4) Les différentes espèces de prudence
L’on distingue classiquement deux sortes de prudence : la prudence personnelle, la prudence interpersonnelle. La première est celle par lequel je gouverne ma vie, par laquelle je suis maître chez moi, responsable de mes actes, la seconde est celle par laquelle je gouverne les autres. Voilà pourquoi Aristote faisait de la prudence la vertu des chefs. Aujourd’hui, le coaching – qui est omniprésent – n’est pas d’abord ni seulement une sorte de laïcisation du directeur spirituel, mais une mise en œuvre pratique, par médiateur interposé, de la vertu de prudence.
La prudence personnelle se retrouve dans tous les domaines de la vie, dans le travail, à la maison, au volant. Même devant la télévision. Écoutons un conseil :
« La télévision devient, dans certains cas, un succédané artificiel de la contemplation (une soumission inerte à de vulgaires images, une descente dans la passivité qui remplace la montée jusqu’à la passivité suprêmement active de la compréhension et de l’amour. Aussi ceux qui espèrent prendre au sérieux la vie intérieure doivent-ils se servir très prudemment et judicieusement de la télévision [1] ».
À propos de la prudence politique, je n’insisterai que sur un point : ne peut gouverner l’autre que celui qui se gouverne lui-même, grand principe des anciens. Dans sa grande sagesse, L’Église a toujours estimé que le gouvernement de l’autre demande une longue, ou en tout cas une grande, expérience. Dans le Code de droit canonique, il est demandé que soit choisi un Père Abbé qui a mûri. Ainsi, il est périlleux de lancer trop précocément une personne ; la capacité de gouvernement ne peut s’exercer fructueusement et prudemment trop tôt.
5) L’acte cognitif de la prudence
Quel est le sujet de la prudence, l’intelligence ou la volonté ? Cette question, avec celle du syllogisme pratique, fait l’enjeu d’un vaste débat dont la bibliographie fait état. Ce n’est pas le lieu d’entrer dans le détail dans le cadre d’un cours pratique. Nous nous limiterons à quelques aspects concrets.
a) Le sujet de la prudence
1’) Prudence, vertu de l’intelligence
La prudence est d’abord et avant tout une lumière pour notre action ; et, bien sûr, puisqu’il s’agit d’une vertu, c’est une lumière intérieure. Or, c’est le propre de notre raison de nous éclairer. Voilà pourquoi la prudence est une disposition de l’intelligence. En effet, c’est en réfléchissant que vous apprenez à discerner la fin et les moyens.
Un directeur du personnel d’une importante entreprise, par ailleurs père de six enfants, disait : « Un jour, j’ai du m’arrêter pour réfléchir. Ma vie de famille battait de l’aile. Or, chaque soir, je rentrais à 22 h, avec en plus des dossiers sous le bras. J’ai dû me poser la question suivante: «Qu’est-ce qui est premier pour moi : mon travail ou ma vie de famille ? » Quand j’ai pris conscience que c’était celle-ci, j’ai remis les pendules à l’heure dans mes activités professionnelles ! » Je ne dis pas que chacun doit raisonner de la même manière : les échelles de valeurs sont à adapter aux situations, nous allons y revenir. Mais il reste qu’il faut prendre le temps de s’arrêter et de couper parfois avec un rythme infernal. Ces journées bourrées comme des valises, saturées d’activités et de bruits, rappellent ces façades que le crépis fait paraître sans faille. Aura-t-on le courage de soulever la pierre ? Acceptera-t-on la vulnérabilité qu’implique un espace de silence qui est occasion de réflexion mais aussi risque de reconsidérer certaines options essentielles ?
Ce sens du bon ajustement des moyens à la fin qui fait la gestion prudente de l’action n’est pas spontané : il suppose qu’on sache s’arrêter, prendre sa tête entre ses mains et chercher la lumière. Ce qui justement n’est pas spontané. Si la prudence est vertu de l’intelligence, c’est encore parce que la volonté (la puissance affective commandant l’action), est une cellule photoélectrique qui recharge ses batteries à la lumière de la raison. Freud montre bien que, selon le jargon psychanalytique, le pulsionnel a besoin de se fonder sur de l’idéel, sur une représentation.
2’) Prudence, vertu de l’intelligence pratique
Mais il y a un problème : la prudence ne serait-elle pas plus une vertu intellectuelle qu’une vertu morale ? En effet, comme nous l’avons vu, la première perfectionne l’intelligence alors que la seconde achève l’homme en perfectionnant l’intégralité de son agir.
La réponse est simple. Plutôt intellectuelle par son sujet (c’est-à-dire ce en quoi elle repose) qu’est l’intelligence, la prudence est morale par son objet et sa fin. Or, c’est ce point de vue qui prédomine. La prudence n’est pas spéculative ni théorique mais pratique : elle ne s’intéresse pas au Cap Horn, à sa météorologie en soi, mais au Cap Horn qui se trouve sur sa carte et à la possibilité pour son catamaran de le remonter d’est en ouest. Ce qui signifie que le prudent est un homme du concret qui jauge les situations singulières. Le jeune interne en médecine n’est pas encore quelqu’un de très prudent : il connaît bien les maladies et les thérapeutiques à administrer, mais par manque d’expérience, il ne sait pas encore parfaitement proportionner les secondes aux premières dans chacun des cas concrets qu’il rencontre. Aussi, que les malades se rassurent, est-il encadré lors de ses premiers pas à l’hôpital !
De même, celui qui vient de réussir le permis n’est pas encore un conducteur totalement prudent. Il connaît la théorie et seulement un peu la pratique. On subvient en partie à ce manque intérieur de vertu par le corset extérieur de la loi, en limitant sa vitesse à 90 km/h (même si c’est discutable, comme on le reverra).
3’) Conséquences
La prudence est une sagesse pratique. En effet, le prudent requiert que l’on ait toujours présente devant les yeux la finalité afin d’adapter les moyens : c’est là tout le propre du vrai sens pratique. D’où le mot d’Aristote que « la prudence est sagesse dans l’ordre pratique ». Elle ne se résume donc pas à la seule connaissance poussée, technique des moyens avec laquelle on la confond souvent : savoir comment fonctionne la bétonneuse est nécessaire à l’entrepreneur, mais cela ne sert à rien si on n’a pas prévu qu’il pleuvra et si l’on ne sait pas articuler ce travail avec celui de l’électricien pour finir la maison à temps. La prudence n’est pas non plus que la connaissance générale et bien souvent théorique de l’action à faire. Un médecin qui prescrit de poser une perfusion doit être le premier à pouvoir le faire ; cela lui permettra, le cas échéant, de remplacer une infirmière débordée, mais surtout il pourra ainsi comprendre qu’il ne peut lui demander d’en poser dix dans une matinée ! La prudence est donc cette vertu rare qui équilibre sens de la finalité et sens des moyens.
Autre conséquence. La prudence suppose donc un amour et non un mépris de l’action que l’on ne peut réduire à sa seule intention. On raconte qu’un jour Saint Vincent de Paul croise une religieuse en train de balayer le couloir. Il lui demande : « Ma sœur, balayez-vous ce couloir pour la gloire de Dieu ? » La religieuse, aussitôt, opine du chef : « Oh oui, mon père, je balaye ce couloir pour la gloire de Dieu ! » et Monsieur Vincent de répliquer : « Ah, si c’était pour balayer le couloir, je pense que vous vous y prendriez autrement ! » Cette remarque est extrêmement importante pour la vie spirituelle du chrétien. Celui-ci est toujours menacé de tant insister sur la pureté morale qu’il en vienne à déprécier la nature même des œuvres qu’il doit accomplir.
b) L’objet de l’intelligence prudente
Nous avons vu que la prudence est l’acte de l’intelligence pratique. Mais quel est l’objet de l’intelligence pratique : l’universel ou le singulier ? Concrètement : la loi universelle ou les circonstances ?
Nous distinguerons non pas deux, mais trois niveaux d’universalité dans l’analyse : l’universel, le particulier, le singulier. Nous les appliquerons ensuite à l’acte prudentiel.
1’) L’universel, le particulier et le singulier
Partons d’un exemple. Monsieur le Gallec est-il un homme, un breton ou pêcheur sur la Marie-Jeanne ? Ma question a un sens, parce que, considérant Monsieur le Gallec, je peux tenir trois sortes de discours sur lui :
– soit je dis que c’est un homme, qu’il est libre, qu’il peut attraper des maladies, etc.
– soit je dis qu’il est français, breton pour être précis, (même si Le Gallec signifie français !), etc.
– soit je le décris en sa vie, en son itinéraire : il est marié, a trois enfants, est à la retraite depuis cette année. Il habite une charmante maison près de la pointe des Rimins, non loin de Cancale, etc.
Eh bien, on dira que les premières caractéristiques que j’attribue à notre homme sont de l’ordre de l’universel, les secondes de l’ordre du particulier et les dernières de l’ordre du singulier, de l’individuel. Le particulier prendra donc ici le sens d’intermédiaire (selon la généralité) entre l’universel (le plus ouvert et le plus large) et le singulier (qui est absolument déterminé à un individu et attribuable à lui seul).
2’) Les trois perspectives de l’acte humain
La prudence porte sur l’acte humain comme nous l’avons vu. Or tout acte comme toute réalité comporte aussi cette triple perspective. Soit par exemple des parents dont les enfants sont en âge d’aller à l’école. Mettons à plat, explicitons tout le raisonnement qu’ils vont devoir parcourir :
– Ils se disent en premier lieu : « Les parents doivent éduquer les enfants qu’ils ont mis au monde ».
– Concrètement, cela signifie : « Les enfants doivent aller à l’école »
– Et le discours intérieur s’achève par : « Notre fils Cyril ira à la maternelle de Crécy-en-Brie La Chapelle ».
La première proposition est de l’ordre de l’universel, la seconde du particulier et la dernière du singulier. Or, il est impossible de court-circuiter une seule de ces trois étapes. On ne peut poser une action complète, achevée, que si l’on prend en compte ces trois niveaux d’universalité. Des parents qui abandonneraient leur enfant à l’assistance publique (comme ce fut le cas de Jean-Jacques Rousseau) ou qui n’enquêteraient pas autour d’eux pour savoir quelles sont les écoles les plus accessibles pour leurs enfants, ne pourraient pas agir ou plutôt agiraient imprudemment.
3’) L’acte prudentiel
Un acte prudent, donc un acte vraiment humain, demande une prise en compte intégrale de ces trois niveaux : universel, particulier et singulier. Mais il faut prêter attention : cette distinction ne recoupe pas la distinction précédemment faite entre fin et moyens : ceux-ci sont à considérer à chacune des trois dimensions de l’acte :
a’) L’acte obnubilé par l’universel : les mains pures
Avoir les mains pures, c’est s’arrêter aux seuls principes universels, à l’instar de cet instructeur disant à ses élèves parachutistes : « Je commencerai par une information capitale. La proportion des accidents est de un pour mille. Vous n’êtes que quarante. Donc vous n’avez pas à vous en faire ! »
Bien comprendre ce point est absolument essentiel, tant que pour notre vie de chaque jour que pour une juste vision de l’éthique. En effet, si nous regroupons les niveaux universel et particulier ensemble, ignorer les circonstances singulières pour en rester au seul principe universel et faire du moralisme. À la limite, c’est rendre la loi perverse en ne se demandant même pas si elle est applicable. Par exemple, on peut se plaindre de la corruption de certains appelés dans le cadre du service national et leur servir un discours de ce type : « Soyez des hommes, maîtrisez-vous, ne vous droguez pas ». Cela est sans doute vrai mais c’est oublier que la racine de cette corruption tient d’abord à l’inaction. L’oubli du contexte rend la norme utopique.
À rapprocher de cette erreur, l’illusion fréquente selon laquelle les cas singuliers seraient une application des principes universels, et donc que la connaissance de ceux-ci suffit. C’est oublier que le réel est mouvant, contingent. Autre chose est de savoir qu’il faut un travail dans la vie, autre chose est de savoir quelle profession nous conviendra le mieux, compte tenu de la conjoncture actuelle. Ultimement, il y a là une confusion entre le mode de procédé théorique, scientifique, et le mode de procédé pratique : il n’y a qu’en science que le cas singulier est une application de la loi universelle.
b’) L’acte obnubilé par le singulier : les mains seules
Inversement, n’accorder de l’attention qu’au singulier et mépriser les principes universels sous prétexte qu’ils sont intellectuels et déconnectés du réel, c’est courir le risque de n’avoir qu’une éthiquede circonstance au coup par coup. C’est la morale des mains seules. Or si la morale est en situation, elle n’est pas une morale de situation. La disqualification de l’universel court toujours le risque d’une exténuation de l’acte moral. « On ne profite d’aucune leçon, parce qu’on ne sait pas descendre jusqu’au général et qu’on se figure toujours se trouver en présence d’une expérience qui n’a pas de précédents dans le passé [2] ».
Tel est le risque de la techno-science : on expérimente en diurétique, par exemple sur les embryons, adaptant son agir à chaque cas et en refusant de prendre le recul pour se poser les questions essentielles comme : Quel est le statut de l’embryon ? A-t-il ou non les droits d’une personne ? Sans cette réflexion sur les principes éclairant nos actes très quotidiens, notre vision morale devient vite une liste de recettes. L’éthique des principes universels, pour reprendre le reproche que Péguy adressait à Kant, a les mains pures mais elle n’a pas de main. L’éthique du singulier, elle, n’a plus que les mains : sans auteur (donc sans autorité), elle est sans hauteur.
Résumons en caricaturant à peine les deux réductions opposées. L’oubli des circonstances singulières qui rendent probable le jugement prudentiel : « Il faut honorer ses parents, donc tu dois les voir chaque semaine ». Inversement, l’oubli de l’universel se caractérisera par l’indétermination : « Tiens ! cela fait deux ans que je n’ai pas vu mes parents ! Allons passer le week-end à la maison ! ».
c’) L’acte prudent intégral : la vision stéréoscopique
La vision stéréoscopique est la seule qui restitue au réel toute sa profondeur et tout son relief.
- Le prudent se nourrit d’abord de principes universels. Or ceux-ci ne sont pas innés. Seule une réflexion sur l’homme, sur la nature, sur le sens de la vie, donne de les percevoir. Par exemple, la polygamie est-elle immorale ? La fidélité en amitié est-elle une valeur sûre ? Faut-il mentir si c’est bénéfique à quelqu’un , à plus forte raison si cela permet de sauver une vie ? À un premier niveau d’universalité, le Décalogue fournit ces principes mais il faut concrétiser et on passe alors dans le régistre des principes non plus universels mais particuliers. Mais, et cela est d’importance, ces principes, du fait même de leur généralité, sont très certains en eux-mêmes, le degré de certitude augmentant avec l’universalité.
Le tout premier principe qui nous fait agir est : « Faire le bien, éviter le mal ». Il ne souffre aucune exception. D’autres principes comme le respect de l’autre, la prohibition de l’inceste ou du vol sont aussi très universels et très assurés. Napoléon disait des parents : « L’éducation d’un enfant commence vingt ans avant sa naissance ».
C’est ce qu’à sa manière affirme Michael Dummett, l’une des principales figures de la philosophie anglaise contemporaine :
« Nos façons de concevoir les relations des humains les uns avec les autres, ou bien des sociétés entre elles, impliquent évidemment des éléments théoriques. Et ces idées sont presque toujours confuses, que nous le sachions ou non. C’est pourquoi je pense que la philosophie a toujours un très grand rôle à jouer dans le domaine social et politique ».
Par exemple, la question apparemment théorique suivante à l’air d’être une question pour philosophe : Un État est-il responsable envers les individus qui ne sont pas ses ressortissants ? Pourtant, « selon la manière dont on l’analyse, on obtiendra des options différentes et des décisions très dissemblables », en matière de politique d’émigration. [3]
- Mais la prudence a aussi besoin de connaître les circonstances singulières incarnant l’action. Or ces circonstances sont infiniment variées et complexes : non seulement elles ne se reproduisent jamais d’une action à l’autre, mais il est impossible de tout cerner. Pourquoi ?
Les scientifiques actuels en arrivent même à parler d’effet Butterfly, ce que l’on peut résumer par le mot de Pascal : « Si le nez de Cléôpatre eût été plus court, la face du monde aurait changé ». Donc, contrairement aux principes universels qui n’existent qu’en nombre limité, ces données débordent notre capacité de connaître de toute part : nul ne peut savoir toutes les conséquences de ses actes et si, par exemple, le fait d’oublier d’éteindre une lumière participera, certes de façon lointaine, à un prochain choc pétrolier ! Aussi, arrivé au trait singulier, l’agir prudentiel ne peut plus prétendre à la certitude. La marge d’indétermination devient beaucoup trop grande. Pour reprendre l’exemple ci-dessus, les parents savent avec certitude que leur enfant doit aller à l’école, mais ils ne peuvent être absolument certains que telle école conviendra mieux à tel de leurs enfants. Trop de paramètres rentrent en ligne de compte : on ne peut savoir qui seront tous les professeurs, tous les élèves, si le conducteur du car de ramassage sera toujours sobre quand il conduira, etc.
Enfin, non seulement l’acte singulier n’est pas une déduction logique du principe universel et a une originalité, une richesse propre, qui méritent attention.
d’) Le passage de l’universel au singulier. Prudence et conscience
Nous voulons parler de la conscience morale et non de la conscience psychologique. On parle beaucoup de conscience dans les discours éthiques actuels, alors que le terme de prudence en est presque totalement absent. Cette disparition du mot et de la réalité attenante est surtout perceptible depuis Kant. Quel en est l’enjeu ? La conscience, tant chez les anciens que chez les modernes apparaît comme une lumière interne, plus ou moins spontanée, éclairant immédiatement mon action. Tout le monde se souvient du cri d’émerveillement de Jean-Jacques Rousseau dans La profession de foi du vicaire savoyard : « Conscience, conscience, instinct divin ! » Mais un Saint Thomas, par exemple, estimait que cette lumière première immédiate évidente n’intéressait que les principes très universels et très généraux, ce qu’il appelait la « syndérèse ». Ainsi, la conscience montrera qu’il faut porter secours aux dénutris éthiopiens ou somaliens ; mais ce n’est pas elle qui dira par quel organisme passer et s’il est prudent de financer tel ou tel sans savoir ce que l’argent devient. La conscience pourra aussi incliner à croire qu’il est louable et généreux de donner son sperme ou de prêter son utérus ; mais cette voix intérieure enseigne-t-elle ce qui est vraiment humanisant ?
À la limite, la logique de ce processus conduit à l’éthique procédurale.
1’’) Illustration cinéma
Chroniques de Narnia. I. Le lion, la sorcière blanche et l’armoire magique, film fantastique américain de Andrew Adamson, 2005.
Les scènes se déroulent de 29 mn. 18 sec. à 33 mn. 30 sec., puis de 1 h. 1 mn. 20 sec. à 1 h. 2 mn. 15 sec. Couper dans la première scène (le chocolat, etc.)
Histoire
Pendant la Seconde Guerre mondiale, les parents Pevensie décident d’envoyer leurs quatre enfants dans le manoir du professeur Digory Kirke à la campagne pour fuir les bombardements londoniens. En jouant à cache-cache, la plus jeune, Lucy, découvre une armoire qui l’emmène, même si elle ne le sait pas encore, dans un autre monde tout enneigé : Narnia. Elle y fait la connaissance d’une étrange créature mi-homme mi-chèvre, le faune Tumnus. Lucy raconte son aventure à ses frères, Peter et Edmund, et à sa sœur, Susan, mais aucun d’eux ne la croit. Toutefois, le cadet, Edmund, la suit et rencontre une femme glaciale. Voyons ce qui se passe et comment Edmund réagit.
Dans la seconde scène, on retrouve Edmund emprisonné dans les prisons sordides et glacés du palais de la reine où il retrouve Tumnus. Or, pour l’obliger à couper toute attache avec ses adversaires, mais aussi pour le plaisir pervers de l’humilier, elle révèle au faune que c’est le jeune garçon qui l’a trahi, pour de délicieux Loukoums. De nouveau, observons comment Edmund réagit à cette accusation frontale.
Commentaire de la scène
La très inquiétante Reine du Neveu du Magicien est devenue, dans L’armoire magique, la Reine blanche et, après sa mort prétendue [4], la Sorcière Blanche du Prince Caspian [5]. Elle représente, avec, le personnage le plus diabolique du monde de Narnia. De Lucifer, elle a la grandeur (la taille physique symbolisant l’importance ontologique), la beauté, les multiples pouvoirs, de connaissance, de fascination [6] et de transformation ; mais surtout la froideur cadavérique, la haine spontanée d’Aslan, l’orgueil dominateur (constamment, elle ne veut pas moins qu’être Reine du monde, titre éminemment scripturaire), le narcissisme absolu, l’impitoyable cruauté, la fausse motivation de vouloir le bien des autres, mais en les asservissant [7] et la fixation dans la plus perverse des malices [8]. De l’ange de ténèbres, elle hérite aussi des limites qui lui sont traditionnellement reconnues [9].
Edmund faute par gourmandise qui, on le verra, une faute contre la vertu cardinale de tempérance. Mais, circonstance excusante, les loukoums (turkishs) sont tellement délicieux qu’ils rendent Edmund aussitôt dépendant. La logique des péchés capitaux éclaire les cascades de conséquences. Edmund est coupable de gourmandise, le premier péché du septénaire : en effet, il est dit qu’il aime les loukoums « par-dessus tout [10] », autrement dit qu’il les idolâtre ; or, partant de là (aidé par la rancœur), Edmund en vient à haïr son frère et même jusqu’à se moquer d’Aslan, ce qui est l’équivalent d’un blasphème [11].
Dans ces deux scènes, différents indices attestent la présence de la conscience troublée d’Edmund.
- Au plan affectif, le malaise intérieur, le trouble, puis la colère qui extériorise la violence contre soi et accuse l’autre : bien de nos ires extérieures sont des manières injustes de conjurer la rage contre nous-même, par projection sur l’autre. La division intérieure.
- Au plan comportemental, et c’est peut-être encore plus révélateur, son regard tourné vers le dedans montre qu’il revient en lui-même. La PNL permet d’affiner le diagnostic en repérant l’orientation de ce regard, typique d’un retour vers le passé.
- Enfin, au plan des conséquences. La honte et le refus de se reconnaître coupable conduit à d’autres péchés. Ici, le mensonge.
2’’) Exposé
Nous l’emprunterons au grand philosophe et théologien de la conscience, John Henry Newman.
« Que nous connaissions ou pas le nom du Sauveur du monde […], nous éprouvons tous en nous la présence de quelque chose qui n’est pas un simple sentiment ni une quelconque opinion, impression ou point de vue, mais une loi, une voix impérieuse, qui nous ordonne de faire certaines choses et d’en éviter d’autres. Je ne dis pas que ses commandements sont toujours clairs, ni toujours compatibles les uns avec les autres ; mais une chose est certaine – et je veux attirer votre attention sur ce point – c’est que cette voix commande, qu’elle loue, blâme, promet, menace, sous-entend un futur et témoigne de l’invisible. […] C’est une réalité que nous ne contrôlons pas ou qu’avec une difficulté extrême, qui n’est pas notre œuvre et que nous ne pouvons détruire [12] ».
Dans ce riche passage, Newman dit plusieurs choses importantes qui sont autant de signes attestant la conscience : c’est une « voix », c’est-à-dire une parole intelligible. De plus, le contenu est moral, descriptif et pas seulement prescriptif ; la modalité du discours n’est pas seulement informative, ni seulement prescriptive, mais performative : cette voix « loue, blâme, promet, menace ». Enfin, la conscience est ineffaçable. Tel est l’un des paradoxes de la conscience : à la fois libre, car elle ne peut obliger la volonté, et pourtant nécessaire, car il est impossible de l’éteindre. « L’œil étant dans la tombe et regardait Caïn ».
La conscience se notifie en outre par sa rigueur. « La conscience est un sévère moniteur [13] ». Elle est un juge et non une miséricorde. Ici, vérité rime avec sévérité, contrairement à ce que peut dire Augustin. « « tandis qu’on progresse dans la connaissance de soi, on comprend également de plus en plus clairement que la voix de la conscience n’a rien de doux, rien de miséricordieux dans son ton. Elle est sévère et même rude. Elle ne parle pas de pardon, mais de punition [14] ».
La conscience se fait aussi connaître par sa force : « Qui peut nier l’existence de la conscience ? Qui n’éprouve pas la force de ses injonctions [15] ? »
Enfin, la conscience présente une traduction affective : « Je parlais à l’instant du mépris et de la haine qu’un esprit cultivé éprouve pour certaines formes de vice, et du dégoût profond et de l’humiliation qui s’empareraient de lui si d’une manière ou d’une autre, il s’y abandonnait […]. La conscience […] nous inflige la crainte aussi bien que la honte [16] ». Et ce ressenti soit est spontané, soit suit notre attitude à l’égard de notre conscience : « Quand je lui obéis, je ressens une satisfaction ; quand je lui désobéis, un chagrin, comme c’est le cas lorsque je réjouis ou que je chagrine un ami vénéré [17] ».
Mais cette expérience peut malheureusement être brouillée ou effacée. « Comme il est facile de perdre de vue les plus simples notions du devoir et de se laisser persuader qu’elles ne sont que des vues de notre esprit ! Comme il est facile de réduire à rien tel ou tel précepte moral, pour peu qu’on l’envisage grossièrement ! et la crainte du péché s’éloigne de nous, aussi rapidement que l’éclat de la modestie de notre visage [18] ! » Cependant, répétons-le, la voix de la conscience est inamissible, elle est seulement enfouie.
e’) Le passage de l’universel au singulier. La vertu d’épikie
Voici qu’un problème surgit. En effet, il peut arriver que la situation concrète contrarie ponctuellement un principe universel. La justice, nous le verrons, demande que l’on rende à chacun selon ce qui lui est dû. Mais allez-vous rendre un 22 long rifle à votre ami chasseur, durant ses loisirs, qui vous a prêté son fusil et vient vous le réclamer et qui, écumant de rage : « Donne-moi mon fusil immédiatement ! J’ai un compte à régler avec mon voisin qui a coupé une branche de mon pommier ! » ?
Que répondre ? Sans aller jusqu’à dire que le précepte est là pour nous donner la joie de le transgresser, il faut reconnaître que certaines circonstances particulières sont telles qu’elles suspendent l’application du principe en vue de respecter un bien supérieur. Même cette transgression qui n’est pas désobéissance est le fruit d’une vertu finement étudiée par les philosophes et qui s’appelle l’épikie. C’est en traitant de la justice qu’habituellement on l’étudie mais il est légitime d’anticiper.
Xavier Thévenot en donnait une illustration souriante dans son cours d’éthique fondamentale. Vous conduisez, et à la vue d’un feu rouge, vous freinez. Or, au même moment, vous apercevez une voiture grossir dans le rétroviseur et menacer de vous emboutir. Pour éviter l’accident, vous grillez le feu. Un agent vous siffle. Vous vous rangez : « Alors ! et le feu ? Qu’est-ce que vous avez fait ? » Paisiblement, plus sûr de votre éthique que de votre permis de conduire, vous répondez : « J’ai fait épikie ». Et l’agent de police de rétorquer : « Epiquoi encore ? Et puis quoi ? »
Qu’est-ce que l’épikie ? C’est la vertu qui va au delà de la lettre de la loi (du principe universel) pour en respecter l’esprit : les feux tricolores sont là pour réglementer la circulation et éviter les accidents. Les jours de pannes d’électricité le montrent assez ; mais la réglementation, trop universelle, ne peut prévoir tous les cas singuliers ; or, il peut se présenter des exceptions, comme l’exemple donné ci-dessus.
6) L’acte volitif de la prudence
Dans un ouvrage très successfull, qui est finalement un manuel de philosophie pratique, de mise en œuvre de la prudence, Steven Covey affirme que « L’Habitude n° 1 – être proactif – est la clé de toutes les autres ». En effet, elle « incarne le plus grand don de l’homme : la liberté de choix. A part la vie elle-même, il n’y a rien de plus précieux [19] ».
a) Illustration cinéma
Desperate Housewives, fiction dramatique télévisée américaine de Marc Cherry, Saison 1, 2005, épisode 7.
La scène de l’épisode 7 se déroule de 6 mn. 32 sec. à 7 mn. 23 sec.
Nous ne voyons ici que le comportement de Lynette (agit-elle ou réagit-elle ?), pas celui de Tom que nous réservons au deuxième topo, sur la gérance des autres.
Une fois n’est pas coutume, je fais appel à une série télévisée américaine au succès mondial et non sans intérêt (je parle de la première Saison), Desperate Housewives. Elle conte la quête de quatre amies (Bree, Gabrielle, Lynette et Susan) cherchant à comprendre pourquoi leur amie commune s’est suicidée. Au-delà de la trame vaguement policière, le plus passionnant est constitué par les relations interpersonnelles. Ici, sur une belle scène d’amour enveloppant après une crise.
Mariée à Tom, mère de quatre enfants, dont deux jumeaux très remuants, Lynette est au bord du burn out. Un épisode va précipiter la crise. Tom, son mari, la prévient deux jours avant qu’elle doit préparer un dîner d’affaires très important pour sa carrière professionnelle. Elle résiste jusqu’au moment où son mari lâche : « Bree Van de Kamp fait cela tous les jours ». Précisons : Bree, l’une des quatre amies, est une perfectionniste, sorte de Surmoi collectif pour tout le quartier. Après un moment de surprise, Lynette, contre toute attente, accepte. Pourtant, sa moue montre qu’elle est profondément divisée. Nous serions tentés d’accuser unilatéralement Tom. Est-il manipulateur ou seulement maladroit ? En tout cas, Lynette se fait manipuler intérieurement en entrant en compétition avec son amie.
b) Les manières de ne pas être libre
Par réaction, c’est-à-dire à partir d’une source autre que le fond de notre cœur. Multiples sont les réactions. Du plus extérieur au plus intérieur.
On peut réagir parce que l’autre nous contraint physiquement.
On peut réagir parce que l’autre nous contraint intérieurement. Nous en verrons plus bas des exemples en parlant de la manipulation dans la vie quotidienne.
On peut réagir sans que l’autre extérieur n’y soit plus rien, mais parce que nous avons intériorisé ce qu’il est. Ce qui est le cas ici. Du fait de la comparaison intérieure qui est la jalousie. Et de ce que Lynette n’est pas en écoute d’elle-même.
On peut enfin réagir sans que l’autre, présent, immédiat, soit en cause, mais à cause de l’autre ancien, souvent nos parents ou notre fratrie, soit la source (plus que la cause) : notre histoire blessée.
On peut enfin réagir sans que l’autre, même intériorisé, soit en cause : du fait de nos mauvaises habitudes qui nous commandent. Je veux dire : les habitudinaires, selon le nom de la théologie classique, ou les dépendants. Que j’ai de compassion pour eux !
Dans la perspective morale qui est la sienne, ne peux traiter que les premiers cas.
c) Combattre la réactivité
L’intuition sous-jacente est donc celle du primat de la liberté. Stephen Covey constate avec profondeur que la plupart de nos décisions sont réactives, donc ne sont pas maîtrisées, voulues, durables. Il oppose proactif à réactif.
Or, la réaction se caractérise par son caractère non voulu, donc immédiat, impulsif, non-conscient : le non-passage par la conscience se traduit, sensiblement, s’incarne dans l’absence de délai. Par conséquent, une attitude proactive suppose toujours l’éveil de la conscience et de la liberté ; en langage behaviouriste : un délai entre le stimulus et la réponse, ou, en langage imagé : utiliser une « touche-pause ». J’ajouterai : nous fonctionnons souvent au pilote automatique.
Notamment, repérez le langage réactif :
Langage réactif |
Langage proactif |
Je n’y peux rien |
Examinons les différentes solutions |
Je suis comme je suis |
Je peux aborder le problème d’une autre manière |
Ça me rend malade |
Je contrôle mes sentiments |
Ils ne le permettront pas |
Je peux élaborer une présentation à mon avantage |
Je suis obligé de le faire |
Je choisirai une réponse appropriée |
Je dois |
Je préfère |
Si seulement… |
Je ferai cela… |
d) Développer la pro-activité
Pour développer la pro-activité, dit Stephen Covey, il faut développer « quatre dons propres à l’homme » : la conscience de soi, l’éthique, l’imagination et la volonté indépendante. Ce faisant, l’auteur convoque les différentes facultés humaines concourrant à l’acte de liberté. L’enrichissant de l’imagination qui est une capacité ouvre à des voies nouvelles [20].
e) Discerner le milieu d’exercice de la liberté
S’inspirant sans le savoir de l’éthique stoïcienne, Stephen Covey propose de distinguer le cercle d’influence et le cercle des préoccupations. Le second est le plus grand cercle et correspond à tous les stimuli extérieurs auxquels nous sommes confrontés ; le premier est un plus petit cercle, inscrit dans le premier, et qui correspond à toutes les choses et les événements sur lesquels nous pouvons agir. La proactivité se concentre sur le cercle d’influence au lieu de se plaindre, de manière totalement inefficace, de la taille du cercle des préoccupations. Covey retrouve sans le savoir une distinction fondamentale de la philosophie stoïcienne : ce qui est en mon pouvoir et sur lequel je dois agir ; ce qui n’est pas en mon pouvoir et auquel je dois consentir.
« Je connais des parents dont la fille avait un comportement tel que, selon eux, continuer à l’accepter au sein de leur foyer ne pouvait que détruire toute la famille. Le père a donc décidé que, lorsqu’elle rentrerait à la maison ce soir-là, il mettrait les choses au point : soit elle s’engageait à faire certaines choses, soit elle quittait la maison le lendemain. Sur ce, il s’est assis et l’a attendue. En l’attendant, il décida de faire une liste de ce qu’elle devait changer si elle voulait rester. Lorsque la liste fut terminée, il éprouva un sentiment que seules les personnes qui ont traversé une pareille épreuve peuvent connaître.
« La mort dans l’âme, tout en l’attendant, il retourna la feuille. Au verso, il se mit à énumérer ce qu’il était prêt à changer si elle s’engageait à changer de son côté. Il fondit en larmes lorsqu’il se rendit compte que sa liste était plus longue que celle de sa fille. Toujours dans cet état d’esprit, il accueillit sa fille humblement lorsqu’elle rentra à la maison et entama avec elle une longue discussion en commençant par sa propre liste. Son choix de commencer par cette liste a fait toute la différence. Il a agi de l’intérieur vers l’extérieur [21] ».
Nous pourrions déduire de ces différents propos l’importance de notre responsabilité. Je le résumerai en trois formules. La première est générale : « Je suis 100 % responsable de moi-même », de ma vie. qui se décline en deux sous-formules : « Je suis 100 % responsable de mon bonheur » ; « Je suis 100 % responsable de mon malheur ».
Je ne suis pas responsable de tout ce qui m’arrive (le déraillement du train où je me trouve, ce que devient celui-celle que j’aime), mais de ce que j’en fais.
Et le Bon Dieu ? « Ma vie, nul ne la prend, mais c’est moi qui la donne ». Jésus qui obéit à son Père est aussi celui qui prend pleinement ses décisions.
Pascal Ide
[1] Thomas Merton, Semences de contemplation, trad. Marie Tadié, Paris, Seuil, 1963, p. 70. C’est moi qui souligne.
[2] Marcel Proust, À la recherche du temps perdu, ‘Bibliothèque de la Pléiade », Paris, Gallimard, 1987, tome II, p. 713.
[3] Le Monde du mardi 11 octobre 1994, p. 2.
[4] Elle-même dit à Cornelius : « a-t-on jamais entendu parler d’une sorcière qui mourrait réellement ? » (Le prince Caspian, p. 216)
[5] Elle a fini par disparaître. Pour être autre que la Sorcière Blanche, celle du Monde-Souterrain (cf. Le fauteuil d’argent) n’en est-elle pas le prolongement ? Avec les mêmes intentions de domination radicale de Narnia, elle fait preuve d’une finesse d’argumentation et de séduction qu’ignoraient ses consœurs, plus habituées à déployer la puissance physique et susciter la terreur.
[6] Si la Reine peut exercer un tel pouvoir sur l’oncle Andrew, cela tient sans doute à sa beauté, mais d’abord, car il est « plus vaniteux qu’un paon » (Le Neveu du magicien, p. 89).
[7] Tel est ausi le cas du singe Shift qui déclare vouloir le bien des animaux parlants… qu’ils le veuillent ou non : « Nous voulons être libres », dit un vieil ours. Shift réplique : « Qu’est-ce que tu connais de la liberté ? Tu crois que la liberté, c’est de faire ce que tu veux ? […] La vraie liberté, c’est de faire ce que je vous dis de faire ». (La dernière bataille, p. 42)
[8] « Elle s’est corrompue, et plus le temps passe, plus son malheur augmente ». (Le Neveu du magicien, p. 199)
[9] C’est ainsi que la Reine va un moment trop loin dans son hypocrisie et commet « une erreur fatale » (Le Neveu du magicien, p. 186).
[10] L’armoire magique, p. 59.
[11] Cf. la description de cette escalade dans le mal in L’armoire magique, p. 118-125.
[12] Sermons preached on Various Occasions, p. 64. Souligné dans le texte.
[13] Certain Difficulties felt by Anglicans in Catholic Teaching, II, p. 250.
[14] Sermons preached on Various Occasions, p. 67.
[15] Idea of University, p. 514.
[16] Idea of University, p. 191.
[17] Callista. A Tale of the Third Century, p. 314.
[18] Idea of University, p. 514.
[19] Stephen Covey, Les sept habitudes des familles épanouies, trad. Anne Carole Grillot et adapt. Gabriel Joseph-Dezaize, Paris, éd. F1rst, 1998, p. 89.
[20] Ibid., p. 48.
[21] Ibid., p. 63. Souligné dans le texte.