« Il y a des êtres qui ne sont qu’eux et il y en a d’autres qui sont eux et les autres, et cela, ce sont les connaissants [1] ».
Ainsi, « le problème est de savoir comment un être est à la foi lui et l’autre [2] ».
A) Le réalisme absolu
1) Thèse
Cette thèse est l’exact opposé de celle soutenue par l’idéalisme. Ici, l’homme connaît la réalité telle qu’elle est en tout ce qu’elle est. Nous pouvons prendre du réel une connaissance complète et exhaustive, de sorte que nous lui soyons totalement adéquat.
Telle fut, à l’époque antique, la position de Platon et, à l’époque médiévale, celle de GuIllaume de Champeaux [3]. Nous nous limiterons à l’exposé de la première.
2) Exposé chez Platon
Pour un exposé, je renvoie au cours d’histoire d’histoire de la philosophie antique ou le chapitre que le cours de métaphysique consacre à Platon. Aristote offre un bref exposé de son réalisme absolu dans le premier livre de sa Métaphysique. Par souci de clarté, nous diviserons le texte comme suit [4] :
a) Le monde sensible
« Platon, dans sa jeunesse, s’était habitué aux doctrines d’Héraclite qu’il avait reçues par Cratyle. Sous cette influence de la pensée d’Héraclite, il tenait que toutes les choses sensibles sont en un flux perpétuel, tel qu’il ne peut pas y avoir de science de tels objets. Il demeura par la suite fidèle à cette doctrine ».
Autrement dit, on ne pourrait rien trouver dans le monde sensible qui soit immuable et un ; les objets d’intelligence immuables et uns ne pourraient pas être tirés du monde sensible et correspondre vraiment à quelque chose du monde sensible.
b) Le monde des Idées
1’) Constatation de base : il existe de l’universel
Or, si cet abandon total du monde sensible à la mutabilité, à la pure multiplicité n’a pas empêché Platon de chercher des objets intelligibles et de les tenir pour suprêmes réalités, c’est qu’il avait été formé ensuite par Socrate à chercher des définitions dans le domaine des choses morales :
« D’un autre côté, poursuit Aristote, Socrate, dont les préoccupations portaient sur les choses morales, et nullement sur la Nature dans son ensemble, avait pourtant, dans ce domaine, cherché l’universel, et fixé le premier, la pensée sur les définitions. Platon accepta son enseignement ».
En effet, pour fuir le physicisme, Socrate s’était détourné du monde de la nature et s’était appliqué uniquement à l’intelligibilité du monde moral. Platon voit bien la valeur de tout ce que Socrate tient dans les définitions ; par exemple, dans les définitions des vertus auxquelles il arrive.
2’) Conclusion : existence des Idées
Aristote joint le double enseignement d’Héraclite (via Cratyle) et de Socrate :
« Mais sa formation première (de Platon) l’amena à penser que cet universel devait exister dans des réalités d’un autre ordre que les choses sensibles : il est impossible, en effet, croyait-il, que la définition commune existe dans aucun des objets sensibles individuels, de ceux du moins qui sont en perpétuel changement ».
Le Stagirite en conclut d’abord que, du moment qu’on abandonne le monde sensible à la simple opinion, on peut, au delà du monde sensible, trouver des objets d’intelligence de haute valeur. Puis il étend cela à des objets proprement métaphysiques, même si sa pensée demeure toujours marquée fortement, profondément de considérations morales.
3’) Nom de ces réalités supra-sensibles
« Guidé par ses raisons, il donna alors à de telles réalités le nom d’Idées, disant, d’autre part, que les choses sensibles sont séparées des Idées et sont toutes dénommées d’après elles ».
Les objets d’intelligence étaient appelés par Platon : Idées. Il y a deux termes grecs qui correspondent à notre terme « idée », deux termes qui sont employés, semble-t-il, indifféremment par Platon : idea et eidos. Les deux termes sont du reste de même origine : ils se rattachent au grand terme sanscrit véda qui a donné en latin video (« je vois »). Et cette racine signifie vision, connaissance. Les idées, pour Platon, sont donc les objets de connaissance par excellence.
c) Relation entre ces deux mondes. La participation
1’) Existence
« C’est, en effet, par participation qu’existe la pluralité sensible, univoque à l’égard des Idées. Quant à cette participation, Platon ne modifiait que le nom : les Pythagoriciens, en effet, disent que les êtres existent par imitation des nombres ; pour Platon, c’est par une participation, le mot seul est changé ».
Platon ne coupe pas totalement le monde sensible du monde des Idées. Il pense que les objets sensibles participent d’une certaine façon des Idées, qu’elles existent par cette participation et que c’est la raison pour laquelle elles peuvent être dénommées par nous de certains noms. Par exemple, les différents hommes de l’expérience sensible participent de l’homme idéal, tiennent quelque chose de l’homme idéal. C’est parce qu’ils tiennent quelque chose de l’homme idéal qu’ils sont dignes d’exister. Ils méritent d’exister pour autant qu’ils sont une certaine similitude de l’homme idéal ; et c’est parce qu’ils participent ainsi de l’homme idéal que nous pouvons les appeler hommes.
Chez Platon, le nom commun n’est donc pas comme chez les nominalistes un son sans fondement véritable dans les choses et appliqué aux choses pour des raisons de commodité, de grossière classification, pour des raisons pratiques… Homme, cela tient, pour Platon, à ce que les hommes de l’expérience sensible ont quelque chose de l’homme défini comme tel, de l’homme-idée, de la définition de l’homme.
2’) Nature
Mais cette participation-là, Platon est incapable de la clarifier, et c’est le point faible de son système. Il affirme qu’il y a un rapport entre les objets des sens et les objets de l’intelligence, mais il n’est pas capable de voir exactement où est ce rapport.
« Toutefois cette participation ou imitation des Idées, quelle en peut être la nature : c’est là une recherche qu’ils ont laissée dans l’indécision ».
d) Monde intermédiaire : les êtres mathématiques
Platon, nous l’avons vu dans l’introduction en traitant des « degrés » d’abstraction, posait un degré d’être intermédiaire entre les choses sensibles et les Idées.
« De plus, outre les choses sensibles et les Idées, Platon admet qu’il existe les Choses mathématiques, qui sont des réalités intermédiaires, différentes, d’une part, des objets sensibles, en ce qu’elles sont éternelles et immobiles, et, d’autre part, des Idées, en ce qu’elles sont une pluralité d’exemplaires semblables, tandis que l’Idée est en elle-même uen réalité une, individuelle et singulière ».
3) Évaluation critique
C’est d’évidence, d’expérience journalière, commune. Mais attention, comprenons bien la pointe de la réponse : il ne s’agit plus de dire que nous pouvons avoir une connaissance du réel total (c’est ce qu’avançait le dogmatisme absolu), mais seulement qu’il est impossible d’avoir une connaissance totalisante de ce réel. Or, nous ne connaissons le tout de rien, même de l’homme qui est pourtant le sujet qui nous est le plus proportionné (et même le seul être réel dont nous puissions donner une définition) et sur lequel se sont multipliées les études les plus nombreuses et les plus profondes. Redisons-le, la philosophie balthasarienne de la vérité nous semble un bon contre-poison et surtout une adroite manière de situer le réalisme, sans tomber dans le réductionnisme perspectiviste de l’herméneutique.
Il suffit en fait de reprendre ce qu’il y a de recevable dans l’herméneutique, l’idéalisme ou le culturalisme (le relativisme culturel). D’ailleurs, soyons réalistes (au sens commun, non philosophique du terme !) : ce réalisme n’est plus guère soutenu aujourd’hui, que par quelques gnoses. Mais pour autant la position inverse (l’idéalisme) n’a pas gain de cause.
a) La tension irrésorbable sujet-objet
Le professeur Guy Avanzini, professeur émérite de Lyon-2, spécialiste d’histoire de la pédagogie, me disait en novembre 2000 qu’aujourd’hui, nous sommes pris entre deux hypothèses, au sein des chercheurs en éducation. Plus globalement, nous assistons à une dispute entre pédagogie et psychologie. D’un côté, la tendance pédagogique prône une démarche prescriptive, et donc parfois coercitive, alors que, de l’autre, la tendance psychologique, préfère une démarche psychologique, privilégiant la compréhension. Plus précisément, au sein même de la pédagogie, le conflit est le suivant : ou valoriser les savoirs ; ou valoriser les méthodes (c’est-à-dire les manières d’accéder au savoir et qui semblent être le requisit préliminaire). Il semble que les démarches plus psychologiques et méthodologiques l’emportent, non sans diviser les partisans qui pourront adopter un discours psychologique tout en étant parfois coercitif et d’ailleurs culpabiliser de l’être.
Au fond, il y a là une tension irrésorbable, car elle s’inscrit dans la structure même de l’acte pédagogique et la connaissance elle-même, donc son acquisition. En effet, le savoir comporte un pôle subjectif (apprenant) et un pôle objectif (l’appris). Et cette tension est aussi féconde, pour peu que les extrémistes s’ouvrent aux positions opposées et cherchent une synthèse sans doute impossible.
b) Évaluation critique de la pensée de Platon
Platon a donc exposé deux grandes vérités. Il a affirmé fortement une différence immense entre les objets d’intelligence et les objets des sens. D’autre part, il a reconnu que le monde sensible tient d’une certaine manière ce qu’il est du monde intelligible, que le monde sensible existe par participation du monde de l’esprit ; aussi quand nous nommons les choses sensibles, nous y retrouvons quelque chose du monde de l’esprit.
Rien que ces deux vérités-là, au point d’élaboration où elles sont chez Platon – qui n’est pas parfait –, suffisent pour que celui qui les a données clairement à l’humanité soit un des génies auxquels elle doit le plus.
Il demeure que, sur la différence et les rapports entre objets des sens et objets d’intelligence, la pensée platonicienne doit être complétée, parachevée par la doctrine de l’abstraction.
C’est Aristote qui a complété et mis au point la doctrine de la distinction et des relations existant entre les objets des sens et les objets de l’intelligence [5]. La critique (qui est pour une bonne part une réfutation de la théorie des Idées et des Choses mathématiques) est minutieuse, du genre rouleau-compresseur ! Les platoniciens la jugent injuste…
B) Le réalisme modéré. La théorie aristotélico-thomiste de la connaissance
1) Introduction
Gilson nous avertit avec sa clarté coutumièe : « Hors du réalisme naturel de l’aristotélisme classique il n’y a que des réalismes invertis [6] ». Or, ce « réalisme naturel » que nous allons exposer et défendre est aussi ce que nous avons appelé le réalisme modéré. Il tient que nous connaissons bien les choses telles qu’elles sont en elles-mêmes (et cela, contre l’idéalisme), mais nous ne connaissons pas le tout de la chose en soi, seuls certains aspects nous sont accessibles (et cela, contre le réalisme absolu).
Que l’apparent équilibre de notre thèse entre les deux erreurs extrêmes de l’idéalisme et du réalisme absolu ne trompe pas. Pas plus que dans la première partie, notre position ne prône le juste milieu. Mais, comme le nom même de réalisme modéré le laisse entendre, nous sommes plus proche du réalisme absolu que de l’idéalisme (à l’instar du dogmatisme modéré qui penche davantage du côté du dogmatisme absolu que du scepticisme).
Pour aborder le contenu de cette question, je voudrais inviter et même plus, exhorter le lecteur à l’étonnement. Le dynamisme cognitif, la connaissance est une des réalités à la fois les plus banales (puisque nous passons notre temps à l’exercer – et c’est pour cela qu’elle passe inaperçue) et l’une des plus profondes, des plus étonnantes qui soient. Comme le notait Maurice Merleau-Ponty à la suite de Husserl :
« La meilleure formule de la réduction [husserlienne] est sans doute celle qu’en donnait Eugen Fink, l’assistant de Husserl, quand il parlait d’un ‘étonnement’ devant le monde. […] Le transcendantal de Husserl n’est pas celui de Kant, et Husserl reproche à la philosophie kantienne d’être une philosophie ‘mondaine’ parce qu’elle utilise notre rapport au monde, qui est le moteur de la déduction transcendantale, et fait le monde immanent au sujet, au lieu de s’en étonner et de concevoir le sujet comme transcendance vers le monde [7] ».
Sans retour au thaumadzein de l’enfant, le dynamisme de la connaissance et le réalisme qui en est la conséquence immédiate ne pourra jamais vous apparaître sans risque réducteur.
Notons enfin que l’intérêt d’une saine doctrine de la connaissance présente aussi une portée extra-philosophique, voire pratique : dans le débat autour de l’intelligence artificielle (une machine est-elle intelligente ?) ou des neurosciences (le cerveau pense-t-il ?), seul le réalisme cognitif est à même de répondre pleinement aux questions posées et de saisir le véritable enjeu.
2) Une approche poético-philosophique (Pierre-Marie Émonet)
Le dominicain suisse Pierre-Marie Émonet offre une première approche, aussi profonde que poétique, de l’acte de connaître.
a) « Pour quelle in l’âme humaine compose-t-elle le corps qu’elle a ? » (Chapitre ii)
« Floraison de mon être en la fleur de tout ce qui est » (Jacques Maritain)
« Si l’âme humaine se donne le corps qu’elle a, c’est non seulement pour naître à soi-même, mais encore pour naître à tout ce qui est, par l’entrée en elle de toutes choses. D’autre part aussi, par ce même corps, laisser l’âme sortir de soi vers les choses leur donnant son amour. Connaissance et amour, voilà pourquoi l’âme humaine se donne ses organes et les tient ensemble, c’est sa raison d’être ultime.
« Commençons tout de suite à parler de la première finalité de l’âme humaine : la connaissance.
« L’âme humaine se fait pousser des organes en vue de naître deux fois. Une sentence d’Aristote célèbre justement l’ampleur infinie de l’âme de l’homme : ‘L’âme, en connaissant, est d’une certaine façon toutes choses [8]‘. Ce qu’Héraclite disait : jamais on n’atteindra les frontières de l’âme, Aristote l’explique ainsi : par la connaissance, l’âme humaine est capable de contenir en elle tout ce qui est.
« Avoir cette intuition suppose qu’on a réalisé ce qui est évident : les organes des sens qui constituent son corps, l’âme les ordonne à la connaissance. Est-il besoin de le prouver ? L’œil, l’oreille, le nez, la bouche sont autant d’instruments susceptibles de capter les qualités des choses, et de le faire entrer en elle. Ce n’est pas, en effet, pour le seul but biologique que s’exercent ces organes et leurs facultés. Ce n’est pas uniquement pour les manger et les détruire que nous nous intéressons aux choses. Mais aussi et même souvent simplement pour les regarder, les contempler, pour le plaisir de les connaître. Aristote commence la Métaphysique : ‘Tous les hommes ont, par nature, le désir de connaître [9]‘.
« Essayons de dire le mystère de la connaissance. Nous transcrirons ici quelques lignes d’un chartreux qui parlent si profondément de cet acte : ‘connaître c’est simplement être plus, plus pleinement, plus vraiment. Connaître, c’est s’enrichir de l’être même des choses en les laissant être ce qu’elles sont’. Non, connaître, ce n’est ni manger, ni digérer les choses. C’est au contraire les promouvoir en leur communiquant une deuxième existence. Une fois en elles-mêmes, pour elles-mêmes, une deuxième fois pour le connaissant et dans le connaissant.
« On comprend pourquoi les philosophes qui ont le mieux parlé de la connaissance l’ont fait en employant le verbe : être. Connaître, c’est ‘être’ en quelque manière toutes choses, disait Aristote, on l’a vu. Le moine contemplatif que nous avons cité se devait d’exalter le mérite de la connaissance en ces termes : ‘L’intelligence, douceur essentielle, respecte les êtres absolument et se trouve par l hériter de leurs vertus’.
« On a donc raison de relever une analogie entre l’âme des plantes qui compose leurs organes en vue des fleurs, et l’âme humaine qui compose les siens pour ‘fleurir en la fleur de tout ce qui est [10]’. Aristote l’avait déjà fait remarquer : ‘La vision chez l’homme, ne produit aucune œuvre à côté d’elle. La vision, de soi, s’achève dans le voyant, comme la contemplation dans le contemplant [11]’. Comme la plante se parfait en sa fleur ».
b) « La connaissance rassemble toutes les choses dans l’âme » (Chap. iii)
« Saint Augustin, ce génie de l’introspection, s’est interrogé sur ce fait que ce que le connaissant voit en lui, reçoit en lui, ce ne sont pas des images des choses, mais les choses elles-mêmes. Et ce qui l’étonne encore plus, que, sans sortir d’elle-même, l’âme atteigne pourtant les choses elles-mêmes, ‘avec les dimensions que percevaient mes regards au-dehors [12]‘. Avec ces remarques, il allait d’un seul bond, de l’esprit jusqu’au cœur même du mystère de la connaissance. Faute de passer lourdement à côté de ce mystère, il faut affirmer qu’il y a bien pour une seule et unique réalité deux modes différents d’existence. Ces montagnes, ces vagues, ces fleuves existent sans doute hors de ma conscience. C’est pour cela qu’elles reçoivent le nom de ‘choses’. Ce n’est plus un terme banal. Ce que l’on veut signifier, c’est que ces réalités sont pleinement indépendantes de la conscience, et pleinement responsables de ce qu’elles font. Pourtant, ces mêmes montagnes, ces mêmes vagues, ces mêmes fleuves existent aussi et en plus dans la conscience. On les appelle alors des ‘objets’. Ce terme vient du latin : ob, qui veut dire ‘devant’, et jacere, qui veut dire : ‘poser’. Pour être connues, toutes les réalités sont mises ‘dans’ et, en même temps, ‘devant’ la conscience.
« Tel est bien le paradoxe de la connaissance. Pour rejoindre le pouvoir ‘miraculeux’ de cet acte, il faut dire que la réalité de la chose revêt à l’intérieur du connaissant une ‘existence’ d’objet. Voyons dans ce vocabulaire l’humble effort de l’esprit cherchant à décrire au mieux ce qui se passe vraiment dans un tel acte ; Comment dire autrement l’extraordinaire privilège du connaissant de faire ‘exister’ en lui toute la réalité quelle qu’elle soit ! et spontanément c’est bien la réalité en elle-même que nous regardons en nous-mêmes, et non un cahier d’images ! Saint Augustin a raison : ce qui est mis en réserve dans l’âme ce ne sont pas les images des réalités, mais les réalités elles-mêmes. C’est pourtant bien ma mère que je vois, ma mère elle-même en moi, elle qui n’est plus. Je ne vois pas sa photographie.
« En plus de mon existence propre, individuelle, j’existe aussi les choses. Et les choses, en plus de leur existence propre, elles reçoivent encore une existence d’objets. Ensemble, la conscience et les choses ‘sur-existent’. Le contemplatif que nous avons déjà cité exprime si heureusement ce paradoxe : ‘Rien n’est plus évident que ce fait que nous vivons à la fois notre acte et celui d’une quantité illimitée d’objets. Nous nous actualisons en accueillant la réalité objective d’une quantité indéfinie d’actes étrangers’. Cette fois encore nous expliquons la sentence d’Héraclite : ‘Jamais tu ne trouveras les frontières de l’âme’ ! C’est vrai justement à cause de l’acte de la connaissance qui fait de l’âme humaine ‘un sanctuaire d’une ampleur infinie. L’esprit est trop étroit pour s’étreindre lui-même [13]’ [14] ».
C) Topique et description de la connaissance
Cette approche douce, plus descriptive, permet de proposer différentes définitions de la connaissance et les évalue. À chaque pas, nous nous demanderons : qu’est-ce que cette approche dit de la connaissance ? En propose-t-elle une définition adéquate ?
Nous tenterons de graduer ces approches en allant du plus duel au plus unifié.
1) La connaissance comme domination
a) Exposé
Elle peut être interprétée de manières opposées : triomphante, donc positive ; suspicieuse, donc négative. La première est bien entendu caractéristique de l’idéalisme. Dans le discours d’ouverture de l’année académique à l’Université de Berlin le 22 octobre 1818, Hegel affirma :
« Il ne saurait y avoir une trop haute idée de la grandeur et de la puissance de l’esprit ; l’essence invisible de l’univers ne possède en elle aucune force pouvant s’opposer au courage qui veut la connaître ; il faudra qu’elle s’ouvre à lui, qu’elle lui dévoile sa richesse et ses profondeurs, et qu’elle lui en accorde la jouissance [15] ».
A minima, la différence sujet-objet est considérée comme une scission première indépassable. C’est ce que notait Karl Jaspers :
« Ce que nous pensons, ce dont nous parlons, c’est toujours autre chose que nous-mêmes, c’est ce sur quoi nous sommes braqués, nous sujets, comme sur un objet situé en face de nous. Quand, par la pensée, je me prends moi-même pour objet, je deviens autre chose pour moi. En même temps, il est vrai, je suis présent en tant que moi-qui-pense, qui accomplis cette pensée de moi-même ; mais ce moi, je ne peux pas le penser de façon adéquate comme objet, car il est toujours la condition préalable de toute objectivation. Ce trait fondamental de notre vie pensante, nous l’appelons la scission sujet-objet [Subjekt-Objekt-Spaltung] [16] ».
b) Évaluation critique
Ce texte dit combien, dans la connaissance, la rencontre du sujet et de l’objet est celle de deux richesses qui se dévoilent mutuellement. Cependant, l’on ne peut se défaire d’une impression de domination, d’arraisonnement (Heidegger), voire de mise à la torture (Francis Bacon) : l’objet doit se rendre au pouvoir de l’esprit. Hegel souligne la puissance de l’esprit humain face à la réalité extérieure. Son mystère devient tout entier perceptible à la pénétration de l’intellect. Mais peut-on encore parler de mystère ?
Ultimement, une telle conception du savoir ne devient-elle pas pouvoir ? Michel Foucault a longuement déconstruit cette conception, montrant que celui qui sait est aussi celui qui maîtrise. Et le philosophe français l’a surtout appliqué aux savoirs et aux techniques du corps et de la vie, inventant le concept nouveau de biopouvoir.
2) La connaissance comme confrontation
a) Exposé
Toute connaissance est une confrontation avec le réel, mais aussi avec les autres sphères du connaître, voire avec les autres chercheurs. C’est ce qu’atteste aussi la dialectique du chercher et du trouver, explorée par Jean-Louis Chrétien. Il est à noter que la relation peut se concevoir dans les deux sens : la connaissance cause la souffrance ou la souffrance cause la connaissance.
Cette confrontation devient dramatique lorsqu’elle est corrélée à la souffrance. La relation est au cœur de la pensée et du tragique chez les Grecs. Les Grecs aimaient dire que l’« on apprend en souffrant [17] ». Par exemple, le lien entre pathein et mathein est au cœur de la tragédie d’Eschyle, Agamemnon : « Il [Zeus] a ouvert aux hommes la voie de la prudence, en leur donnant pour loi ‘souffrir pour comprendre’ [18] ». Il est dit plus loin : « Ce n’est qu’à celui qui a souffert que la Justice accorde de comprendre [19] ». On retrouve la même vérité dans le mythe d’Œdipe : combien la vérité est difficile et douloureuse à acquérir. Au point même qu’après avoir vu, il se crève les yeux. Plus tard, dans les faubourgs d’Athènes, guidé par Antigone, il rencontre le devin Tirésias et lui dit : « Si tu ne me faisait l’effet d’un bien vieil homme, tu apprendrais par la souffrance [que je t’infligerais] le prix de la malice [20] ». Et les philosophes n’ignorent pas cette thématique, puisque les Cyniques nouent savoir et peine [21].
Une fois n’est pas coutume, cette même vérité se retrouve dans le monde biblique. « Qui accroît la connaissance accroîtra la souffrance » (Si 1,18). Tout Qohélet est sigillé par cette intuition, notamment à propos du rôle de la sagesse face à la douleur de la perte d’un proche (cf. Qo 1,18). La glose du Targum de Qohélet remarque : « l’homme qui a accumulé la sagesse, quand il pèche et ne se repent pas, accroît la colère du Seigneur, et celui qui amasse la connaissance dans sa jeunesse et meurt, accroît la douleur dans le cœur de ses proches [22] ». Et, dans son commentaire sur Qo 1,18, saint Jérôme assigne une cause liée à la difficulté d’accès à la vérité elle-même : « L’homme sage souffre de ce que la sagesse soit si profondément cachée et elle ne se laisse pas voir par l’esprit comme la lumière par le regard, mais elle ne surgit qu’à force de tourments, et de peines insupportables, de méditation continuelle et d’étude [23] ».
Aujourd’hui la psychanalyse retrouve cette intuition : il faut payer (de sa personne, de son argent) pour accéder à la vérité.
b) Évaluation critique
Une telle conception dit quelque chose de l’acte du connaître, non pas de la résistance. Mais elle ne rend pas compte de l’expérience prime du savoir qu’est au contraire sa stupéfiante et bouleversante harmonie. Comment se fait-il que le réel se donne à connaître ?
3) La connaissance comme adaptation
a) Exposé
Nous avons vu en étudiant l’idéalisme, sous la plume de Piaget, la doctrine aujourd’hui très présente en psychologie, influencée par la biologie darwinienne, selon laquelle la connaissance est une adaptation au réel.
b) Évaluation critique
Nous renvoyons à notre évaluation. Rappelons trois critiques parmi d’autres :
Primo, cette caractéristique (l’adaptation à l’environnement) vaut pour d’autres capacités, comme la thermorégulation ou les stratégies de reproduction (les rituels de séduction). Donc, elle n’explicite pas le spécifique de l’acte de connaissance.
Secundo, elle n’honore pas la gratuité de la connaissance.
Tertio, elle se réfère à une conception réductrice et en tout cas non totalisante de la vie.
4) La connaissance comme retrait
a) Exposé
Dans la connaissance, le connaissant accorde toute sa place au connu ; or, expansion et retrait vont en sens contraire. Donc, par la connaissance, le sujet se retire. Le beau nous fait nous oublier : ce peut être une pédagogie pour comprendre l’objectivité du connaître.
Simone Weil dit que la nature de la connaissance est de s’effacer totalement au profit de la vérité. Certes, il y a du volontarisme dans cette attitude. Mais elle parle plus des conditions de préparation à l’acte de connaissance et elle est vraie dans l’état de péché qui est le nôtre. Il faudrait fonder cette intuition dans l’expérience personnelle que fait Simone Weil de l’amour du vrai et l’opposer à celle de Lévinas qui a réservé la transcendance au seul autre. « Les intelligences entièrement, exclusivement abandonnées et vouées à la vérité ne sont utilisables pour aucun être humain, y compris celui dans lequel elles résident… ». Car ce n’est pas moi qui use de mon intelligence, mais « c’est elle qui m’utilise et elle obéit sans réserve – j’espère du moins qu’il en est ainsi – à ce qui lui paraît être la lumière de la vérité… ». Ailleurs notre philosophe écrit : « N’importe quel être humain, même si ses facultés naturelles sont presque nulles, pénètre dans le royaume de la vérité, si seulement il désire la vérité et fait perpétuellement un effort d’attention pour l’atteindre [24] ».
Nous le reverrons, Balthasar exprime ce retrait dans les termes de l’obéissance : cette attitude d’obéissance creuse le connaissant au maximum pour qu’il puisse recevoir le connu.
b) Évaluation critique
Le vrai, c’est la réceptivité : le sujet n’est pas en acte de lui-même. Comment apprendre sans désapprendre ?
Le faux, c’est l’absence de spontanéité. Le retrait n’honore pas assez l’activité du connaître.
5) La connaissance comme unité
Jusqu’ici, nous avons davantage souligner la dualité, c’est-à-dire la divergence à l’œuvre. Considérons maintenant l’unité, c’est-à-dire la convergence à l’œuvre.
a) Exposé
Le mystère le plus étonnant de la connaissance est l’unité qu’elle instaure entre connaissant et connu. Tel est le mérite insigne d’Aristote : avoir compris que, par la connaissance, connaissant et connu communiait en un seul acte.
Que l’expression courante à propos d’un sujet qu’on ignore est vraie : « La botanique, l’histoire sumérienne, … et moi, cela fait deux ». Tant le propre de la connaissance est de faire un, comme le soulignait Aristote et comme le manque d’assimilation est schizoïde.
Le moderne a durci, dualisé la relation du moi au non-moi. Pour cela, il a substitué, côté volonté, autrui à prochain et côté intelligence, sujet à puissance (de sorte que l’objet est face à un sujet et non à une puissance qu’il achève).
Lallemant insistait sur le fait que, pour la connaissance, l’unité importe plus que la dualité sujet-objet.
Telle est l’une des expériences les plus décisives de l’acte de connaître. Prenons le cas de la connaissance sensible externe. Quand je connais, j’expérimente un seul objet : l’arbre. Celui-ci ne se dédouble pas en un arbre extérieur et un arbre intérieur. Spontanément, je crois connaître l’arbre qui m’apparaît et le connaître comme en dehors de moi. Pourtant, je sais bien qu’il s’agit d’un acte qui m’est interne.
Ainsi ce qui fait l’unité du connu ne provient pas d’une autre instance qui serait le connaissant, comme le pensait Kant, mais du connu lui-même.
« La stabilisation de l’objet d’expérience par l’entendement – écrit Karol Wojtyla – n’est aucunement la preuve de la participation indispensable de l’esprit, de l’élément intellectuel, dans toute la connaissance humaine, dans la formation des actes constitutifs de l’expérience, c’est-à-dire de ces contacts cognitifs immédiats avec la réalité objective [25] ».
b) Évaluation critique
Si vraie et si profonde soit cette approche, il manque en revanche la compréhension de la dualité qui demeure entre connaissant et connu. Autrement dit, nous sommes encore dans la description et non pas dans la définition.
Les prochaines approches tentent de comprendre de plus près ce mystère d’unité.
6) La connaissance comme rencontre
a) Exposé
Gabriel Marcel complète la notion de rencontre par celle de participation.
approche, toutefois parle ici de la connaissance humaine et, plus encore, interpersonnelle. La connaissance est rencontre, sujet que « les philosophes ont communément ignoré ou dédaigné ». Ce phénomène est souvent expliqué à la seule aune du hasard, de la coïncidence. Sinon, on en rend compte par quelque goût commun : le même amour pour les mêmes paysages, ainsi deux personnes se retrouvant dans la même ville d’eaux pour les mêmes soins.
Or, toutes ces explications demeurent extérieures. Au fond, elles objectivent le phénomène. « Vous faites une rencontre qui se trouvera avoir sur votre vie un retentissement profond ». Or, le rapprochement de la rencontre authentique n’est pas extérieur, mais intime : cette rencontre, je l’« appréhende par le centre de moi-même ». L’analyse marcellienne y voit donc en jeu un processus autrement plus profond. Précisément, qui relève de la logique du mystère, donc de l’auto-implication des personnes et de leur auto-communication.
« Je ne peux me placer réellement en dehors ou en face d’elle ; je suis engagé dans cette rencontre, je dépends d’elle, je lui suis en quelque façon intérieur, elle m’enveloppe et me comprend […]. Elle m’a développé du dedans, elle a joué par rapport à moi comme principe intérieur à moi-même ». Par conséquent, par la rencontre et par l’amour, « je me trouve en présence d’un mystère, c’est-à-dire d’une réalité dont les racines plongent au-delà de ce qui est à proprement parler problématique [26] ».
b) Évaluation critique
Si la connaissance est rencontre du connaissant et du connu, cette rencontre ne dit pas le spécifique du connaître, puisqu’elle vaut pour toute mise en relation, par exemple, affective.
7) La connaissance comme co-appartenance ou participation
a) Exposé
Le philosophe français Gabriel Marcel réinterprète la sensation (le sentir) en termes d’appartenance ou de « co-appartenance » ou de participation. À quoi ? À l’être.
Cette analyse est-elle contraire à celle d’Aristote ? Au fond, nullement. Elle ne s’oppose, pour Marcel, qu’à la compréhension idéaliste et, pour nous, à l’interprétation qui s’impose en psychologie cognitive. En effet, pour le Stagirite, la connaissance est unité du connaissant et du connu. Or, pour Marcel, le sentir est un acte de participation « immédiate de ce que nous nommons habituellement le sujet à une ambiance de laquelle nulle frontière véritable ne le sépare [27] ». Merleau-Ponty, qui s’inspire de nombreuses thèses de Marcel, en tentant de les faire valider par les sciences (neurologiques et psychologiques), affirme : « La sensation est à la lettre une communion [28] ».
De même, ce que Marcel appelle « immédiat » est ce que Husserl, dans un langage nettement moins élégant, appelle « antéprédicatif ».
b) Évaluation critique
Ces notions d’appartenance ou de participation sont riches et soulignent l’unité entre connaissant et connu, mais encore du dehors. Comment comprendre que le sujet connaissant puisse lui-même intérioriser le connu ?
8) La connaissance comme co-naissance
La co-naissance est une autre manière de dire la participation.
a) Exposé
Gabriel Marcel écrit :
« Inversement on peut voir que si un méta-problématique peut être affirmé, c’est comme transcendant l’opposition d’un sujet qui affirmerait l’être et de l’être en tant qu’affirmé par ce sujet – et comme fondant en quelque manière cette opposition. Poser un méta-problématique, c’est penser le primat de l’être par rapport à la connaissance (non de l’être affirmé, mais plutôt de l’être s’affirmant), c’est reconnaître que la connaissance est enveloppée par l’être, qu’elle lui est en quelque façon intérieure, en un sens peut-être analogue à celui que Paul Claudel a cherché à préciser dans son Art poétique. De ce point de vue, contrairement à ce que la théorie de la connaissance s’efforce vainement d’établir, il y a bel et bien un mystère du connaître ; la connaissance se suspend à un mode de participation dont une épistémologie quelle qu’elle soit ne peut espérer rendre compte parce qu’elle-même le suppose [29] ».
Autrement dit, la connaissance comme participation. Telle est la belle intuition développée par Paul Claudel dans son Art poétique où il joue sur la pseudo-étymologie connaissance – co-naissance. Telle était déjà l’intuition d’Empédocle pour qui seul le semblable connaît le semblable.
Dom Anschaire Vonier écrivait à propos de l’étude laïque, rationnelle, de la religion :
« Ceux-là, seuls, qui ont la vie de Dieu en eux sont capables de parler de Dieu, tout comme seuls les hommes peuvent étudier la vie des hommes. Il ne nous est pas possible d’approcher de Dieu sans Dieu, ni de voir la vie sans l’avoir en nous-mêmes, ni de disserter sur la foi sans la posséder déjà en nos cœurs [30] ».
Le père abbé retrouve le principe de la connaissance du semblable par le semblable, ici appliqué à la théologie.
b) Évaluation critique
Ce que nous avons dit de la participation et de l’enveloppement trouve ici un écho : la co-naissance explique l’unité de l’extérieur, mais point de l’intérieur : comment le connu vient-il épouser le connaissant au point de ne plus faire qu’un ?
9) La connaissance comme lumière
a) Exposé
Joseph Pieper parle un moment d’un éclairage qui vient d’en arrière pour qu’il soit possible de voir ce qui est devant nous. Connaissante et connu baignent dans une même lumière qui rassemble les êtres.
b) Évaluation critique
L’image est suggestive et ne doit pas s’entendre en un sens platonicien. Elle nous rappelle combien nous ne sommes pas maîtres et possesseurs de la vérité. En revanche, ne régresse-t-elle pas trop dans un sens augustinien qui fait du soleil de la vérité une réalité extérieure, transcendante à l’esprit, conception que Thomas a si vivement ajustée, ainsi que l’a magistralement montré Gilson ?
10) La connaissance comme enveloppement
a) Exposé
On trouve ce mot, souvent mal traduit, dans un texte justement fameux de Thomas :
« Telle est la perfection du connaissant en tant que connaissant, parce que selon elle, par le connaissant, quelque chose est connu de sorte que le connu lui-même est d’une certaine manière chez [apud] le connaissant [31] ».
D’ailleurs, la phrase d’avant, Thomas emploie un terme original, lui aussi de prime abord métaphorique : la connaissance comme remède : « D’où, afin qu’il puisse y avoir quelque remède [aliquod remedium] à cette imperfection, nous trouvons un autre mode de perfection dans les choses créées, selon lequel une perfection qui est propre à une chose se trouve dans un autre être ».
La pratique de l’Aquinate montre que, de rares fois (dont la plus célèbre est le « haec sublima veritas », relevée par Gilson), le maître se permet non pas des imprécisions, mais ce que j’oserais appeler des « débordements augustiniens » : comme si son âme hypersensible, son âme poétique constamment bridée par un exercice ascétique d’une rigueur extrême, s’exprimait. Même si cette ascèse permanente aboutit à un renversement, à savoir la naissance d’une beauté, d’un style, d’une forme très pure qui jaillit du fond cherché pour lui-même, dans le refus le plus absolu de la séduction et surtout de tout ce qui est extérieur au verbum cordis, dans son autodonation sans mélange, dans sa révélation la plus transparente et la plus rigoureuse de la vérité.
b) Évaluation critique
Par la connaissance, le connaissant abrite le connu et le connu habite le connaissant.
L’enveloppement exprime justement l’altérité entre connaissant et connu. En revanche, il ne permet pas d’exprimer leur unité.
Pascal Ide
[1] Chanoine Lallement, L’unité de la société politique. L’amitié, Paris, ICP, Cours année, p. 35.
[2] Ibid., p. 36.
[3] Le réalisme absolu se rencontre au xiie siècle, dans un débat entre le réalisme pur de Guillaume de Champeaux et le nominalisme de Jean Roscelin. Au milieu, la position d’Abélard qui reste toutefois proche du vocisme, mais modéré.
[4] cf. Aristote, Métaphysique, A, 6, 987 a 32 – 987 b 18 ; trad. Jules Tricot, coll. « Bibliothèque des textes philosophiques », Paris, Vrin, 1953, 2 vol., tome 1, p. 53 à 60 avec un abondant commentaire
[5] Cf. la critique de Platon en Métaphysique, L. I, tout le chapitre 9, p. 78-104. Cf. aussi le commentaire de s. Thomas, l. 14-17.
[6] Etienne Gilson, Réalisme thomiste et critique de la connaissance, Paris, Vrin, 1939, p. 230.
[7] Maurice Merleau-Ponty, Phénoménologie de la perception, coll. « Tel », Paris, Gallimard, 1945, p. viii. Souligné dans le texte.
[8] Aristote, De l’âme, III, 8, 431 b 21-22.
[9] Aristote, Métaphysique, 980 a 21.
[10] Jacques Maritain, Réflexions sur l’intelligence et sur sa vie propre, coll. « Bibliothèque française de philosophie », Paris, DDB, 21926, p. 106.
[11] Aristote, Métaphysique, 1050 a 23-35.
[12] S. Augustin, Les Confessions, L. X, x.
[13] S. Augustin, Les Confessions, L. X, viii.
[14] Pierre-Marie Émonet, L’âme humaine expliquée aux simples, chap. ii et iii, Chambray-Lès-Tours, C.L.D., 1994, p. 17-22. Souligné dans le texte.
[15] Georg Wilhelm Friedrich Hegel, Discours d’ouverture de l’année académique à l’Université de Berlin, 22 octobre 1818.
[16] Introduction à la philosophie, 1999, p. 28-29.
[17] Cf. Eschyle, Agamemnon, v. 177 ; cf. Euménides, v. 520s ; cf. aussi Sophocle, Antigone, v. 1272. Cf. surtout William Chase Green, Moira. Fate, Good and Evil in Greek Thought, Harvard University Press, 1944, réédité New York, Harper Torchbooks, 1963.
[18] Agamemnon, trad. P. Mazon, v. 177-178.
[19] Ibid., v. 249-250.
[20] Œdipe-Roi, v. 403.
[21] Cf. M.-O. Goulet-Cazé, L’ascèse cynique, Paris, 1986 ; sur les différentes sortes de ponoi, cf. p. 53-71.
[22] L’Ecclésiaste et son double araméen. Qohélet et son Targum, prés. et trad. Charles Mopsik, Lagrasse, 1990, p. 37.
[23] Jérôme lit l’Ecclésiaste. Commentaire de l’Ecclésiaste, trad. G. Fry, paris, 2001, p. 92.
[24] Simone Weil, Attente de Dieu, coll. « Livre de vie », Paris, Seuil, p. 39.
[25] Personne et acte, trad. Gwendolyne Jarczyc, Paris, Centurion, 1983, p. 23. Cf. Antoine Guggenheim, Liberté et vérité. Une lecture philosophique de Personne et acte de Karol Wojtyla, Saint-Maur, Parole et silence, 2000, p. 65.
[26] Gabriel Marcel, Du refus à l’invocation, Paris, Gallimard, 1940, p. 61.
[27] Gabriel Marcel, Journal métaphysique, p. 322.
[28] Maurice Merleau-Ponty, Phénoménologie de la perception, Paris, Gallimard, 1943, p. 246.
[29] Gabriel Marcel, Position et approches concrètes du mystère ontologique, Paris, DDB, 1933, p. 43.
[30] Dom Anschaire Vonier, L’Esprit et l’Épouse, trad. L. Lainé et D. B. Limal, coll. « Unam Sanctam » n° 16, Paris, Le Cerf, 1947, p. 23.
[31] « Et haec est perfectio cognoscentis in quantum est cognoscens, quia secundum hoc a cognoscente aliquid cognoscitur quod ipsum cognitum est aliquo modo apud cognoscentem » (S. Thomas d’Aquin, Q.D. De veritate, q. 2, a. 2, corpus).