Cours de Psychologie Chapitre 2 L’histoire. Les âges de la vie 2/5

C) Des histoires globales de la psychè humaine. Quelques exemples

1) Les étapes de la psychè humaine selon Sigmund Freud

Nous les étudierons dans le chapitre consacré à la psychanalyse.

2) Les étapes du changement selon Carl-Gustav Jung

Les étapes du changement selon Jung [1] sont au nombre de cinq. Le principe de distinction est ici la vérité, c’est-à-dire l’adéquation entre la personne et son masque, entre ce que je suis en soi, quoad se, et ce que je suis pour les autres, quoad nos

  1. L’accommodation. Cette phase équivaut à la dépendance. L’enfant vit en fonction des attentes des autres sur lui, de sorte que sa personne est pour une part un personnage.
  2. La prise de conscience du décalage ou hiatus qu’est l’accommodation. Le personnage nous apparaît alors comme un imposteur, ce que Jung appelle notre « ombre ».
  3. Le face-à-face. Autre le moment de la prise de conscience, autre celui de la remise en question. Ce doute peut ébranler toute l’existence. Quoi qu’il en soit, cette crise s’accompagne d’une tristesse et d’un deuil de cette inadéquation, de ce personnage.
  4. Le début de l’intégration. Progressivement, le personnage laisse place à la personne. Autrement dit, au besoin d’approbation, de reconnaissance succède le besoin de cohérence, de ne plus se trahir, d’exprimer noter potentiel. Cette phase d’élaboration s’accompagne encore de heurts, de dérapages.
  5. L’intégration achevée ou individuation. Ici, l’adéquation avec soi se fait dans la souplesse adaptée à l’environnement et dans le consentement paisible à nos paradoxes et nos vulnérabilités.

Pour ma part, j’ajouterais la communion, ce que certains appellent l’intégrité.

3) Les cycles de l’identité fondamentales selon Pamela Levin

On retrouve la notion de rythmes dans le livre de de Pamela Levin, Les cycles de l’identité, qui définit six étapes fondamentales de croissance et développement, étapes qui se déroulent jusqu’à 19 ans puis qui nous guident tout le long de notre vie.

Pour Levin l’homme, en suivant une évolution cyclique, exécute simplement les tâches de développement qui lui permettent de se réaliser, d’atteindre ses objectifs.

 

« Chacun de nous possède une « horloge » de développement qui nous fournit le plan de base de notre existence. Les étapes du cycle marquent les différentes phases de notre vie tout comme les heures d’une pendule indiquent les divisions de la journée. Le cycle de vie, depuis la naissance jusqu’à dix neuf ans se renouvelle dans un ordre immuable, mais de durée variable ».

a) Exister (de la naissance à six mois)

La tâche du nourrisson consiste à exister. Son travail se résume à toucher et accepter les soins qu’on lui donne. S’occuper de lui avec tendresse, le toucher, le tenir, le laver, le nourrir, le dorloter, lui parler, le prendre dans les bras, fortifie le pouvoir d’être. Lui offrir attention, amour, crée un sentiment de confiance. Les contacts tendres, sécurisants, gais, sensuels déclenchent la première prise de conscience de son existence ainsi que les liens émotionnels qu’il tisse avec autrui. Ses cris, ses pleurs nous font savoir qu’il a besoin de quelque chose, de réponses immédiates, de protection.

Pendant cette période, le bébé est en symbiose, il ne fait pas la différence entre ce qui est à lui ou à maman.

Dans cette étape, phase de sensations, le bébé vers les six mois, est dans le stade du miroir.

En psychanalyse (Freud), cette étape correspond à l’oral primitif et en analyse transactionnelle (Berne), à l’attachement.

b) Faire (de six à dix huit mois)

La tâche essentielle du bébé plus âgé est de faire. Il doit explorer avec ses sens le monde qui l’entoure

À cette époque, il teste l’attachement, a besoin de partir et de revenir ; il suit ses impulsions, s’oppose à sa mère, a envie de prendre, d’avoir sa place : c’est l’étape de l’individuation. Il est capable de prendre des initiatives : s’asseoir, ramper, marcher, parler. Pour tirer profil de cette phase, il explore l’environnement, libre de circuler à travers le monde, de satisfaire sa curiosité et son appétit sensoriel grandissant (incorporation des objets). Il développe aussi le sixième sens, la sensibilité kinesthésique, qui lui permet de bouger, de ressentir ses mouvements, d’établir le contact avec le sol, de sentir la terre.

À cet âge, c’est le stade du langage. Il y a pathologie, si au delà de deux ans, l’enfant ne parle pas. Le nourrisson, avant d’acquérir une pensée logique et conceptuelle, a besoin et profite de toute la richesse sensorielle.

En psychanalyse, cette étape est analogue à l’oral exploratoire et en analyse transactionnelle, à l’attachement.

c) Penser (de dix huit mois à trois ans)

Chez les touts petits, la tâche principale est d’apprendre à penser. Ils doivent affiner leur individualité en se confrontant et en se heurtant aux autres. C’est à ce moment que se met en place un nouvel État du Moi, débordant d’énergie.
L’enfant expérimente l’expérience : il est capable d’établir le lien entre la cloque qui se forme sur le doigt, le mot chaud et le brûleur de la cuisinière.
C’est l’époque des exigences, des crises de rage, du « non », il affirme sa séparation. Il passe par une phase oscillée entre la soumission et la rébellion, qui s’accompagne de sentiments de colère (période des larmes). C’est une colère dite colère de séparation permettant de briser la relation de dépendance. Il faut la différencier de la colère née de désirs insatisfaits (le bébé qui pleure de faim devient furieux si on ne le nourrit pas) et de la colère paranoïde qui sert à masquer la peur (nous avons besoin de nous sentir en sécurité).
Il affirme son indépendance : il acquiert des gestes qui lui donnent la liberté de faire et créent un sentiment d’autonomie (il lâche la main de maman). C’est la période des pourquoi permettant de traduire la réalité et la formulation de questions concernant le temps.
Il découvre ses limites, c’est à dire des expériences qui déterminent les frontières du comportement acceptable et de la sécurité : l’indépendance constitue une menace, une victoire ou quelque chose à mi-chemin entre les deux.

Il développe sa capacité de penser en découvrant qu’il peut être indépendant tout en conservant l’amour des autres. Pour l’entourage, c’est une période très fatigante.

En psychanalyse, cette étape correspond au stade anal et en analyse transactionnelle, à la séparation.

d) Identité (de trois à six ans)

L’essentiel du travail de l’enfant d’âge scolaire est de découvrir son identité. Il a pour tâche d’affirmer qui il est au sein d’un réseau de relations sociales. Il a besoin de chercher et de découvrir qui il est : « qui suis-je » (fille ou garçon). C’est la phase d’identification dans laquelle il teste son pouvoir, il grappille quelques minutes sur l’heure accordée (ex : voir un copain, à quelle heure est le goûter).
Il découvre les conséquences de ses actes, de son comportement : il vérifie si les interdits sont accordés, par exemple, en présence de grand-mère qui lui rend visite.
Il est vraiment séparé de sa mère, n’est pas obligé d’être malade, triste pour qu’elle s’occupe de lui.
Il apprend à créer sa propre version du monde, en manipulant ses parents, en observant l’influence qu’il exerce sur eux, en particulier lorsqu’il incorpore une troisième personne dans son jeu.
Il vérifie ce qu’est la réalité, distingue l’imaginaire du réel. Il faut adapter l’éducation à l’enfant qui, entre quatre et sept ans, a un besoin important de jouer.

En fin d’étape, l’enfant met en place un scénario que l’on retrouve tout au long de son vécu. Le scénario est l’attitude que l’on prend pour échapper à une situation, d’un milieu qui nous dérange (quelqu’un sonne : « excusez-moi, je suis occupé » ou au téléphone : « excusez-moi, j’ai quelqu’un à la porte).

En psychanalyse, cette étape correspond au stade génital, phallique et en analyse transactionnelle, l’autonomie.

e) Structure : pouvoir de réussir (de six à douze ans)

L’enfant a pour tâche d’acquérir des compétences. Il doit développer de nouvelles aptitudes et élaborer son propre système de valeurs pour survivre de manière autonome.
Il expérimente son savoir personnel en commettant des erreurs pour découvrir comment les choses fonctionnent.
Il discute, conteste et exprime son désaccord pour s’emparer d’une partie des valeurs d’autrui pour les faire siennes. Il renforce sa propre dynamique.
Il s’intéresse à la sexualité, apprend les normes, les lois du monde dans lequel il est. Pour les parents, c’est un temps de repos. Le pouvoir de réussir se développe dans la famille et dans la culture.
Le comportement d’exclusion (inciter les autres à créer des structures et en même temps, nous protéger contre elles) est essentiel à l’élaboration d’une structure.

En psychanalyse, ce stade correspond à l’étape de latence et en analyse transactionnelle, la décision.

f) Socialisation (de treize à plus ou moins dix-neuf ans)

La tâche essentielle des adolescents est de donner une unité à sa personnalité.
Il doit vivre en tant qu’individu doté d’une sexualité et se développer comme quelqu’un ayant une vie sexuelle réelle. Pour l’adolescent, c’est bien de prendre place parmi les adultes. Il va où il veut et fait ce qu’il veut.
Il possède déjà tous les éléments de sa personnalité, retourne en arrière et bénéficie d’une nouvelle occasion de développer les étapes antérieures qu’il retraverse brièvement.
Il ressent le besoin d’unifier sa personnalité : c’est l’étape de l’unification. Grâce aux tâches qu’il réalise dans cette phase d’automatismes, il subit une réforme morale totale.
Il dépasse la relation qu’il a avec ses parents, crée son propre système de soutien indépendant qu’il affirme (avoir une profession, envie de fonder une famille et assumer des responsabilités sociales): c’est l’étape de l’humanisation.

D’après la culture sociale et religieuse qu’on lui a inculqué, il développe sa philosophie personnelle.

En psychanalyse, ce stade correspond à la puberté et en analyse transactionnelle, la socialisation.

Ce cycle complet de la vie constitue maintenant sa zone de pouvoir dans lequel il peut concrétiser son rêve d’avenir. C’est à lui de décider de ce qu’il fera, de réaliser son propre potentiel de croissance.

Pascal Ide

[1] Selon la systématisation de Christophe Fauré, Maintenant ou jamais !, Paris, Albin Michel, 2011.

21.1.2022
 

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