Le care : une nouvelle approche de la sollicitude ? (recension)

PARMENTIER F., Le care : une nouvelle approche de la sollicitude ?, Coll Confrontations, Paris – Perpignan Lethielleux, 2017. Parue dans la Nouvelle Revue Théologique (NRT) 140 (2018) n° 3, p. 499-500. Le titre dit, mieux que le sous-titre, l’objet de ce collectif dirigé par la présidente de Confrontations : ce mouvement philosophique, théorique autant que pratique, éthique autant que politique, qu’est le care. Son originalité à l’égard des autres ouvrages déjà parus en français sur ce sujet est d’avoir donné la parole à différents organismes chrétiens qui travaillent au soin du plus vulnérable, comme la communauté de l’Arche, ATD Quart Monde, les Petits frères des pauvres, la société Saint-Vincent de Paul. Ainsi, les exposés théoriques (1re et 4e parties) sont croisés avec des pratiques d’hier et d’aujourd’hui (2e et 3e parties).

L’éthique du care (souvent traduite par éthique de la sollicitude) est un courant de pensée qui est apparu dans les années 1980 aux Etats-Unis, dans le sillage des études féministes, avec l’ouvrage de Carol Gilligan, Une voix différente (1982). Son intention était d’opérer un double déplacement – de l’autonomie à la vulnérabilité, de la justice au soin – et, ce faisant, de plaider pour une conception plus féminine de l’éthique. La philosophe Joan Tronto élargit cette approche éthique du care à la politique de la précarité dans son ouvrage de 1993, Un monde vulnérable. Pour une politique du care. Face à une réception encore timide de ce mouvement en France (en philosophie, en politique et dans les milieux chrétiens), ce collectif se propose de le désenclaver d’une approche encore trop perçue comme féministe et n’hésite pas à l’évaluer à la lumière de l’Evangile.

L’indéniable intérêt de cette perspective éthique tient notamment à la place accordée à la réceptivité (le besoin, comme lieu moral), donc à la vulnérabilité, et au don de soi sous la forme concrète du service. Son défi encore à relever est la juste articulation à opérer avec une autonomie qui ne soit pas dévaluée, ce qui ne pourra se faire qu’en réenracinant l’éthique dans l’anthropologie, donc en bravant la rupture kantienne de la raison pure et de la raison pratique.

Pascal Ide

19.8.2021
 

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