave : il s’agit des abus non pas d’abord physiques, mais spirituels, qui sont commis au sein de l’Église. Laurent Lemoine, dominicain et psychanalyste, qui s’est fait connaître notamment par un ouvrage sur les relations entre foi et psychanalyse (Quoi de neuf docteur ?, 2018), écrit un livre qui se veut avant tout pratique. Pour cela, il se met à l’écoute de la déclaration (problématique) de Mgr Wilmer selon laquelle « Je crains que l’abus de pouvoir ne soit dans l’ADN de l’Église. » Il fait appel à différentes catégories (comme le clivage qui n’est pas schizophrénie, ou le cléricalisme) et des analyses éclairantes (loin de mentir, le pervers dit le vrai, mais une vérité qui cherche à faire souffrir). Enfin, il propose un chemin pour, selon le mot qu’il affectionne, « désabuser », c.-à-d. écarter la tentation des abus.
Le livre met des mots sur les maux, ce qui est bienfaisant pour les victimes et utile pour les accompagnateurs. Maintenant, on est en droit de s’interroger sur les formules à l’emporte-pièce (même si l’on est prévenu un peu tard que l’A. cherche intentionnellement « à provoquer quelque peu », p. 169), les nombreuses imprécisions (p. ex., la perversion n’est pas clairement définie ni décrite, elle n’est pas distinguée du narcissisme), la perspective presque exclusivement psychanalytique (plus que le consentement au manque, c’est l’acquisition des vertus qui construit la personne), les références principalement journalistiques et un pessimisme sur l’autorité, voire sur la structure institutionnelle de l’Église. — P. Ide