Esquisse d’une dogmatique, trad. F. Ryser et É. Mauris, intr. H.-C. Askani et C. Chalamet
Karl Barth
Théologie – Recenseur : Pascal Ide
En 1935, en raison de son refus de prêter serment à Hitler, Karl Barth est contraint de quitter la ville et l’université de Bonn où, pendant 49 semestres, il a donné cours. En 1946, il reçoit une invitation à donner un nouveau semestre dans la ville de Bonn. Soucieux de la guérison de l’Allemagne en ruines et cherchant à contribuer à la réconciliation, il accepte de revenir et dira de ce cinquantième semestre qu’il fut « le plus beau ». Comme à Utrecht en fév.-mars 1935, il prend pour objet le Symbole des Apôtres. Les notes sténographiées de ses 24 leçons furent publiées en Suisse sous le titre Dogmatik im Grundriss (Zollikon – Zürich, Evangelischer Verlag, 1947). Trois ans plus tard, la trad. paraît en français sous le titre Esquisse d’une dogmatique. Elle fut rééditée avec une brève préface de Pierre Gisel en 1984. Cette nouvelle publication n’a pas repris cette préface, mais est précédée d’une introd. plus ample de H.-C. Askani et C. Chalamet (p. 7-12).
Dans cette Esquisse, le théologien réformé propose comme un condensé de sa dogmatique (qui compte 6 millions de mots !) et ainsi d’offrir les principales clés pour entrer dans sa pensée théologique. Celle-ci est d’un côté commandée par le préambule : « Je crois », de l’autre toute centrée sur l’unique seigneurie du Christ. Tous les articles du Symbole sont à lire à partir du deuxième : la christologie est « le critère de toute théologie » (p. 101).
L’originalité du propos tient davantage à sa forme : alors que Barth lisait ses cours, ici il parle et son style n’a plus la pesanteur répétitive de la Kirchliche Dogmatik. Surtout, l’intention n’est pas la même. Barth se veut être « une sorte de missionnaire, de maître d’école du dimanche, d’orateur populaire, d’ami des hommes » (Lettre du 24 mai 1946). Ce ne sont donc pas seulement la facilité (relative) et la brièveté qui expliquent le grand succès de cette œuvre heureusement rééditée, c’est son sens du kairos dramatique de l’histoire dans laquelle elle s’inscrit : « La dogmatique ne peut remplir son rôle qu’en demeurant liée aux circonstances actuelles de l’Église » (p. 16). Faut-il le préciser ?, elle n’a rien perdu de sa brûlante actualité et de sa hauteur de vue. – P. Ide