Ponette, drame français de Jacques Doillon, 1996. Avec Victoire Thivisol, Matiaz Bureau Caton, Delphine Schiltz.
Thèmes
Mort, famille.
Ponette (Victoire Thivisol), 4 ans, veut revoir sa maman qui est morte. Les adultes tentent de lui faire comprendre que c’est impossible. Mais, comme toutes les héroïnes de Doillon, Ponette s’accroche, parle sans relâche.
Le film se déroule sur une très courte durée puisque Ponette ne cesse de porter son plâtre, et on sait combien les os se ressoudent rapidement chez les jeunes enfants. Or, en si peu de temps, le travail de deuil ne peut s’accomplir, la souffrance se dire ni l’espérance refleurir. Plus encore, un enfant de 4 ans ne sait pas ce qu’est la mort.
Mais son ardeur à réclamer sa mère est proportionnelle à son incapacité à penser la mort.
Jacques Doillon dit dans une interview que si les enfants de 5-6 ans « savent très bien ce qu’est la mort », « ils l’ignorent » lorsqu’ils ont 3 ans et demi et « 4 ans maximum ». Ainsi s’expliquerait la réaction de Ponette à la mort de sa maman (« Elle va revenir par le miroir magique ») et son peu d’étonnement lorsqu’elle la voit apparaître à la fin. Mais est-ce bien sûr ? Pour choisir un exemple parmi beaucoup, dans un chapitre entier de son bel ouvrage L’enfant capable de Dieu (Développement psychologique, éveil spirituel avant trois ans, Paris, Fayard, 1988, p. 187 à 220), Rose-Marie de Casabianca montre le sens aigu qu’a l’enfant de la mort et montre quelles sont les attitudes qu’il adopte.
On regrettera ce monde d’adultes dont l’image est aussi tronquée (les cadrages s’arrêtent souvent à mi-tronc) que leur parole est coupée ou plutôt coupe celle de l’enfant. Je ne parle pas du père absent (psychologiquement autant que physiquement) et narcissique, voire accusateur (« T’es malade »). Peu savent écouter l’enfant (même la douce jeune fille), peu comprennent (« C’est pas fini ces bavardages ? »), plus rares, voire inexistants ceux qui sont toute attention, sans juger (même la tante pleure lorsqu’elle voit toutes ses tentatives patientes échouer : sa tristesse n’est-elle pas mêlée de retour sur elle-même ?).
Du moins ce monde permet d’accentuer l’importance des relations très riches entre enfants, notamment avec les deux cousins, Delphine, la cousine (Delphine Schlitz) et Mathias (Mathias Bureau Caton).
Or, c’est ce que permet la mère : elle ne fait pas trop fuir l’enfant vers l’imaginaire. Surtout elle l’assure de sa présence. En effet, trop vite se séparer, refuser de parler d’elle, c’est faire croire à l’enfant que l’on va oublier la maman, c’est courir le risque qu’on lui vole sa mémoire. Or, la mère justement lui garantit cette présence, et la réminiscence. En regard, autour d’elle, depuis le début, même chez Delphine et Mathias, on ne cesse de lui répéter : « Ta maman ne peut pas revenir. » Il est normal qu’elle ne veuille pas jouer avec les autres enfants.
Quel est le sens de la scène finale où revient la mère (Marie Trintignant) ? Relève-t-elle de la pensée magique, comme le « Talita Koumi » (« Petite fille, lève-toi »), répété, les bras en croix ? Peut-il y avoir un effet pervers à trop vite parler de Jésus, de la Résurrection chez un enfant porté au magique.
Souvent la parole religieuse des adultes est aussi juste théologiquement qu’elle sonne faux affectivement.
Pascal Ide
Ponette a 4 ans lorsque sa mère meurt accidentellement. Confiée à sa tante, la fillette ne supporte pas cette disparition. Elle continue obstinément de s’adresser à elle, convaincue qu’elle reviendra un jour.