La vertu de tempérance 1/2

« Dis-moi Vénus / Quel plaisir trouves-tu / À faire ainsi cascader la vertu [1] ? ».

 

Dans la Belle Hélène d’Offenbach, l’on trouve la jolie expression « faire cascader la vertu ». Autrement dit lui faire accomplir bien des sauts, voire la faire culbuter… S’il y a une vertu que nous avons tendance à « faire cascader » aujourd’hui, c’est bien la tempérance.

1) Exemple

Je choisis d’illustrer l’une des deux espèces de tempérance, la chasteté.

Rencontre avec Joe Black, romance fantastique américaine de Martin Brest, 1998.

La scène (3 presque en entier) se déroule de 0 h. 10 mn. 38 sec. à 0 h. 21 mn. 00 sec. (juste avant l’accident) ; ôter le passage de 14 mn. 56 sec. à 17 mn. 42 sec. (la scène avec Anthony Hopkins)

Histoire

Comme c’est l’une des scènes initiales du film et surtout que c’est la première scène où nous voyons les deux héros, Susan (Claire Forlani) et le jeune homme (Brad Pitt), se rencontrer, il n’y a rien à préciser.

Cette seule scène livre bien des éléments composant la douce alchimie de la rencontre par excellence, la rencontre amoureuse : sa préparation, lointaine et prochaine, son déroulement, son à-venir. Éléments qu’il n’est pas impossible d’universaliser, restant sauf le mystère unique et ineffable de chaque tête à tête qui est aussi un cœur à cœur. [2]

Je vais analyser la relation à la tempérance, faute de mieux. Je réserve l’analyse du jeu différencié des regards masculin et féminin à une ultérieure analyse.

Analyse de la scène

Même s’il s’agit d’un coup de foudre, donc de la passion, la tempérance, ici la chasteté n’est pas absente :

  1. La joie de la communion, de la rencontre, est en jeu ; mais aussi l’excitation sexuelle, discrète. C’est ce que montrera plus loin l’analyse des regards. Un signe encore plus patent de la présence de ce sentiment est la pudeur, patente lorsqu’ils doivent se quitter.
  2. Présent, le plaisir n’est pas premier, ni mesure de l’acte. De prime abord, on pourrait croire qu’il la drague, voire qu’il ment lorsqu’il dit téléphoner à sa sœur. En effet, ne multiplie-t-il pas les références au mariage, d’abord en général, puis en l’impliquant. De plus, il la complimente pour sa beauté. Mais l’impression se dissipe : d’abord, il parle mariage, engagement, pour toujours, il critique le caractère volage de l’ami de sa sœur ; ensuite, la manière qu’il a de la regarder, à la fin, assure définitivement qu’il est habité non pas par le désir, mais par un sentiment autrement plus durable et prenant. Enfin, à aucun moment, son regard ou son langage non-verbal ne montre qu’il est excité par elle, qu’il cherche à la conquérir, à la séduire pour une nuit (et plus, si affinités).

En outre, il y a un respect, une distance. Notamment ni toucher, ni même échange des noms.

  1. Surtout, le plaisir, la joie sont intégrés, non pas pour eux-mêmes, dans le petit bien fugace d’une rencontre fugace, d’une séduction bilatérale égoïste, a fortiori de la seule rencontre des corps, mais dans le grand bien qu’est la communion des époux. En effet, les deux parlent du mariage, voire de l’amour comme don de soi et sacrifice. Certes, avec une différence : lui en parle comme d’une possibilité hautement souhaitable et réalisable ; elle y voit un idéal décevant. Mais, quand elle en parle, son corps dénie ce qu’affirme sa parole (on le reverra), de sorte que, en définitive, elle voudrait encore croire à ce grand idéal.
  2. Enfin, le tout est aussi inscrit dans une relation clairement différenciée, donc non fusionnante. Notamment, l’altérité sexuelle est affirmée : l’homme est véritablement masculin, la femme véritablement féminine. Quelle belle attestation de la différence homme-femme ! Lui, plus émissif ; elle, plus réceptive. Lui, plus dans l’intelligence rationnelle (il projette, réfléchit, calcule, fait des liens), elle, dans l’intelligence émotionnelle. Lui, plus cloisonné, elle plus unifiée.

Nous comprenons aussi, à partir de là que, si l’homme risque d’être emporté par son désir, la femme risque de l’être par son imagination : élargissement du temps à l’avenir, transfert d’un geste qui la touche à son cœur, généralisation d’un geste délicat à toute la personne qui le pose.

2) Nature du plaisir

Comme la peur, la joie est passion, information et motion.

a) La joie est une passion

1’) Description commune

Elle se traduit dans le corps. L’un des plus beaux exemples de joie bondissante à la vue (au retour) de l’ami est le troisième mouvement de la Sonate dite Les adieux de Beethoven.

« La tristesse m’arrache des larmes », comme dit la traduction liturgique (Ps 118,28).

L’une des grandes apories liée aux larmes est leur ambivalence : celles-ci signifient autant la tristesse que la joie ; or, ces deux sentiments sont l’exact contraire ; or, l’extension se paie de la profondeur ; par conséquence l’amplitude du signal des larmes se solde par sa pauvreté signifiante.

2’) Explication scientifique (van Lier)

En 1954, R. J. Heath rapporte qu’il a provoqué des sensations de plaisir chez l’homme par la stimulation électrique de certains centres cérébraux. La même année, J. Olds observe ce qu’il appelle un « comportement d’autostimulation » chez le rat: une électrode ayant été implantée dans telle région du cerveau, pour un courant donné et dans certaines circonstances, l’animal reproduit ce courant en actionnant une pédale, cela à raison de cinquante à cent coups par minute, pendant des heures, en dépit de la faim, souvent jusqu’à l’épuisement; et l’accroissement de courant entraîne, dans certaines limites, une accélération du rythme atteignant parfois la fréquence de deux à trois réponses par seconde. L’autostimulation se retrouve chez l’homme, où elle a été observée principalement chez des opérés du cerveau et des malades mentaux, dans un contexte thérapeutique.

Il y a assurément une similitude entre ces trois groupes d’observations qui engagent des régions cérébrales apparentées. Chez l’homme, pour l’évocation de plaisir par stimulation étrangère, les physiologistes ont signalé la région septale et la région latérale du tegmentum mésencépahlique (R. J. Heath), la région ventro-médiane du lobe frontal (C. W. Sem-Jacobsen), le lobe temporal (Pr Delgado); pour l’autostimulation, la région septale postérieure, le tegmentum mésencéphalique, le centre médian du thalamus, le noyau caudé, les noyaux amygdaloïdes antérieurs et postérieurs. Ce territoire « positif » semble d’autant mieux individualisé qu’à environ 0,5 à 1 cm s’en délimite un autre, « négatif », dont la stimulation provoque, au contraire, des sensations de déplaisir ou d’aversion. Du reste, en 1964, Heath a observé dans le système positif une onde caractéristique de grande amplitude au moment des états de plaisir induits par des drogues ou par certains souvenirs. Et, comme les structures cérébrales engagées dans l’autostimulation du rat (J. Olds), du chat (H. A. Wilkinson) et du lapin (A. Bruner) sont homologues entre elles et équivalentes à celles que l’on vient de citer, on se trouve sans doute en présence d’un système intéressant l’ensemble des Mammifères, voire des Vertébrés ; E. S. Boyd a notamment observé des comportements d’autostimulation chez le poisson rouge.

b) Le plaisir a pour objet le bien présent

Nous avons vu, en étudiant la peur, que les sentiments avaient pour objet le bien et le mal, au sens non pas éthique, mais anthropologique. Nous le montrerons en détail dans le cours de philosophie de l’homme. Quoi qu’il en soit, le désir nous porte vers le bien à venir, alors que le plaisir nous fait goûter le bien présent.

Voilà pourquoi Bergson pouvait dire : « La joie annonce toujours que la vie a réussi… ». Voilà aussi pourquoi le plaisir est lié à l’amour. Dans la belle exhortation apostolique de Paul VI Gaudete in Domino sur la joie chrétienne, du 9 mai 1975, à l’occasion de l’Année Sainte, Paul VI qui insiste surtout sur le cheminement chrétien per crucem ad lucem, rappelle que la joie « est le fruit » de l’amour [3]. Or, double est l’amour : reçu et offert. Elle est d’abord le fruit de l’amour reçu. En effet, selon la définition thomasienne de la joie, l’homme « trouve sa satisfaction dans la possession d’un bien connu et aimé [4] ». D’où « le secret de la joie insondable qui habite Jésus, et qui lui est propre. […] Si Jésus rayonne […] une telle allégresse, […] c’est à cause de l’amour ineffable dont il se sait aimé du Père [5] ». Et cela vaut pour les Saints et donc pour tous les chrétiens.

c) Ce bien est-il l’opération ?

1’) Le problème

D’un côté, le plaisir n’est pas constitutif de l’opération. Le plaisir n’est pas constitutif de l’acte ni ne le produit.

C’est ce que montre le découplage entre plaisir et opération. En effet, on peut manger et conserver son être sans trouver goût à la nourriture ; même si les patients souffrant d’agueusie se nourrissent avec difficulté. Mais, s’il peut exister une opération sans plaisir éprouvé, il ne peut exister de plaisir sans opération, sans préparation du corps ; la délectation advient toujours à l’occasion d’un acte concret.

Pourtant, le plaisir suit l’opération. Il n’y a pas de plaisir sans une opération. Au moins minimale. Et plus l’opération est haute, plus profonde, durable sera la joie.

Le plaisir est causé par l’opération, même la plus prosaïque, la plus nécessaire à la vie, comme la miction :

 

« ‘Pisser est la jouissance du chaste’, confie un bénédictin coquin, cousin de Rabelais. C’est une des grandes relaxations du pèlerin – avec le délaçage du soir – qui clôt par ce jet libérateur une riche méditation sur l’incarnation. La fatigue semble s’écouler d’un coup, dans l’herbe drue du talus, un frisson d’aise glisse le long de la colonne vertébrale. Le marcheur savoure la détente, soupire d’aise et murmure les vers de l’homme aux semelles de vent : ‘Et je pisse vers les cieux bruns, très haut et très loin, avec l’assentiment des grands héliotropes…’ [6] ».

 

Inversement, la tristesse naît d’une diminution de l’agir. Voilà pourquoi on conseille aux personnes déprimées de ne pas rester prostrées, mais d’agir. « Inspirer des passions tristes est nécessaire à l’exercice du pouvoir », enseignait Gilles Deleuze dans un cours sur Spinoza prononcé à Vincennes le 24 janvier 1978. « Et Spinoza dit, dans le Traité théologico-politique, que c’est cela le lien profond entre le despote et le prêtre, ils ont besoin de la tristesse de leurs sujets. Là, vous comprenez bien qu’il ne prend pas tristesse dans un sens vague, il prend tristesse au sens rigoureux qu’il a su lui donner : la tristesse c’est l’affect en tant qu’il enveloppe la diminution de la puissance d’agir ».

2’) Réponse. Le plaisir est une surabondance

On peut dire plus encore : le plaisir est une surabondance. Il est comme un don au-delà du don : « le plaisir est don, surcroît, un peu comme la beauté, et c’est ainsi qu’il est sel de la vie, joie de vivre [7] ». Le ronron du chat est un plaisir qui est une surabondance de la caresse, donc de l’opération (reçue).

Aristote l’a exprimé dans un passage célèbre de son Ethique à Nicomaque : « Le plaisir achève l’acte, non pas comme le ferait une disposition immanente au sujet, mais comme une sorte de fin survenue par surcroît, de même qu’aux hommes dans la force de l’âge vient s’ajouter la fleur de la jeunesse [8] ».

d) Plaisir et joie

Henri Bergson a proposé une distinction suggestive et célèbre entre plaisir et joie :

 

« Les philosophes qui ont spéculé sur la signification de la vie et sur la destinée de l’homme n’ont pas assez remarqué que la nature a pris la peine de nous renseigner là-dessus elle-même. Elle nous avertit par un signe précis que notre destination est atteinte. Ce signe est la joie. Je dis la joie, je ne dis pas le plaisir. Le plaisir n’est qu’un artifice imaginé par la nature pour obtenir de l’être vivant la conservation de la vie ; il n’indique pas la direction où la vie est lancée. Mais la joie annonce toujours que la vie a réussi, qu’elle a gagné du terrain, qu’elle a remporté une victoire : toute grande joie a un accent triomphal. Or, si nous tenons compte de cette indication et si nous suivons cette nouvelle ligne de faits, nous trouvons que partout où il y a joie, il y a création : plus riche est la création, plus profonde est la joie. La mère qui regarde son enfant est joyeuse, parce qu’elle a conscience de l’avoir créé, physiquement et moralement. […] celui qui est sûr, absolument sûr, d’avoir produit une œuvre viable et durable, celui-là n’a plus que faire de l’éloge et se sent au-dessus de la gloire, parce qu’il est créateur, parce qu’il le sait, et parce que la joie qu’il éprouve est une joie divine [9] ».

 

Dans sa lettre de Noël 2004 sur la joie, le cardinal-archevêque de Malines-Bruxelles explique un peu différemment les différences entre joie et plaisir, ces fausses sœurs jumelles [10].

– Quant au temps : « Le plaisir rassasie un moment, à l’instar d’une décharge nerveuse ; la joie, à la surface de l’âme, est claire et forte, stable comme la plante d’eau sur un étang ».

– Quant à sa source : « Le plaisir, je le tire de moi, de ma propre expérience affective, esthétique ou spirituelle. La joie authentique vient d’ailleurs, elle m’est donnée ». D’où le fait qu’ « elle est portée sur les ailes de la reconnaissance ».

– Quant à la satiété : « Quand il s’agit de plaisir, la tension tombe dès que le désir est satisfait. La joie, elle, est comme poussée vers plus loin, vers davantage […]. Elle me dé-centre, m’éloigne de moi ».

– Quant à l’origine : « Le plaisir porte toujours une connotation de coup de chance (‘I got it’) […]. La joie est une bénédiction ; elle a quelque chose de divin ».

e) La joie est psychologiquement bonne

Comme tout sentiment, le contentement n’est pas seulement information, mais aussi énergie. Le plaisir, la joie est une énergie, l’une des plus grandes qui soient.

Au point que la joie aide à la guérison : « Un cœur joyeux favorise la guérison, un esprit attristé dessèche les membres » (Pr 17,22).

On trouve la même intuition chez Mère Teresa de Calcutta. La fondatrice des des Missionnaires de la Charité accorde une grande importance à la joie. Elle constitue un des articles de la Règle de Vie des Missionnaires de la Charité :

 

« La joie est un don indubitable de l’Esprit Sait et une caractéristique du Royaume de Dieu, puisque Dieu est joie. Le Christ a voulu partager la sienne avec ses apôtres : ‘Que ma joie soit en vous et que votre joie soit parfaite’ (Jn 15, 11). Elle fut aussi la force de Notre Dame. La joie seule pouvait lui donner l’énergie de traverser les collines de Judée pour aller, pleine d’attention, aider sa cousine Elisabeth. La joie est prière, c’est le signe de notre union la plus intime et la plus sûre avec Dieu. – La joie est amour. Un cœur joyeux est le fruit d’un cœur aimant : celui qui donne avec joie donne davantage et Dieu l’aime. La joie est un réseau qui nous permet de parvenir aux âmes. Elle est une nécessité et une force même du point de vue physique, car elle nous aide à être toujours disponibles à faire le bien autour de nous […]. Une sœur qui rayonne la joie rend témoignage sans avoir à parler. La meilleure manière d’être reconnaissant envers Dieu et envers les autres, c’est de tout accepter avec enthousiasme. La joie d’une sœur est le rayonnement de l’amour de Dieu, l’espérance d’un bonheur éternel, la flamme d’un amour brûlant [11] ».

f) La passion est éthiquement neutre

Cela signifie que la tristesse est parfois bonne. Christiane Singer rapporte les mots d’une petite fille de quatre ans à sa maman lorsqu’elle (Eva) se réveille : « Je suis triste, triste, aujourd’hui. – Laisse-moi, dit sa mère, souffler fort sur ta tristesse pour la faire s’envoler. – Oh non, s’écrie-t-elle, laisse-la moi encore un peu ». Et Christiane de commenter : « Quelle sagesse que celle de la petite Eva ! En un haussement d’épaules, elle déjoue l’attitude contemporaine qui consiste à ne vouloir que le plaisir, le succès et l’amusement », rappelant la formule célèbre du sociologue américain Neil Postman : « Nous nous amusons à mort ». [12]

3) Nature de la tempérance

Que le plaisir soit psychologiquement bon ne signifie pas qu’il le soit éthiquement. Encore faut-il qu’il soit mesuré. Et c’est ici qu’intervient la vertu de tempérance.

 

« Le plaisir est un cheval sauvage qui demande à être dressé – explique Alain Quilici –. […] Laissée à elle-même, son énergie serait incontrôlable. Tenue d’une main ferme, elle devient un atout précieux. Et au service de la liberté, il existe une vertu : la tempérance ». En effet, « l’homme tempérant a appris qu’il ne faut pas chercher le plaisir pour le plaisir. Ce qu’il faut rechercher, c’est ce qui est bon. Le plaisir est comme ce centuple que le Christ promet à ceux qui auront tout donné. Il vient en surcroît. Il est une prime au respect des règles d’une conduite droite [13] ».

a) Exposé

Classiquement, la tempérance est définie de manière plutôt négative et donc se rapproche de l’insensibilité. Ainsi que le nom lui-même l’indique, cette vertu a pour but de tempérer, calmer, freiner, en l’occurrence les plaisirs. C’est ainsi que le Petit Robert la définit comme la « modération dans tous les plaisirs des sens ».

Cette définition présente l’inconvénient majeur de réduire cette vertu à une action négative et de considérer la sensibilité d’une manière suspicieuse : celle-ci n’est qu’un mustang dangereusement sauvage qu’il convient de domestiquer et, s’il ne l’accepte pas, de mater, voire de tenir à l’écurie. Karol Wojtyla, dans un écrit de sagesse trop peu connu, Amour et responsabilité, a dénoncé cette vision seulement répressive de la chasteté (dont on verra qu’elle est une des deux espèces de la tempérance), proposant d’y lire d’abord un accueil enthousiaste de l’affectivité [14].

Généralisant cette proposition, je souhaiterais donc faire une présentation positive de la tempérance. Il serait alors possible de la présente comme la vertu qui nous fait vivre le plaisir de manière humanisante. Il ne s’agit pas de nier le frein, la modération, mais de ne pas y réduire l’action propre de la vertu. Plus encore, il ne s’agit pas d’imaginer que la vertu comporte comme deux faces : l’une répressive et l’autre encourageante. Comme toute privation, le « non » se comprend à partir du « oui ». L’ombre est la carence de lumière, mais la lumière n’est pas l’absence d’ombre. Ainsi, le « non » attentif, contrôlant de la tempérance n’est qu’un des moments de « oui » joyeux au plaisir : il s’inscrit au sein de l’accueil et de la célébration non suspicieuse de l’affectivité.

Le signe d’une tempérance véritablement adéquate à la vision qui vient d’être proposée est qu’elle est habitée par l’affect prédominant de la joie et non pas de la crainte. Ainsi, présentant la chasteté à des fiancés, à des célibataires, le discours est-il dominé d’abord par les mises en garde ou par la présentation honnête, enthousiaste de la beauté de la sexualité ? Le climat global est-il à l’applaudissement ou au frein ?

b) Confirmations

Le sociologue Jean Claude Kaufmann distingue plaisir et désir. Le premier est immédiat, consommateur, le second accepte la durée, donc suppose un minimum de tempérance, de sobriété.

 

« Nous zappons le désir au profit de plaisirs faciles, immédiats […]. Quand arrive la fraise n’ayant pas mûri dans sa cagette voyageuse, celle qui n’a pas le cœur dur et sec et devrait être accueillie comme une princesse, si longuement attendue que le premier contact en bouche, la première bouchée, le premier baiser devraient provoquer une explosion de sensations et de sentiments, nous sommes blasés et la croquons comme un fruit ordinaire […]. Savoir attendre décuple les vibrations ressenties. Nous devons apprendre le rythme du plaisir, refonder des rituels, ne pas chercher à vivre un éternel printemps en hiver [15] ».

 

Autre nom de la tempérance qui est vertu de la mesure et non pas de la privation ou de l’abstinence.

c) Fondement anthropologique (optimisme)

Cette différence éthique s’enracine dans une divergence anthropologique. Selon la première perspective, le sentiment est au fond une maladie. Elle se nourrit de présupposés innommés. Pour aller au cœur : il y va d’une vision de l’homme le plus souvent dualiste [16]. D’un mot, la sensibilité est périlleuse, le plaisir une force contraire nous entraînant dans le péché, la sexualité un ensemble de pulsions qu’il est impossible de maîtriser et qu’au mieux, l’on peut sublimer. Il est significatif que Freud, dans sa seconde théorie de l’appareil psychique, ait inventé le terme « ça » pour désigner le pôle pulsionnel de la personnalité. Ce réservoir libidinal demeure à jamais irréductible au Moi et au Surmoi, et au fond incontrôlable. Le philosophe Michel Henry a démontré de manière convaincante combien la vision freudienne hérite du dualisme de Descartes qui a déchiré l’homme en deux instances, l’âme et le corps que ses successeurs ne savent plus recoudre [17]. Cette vision clivée est résumée par la parabole du cavalier et du paysan : « Labourant son champ, un paysan fut surpris, un jour, par le bruit d’un cheval lancé au triple galop. On raconte qu’il aperçut un cavalier, ayant perdu rênes et étriers, cramponné à la crinière de sa monture : ‘Où vas-tu si vite ? lui cria-t-il. – Eh, demande-le à mon cheval’ [18] ».

Cette conception pessimiste s’inscrit en faux contre les anthropologies antiques ou médiévales de la vertu pour qui, tout au contraire, l’unité est tendanciellement possible, quoique le fruit d’un travail toujours à reprendre. Dans leur prolongement mais en intégrant les sciences humaines et en convoquant l’approche phénoménologique, Karol Wojtyla, dans les écrits cités ci-dessus, montre combien la tendance sexuelle pouvait pleinement s’intégrer, par la médiation de la vertu, dans l’amour. Selon cette seconde perspective, dans une morale des vertus, la sensibilité est humaine, donc domesticable ; elle est disposée à l’intégration. Daniel-Ange en tire deux conséquences : « La sexualité est bien plus maîtrisable qu’on le croit. Les pulsions sexuelles bien moins compulsives qu’on ne le dit » ; il ne s’agit pas de réprimer ou refouler la sexualité, « mais bien au contraire de l’investir au maximum sur le point précis où elle peut être au service de l’amour et de la vie [19] ».

Certes, depuis le péché originel demeure en nous un foyer de concupiscence (le « fomes concupiscentiae »), mais il n’est pas inaccessible à la vertu, même s’il ne sera totalement résorbé que dans la gloire. L’anarchie n’est donc pas une fatalité.

4) Les vices contraires

Comme toute vertu morale, la tempérance est un juste milieu entre deux vices opposés : par excès, l’intempérance ou hédonisme ; par défaut, l’insensibilité.

a) La tentation de l’euphorie perpétuelle

Aujourd’hui, l’intempérance prend la figure de l’euphorie perpétuelle, selon le titre de l’ouvrage de Pascal Bruckner [20]. L’essayiste français fait le diagnostic que notre monde est mis devant l’obligation de jouir, à tout prix et en permanence. L’eudémonisme est hédonisme. « Par devoir de bonheur, j’entends […] cette idéologie propre à la deuxième moitié du xxe siècle et qui pousse à tout évaluer sous l’angle du plaisir et du désagrément, cette assignation à l’euphorie qui rejette dans la honte ou le malaise qui n’y souscrivent pas [21] ». La critique de Bruckner est efficace mais faible : le plaisir élimine la douleur ; or, celle-ci fait partie de la vie. D’où « l’impossible sagesse » décrite par le chapitre final où il tente de réhabiliter, à partir de différents exemples, la souffrance comme lieu d’enseignement.

Cette euphorie emprunte notamment deux voies :

1’) Importance de la surprise, donc du renouvellement perpétuel

En lisant l’article bien documenté du conservateur du patrimoine au château de Versailles [22], l’on mesure combien les feux d’artifices faisaient intrinsèquement partie des fêtes royales. Ils étaient à ce point somptueux qu’ils pouvaient durer jusqu’à une demie heure (le 24 juillet et le 18 août 1674), consommer (le feu du 19 mai 1770 s’achevait par une grande girandole composée de plus de 20 000 fusées, « la plus considérable qu’on ait jamais vue [23] ») et être préparé sur une très longue durée (ainsi, le feu destiné à célébrer le mariage du futur Louis XVI avec Marie-Antoinette a nécessité près de deux ans de préparation racontés en détail par Denis Papillon de la Ferté, intendant des Menus Plaisirs). Enfin, le nombre n’est pas négligeable : il y eut environ vingt-cinq feux et illuminations entre 1664 et 1682.

Comment ne pas corréler ces feux d’artifice aux fastes du Roi-Soleil ? A chaque fois, il s’agit de rayonnement.

Il est à noter que, à côté de la fête des yeux (feux, illuminations et couleurs), il y avait toujours l’élément de surprise, essentiel, car « essentiellement baroque » : « Elle trouve certainement sa plus belle expression lors du feu du 18 juillet 1668 [terminant le Grand Divertissement royal]. Au sortir du bal, donné dans un salon de verdure érigé à l’emplacement de l’actuel bassin de Cérès, la cour est saisie de façon inattendue par une illumination grandiose du fer à cheval de Latone et du château. L’Allée royale puis les bassins de Latone et des Lézards s’enflamment ensuite d’un déluge de feu, soutenu par un fracas terrible [24] ». Or, « cette première surprise est bientôt éclipsée par un coup de théâtre auquel il était impossible de s’attendre. Un second feu s’élève tout à coup de l’autre côté du château, achevant de troubler les sens des spectateurs et concluant la fête la plus baroque que Versailles ait certainement jamais connue [25] ».

Félibien explique en quoi la surprise est ménagée. On notera en passant la comparaison entre feux d’artifices et jeux d’eau :

 

« Bien que tout le monde sût que l’on préparait des feux d’artifices, néanmoins en quelque lieu qu’on allât durant le jour, l’on n’y voyait nulle disposition, de sorte que dans le temps que chacun était en peine du lieu où ils devaient paraître, l’on s’en trouva tout d’un coup environné […]. En voyant sortir de terre, mille flammes qui s’élevaient de tous côtés, l’on ne savait s’il y avait des canaux qui fournissent cette nuit-là autant de feux, comme pendant le jour on avait des jets d’eau qui rafraîchissaient ce beau parterre. Cette surprise cause un agréable désordre parmi tout le monde [26] ».

2’) Sur la déconnexion dans l’hyperconsommation. Détente n’est pas joie

Il me semble que l’on pourrait expliquer l’attitude si déplorable du débiteur impitoyable à partir de la logique narcissique de la détente versus celle, altruiste, de la joie. En effet, comment expliquer qu’il se précipite sur son propre débiteur avec une telle violence ? L’interprétation habituelle, fondée sur les paroles mêmes de Jésus, est morale : amnésique et ingrat, il ne pense qu’à son propre intérêt ; de plus, ayant accumulé une telle dette et fait courir un tel risque à toute sa famille, cet homme se comporte de manière profondément injuste et, une nouvelle fois, égoïste. Cette interprétation n’est toutefois pas exclusive d’une autre, d’ordre non plus éthique, mais psychologique Si nous faisons appel à notre expérience, nous savons qu’un autre facteur intervient : le serviteur a dû vivre un stress atroce : pas seulement pendant la scène, mais depuis qu’il a appris qu’il est convoqué par le roi pour rendre ses comptes. En apprenant qu’il était absous, délivré de sa dette, il a dû ressentir un soulagement intense. Mais son corps, son psychisme porte encore la trace de ce bouleversement affectif. Aussi, lorsqu’il rencontre au dehors une situation similaire à la sienne, il rejoue tout le stress accumulé, toute la colère rentrée, et fait payer à l’autre ce qu’il a lui-même ressenti. Cette scène atteste donc que, en étant pardonné, ce serviteur a vécu seulement une détente, un soulagement, mais en rien une joie.

Or, la logique de la détente est une logique autocentrée, où ce qui console est réduit à la consolation ressentie, alors que la logique de la gratitude est centrée sur l’autre, tournée vers le donateur, et suscite en soi une réponse : d’abord, la reconnaissance à l’égard de la source, ensuite, la générosité, tout aussi gratuite du service, redonnant gratuitement ce qui a été reçu gratuitement (cf. Mt 10,8). De plus, le contentement ressenti lors de la détente est de courte durée, alors que la gratitude s’inscrit durablement dans la mémoire.

À la profondeur des sentiments vécus par le roi – autant la pitié qui le prend « aux entrailles [splagchnisthéis] » (Mt 18,27) que la colère (« s’encolérant [orgistheis, de orgè, « colère »] » : Mt 18,34) – répond la superficialité des émotions éprouvées par le serviteur qui ne vit pas à partir de son « cœur [kardiôn] » (Mt 18,35), mais seulement d’un ressenti de surface. D’ailleurs, l’accumulation d’une dette aussi insolvable ne signifie-t-elle pas une vie de dispersion, voire de jouissance, d’indifférence à l’autre (sa famille ainsi mise en péril, ses créanciers qui attendent d’être remboursés) ?

b) La tentation de l’insensibilité

Tout à l’opposé de l’hédonisme, mais à l’instar de la peur, la tentation de l’insensibilité stoïcienne guette.

Un exemple est offert par le petit ouvrage successfull de Philippe Delerm, La première gorgée de bière et autres plaisirs minuscules [27]. Voici, de prime abord, une apologie talentueuse de l’épicurisme, au sens le plus juste du terme. Mais un plaisir qui remplit le présent de présence. Il n’est minuscule qu’à cause de notre inattention au quotidien, nullement dans la vibration qu’il fait retentir en nous : « Les plaisirs selon Delerm sont humbles mais intenses [28] ». Rien de plus vittozien que ces descriptions pleines de saveur et de vérité du contentement que l’on éprouve lorsqu’on lit un Agatha Christie, lorsqu’on voyage dans un vieux train. Le présent ouvre un monde inconnu de richesses inouïes. Lorsqu’on apprend la mort de Jacques Brel en voiture, celle-ci s’identifie brusquement à « une autoroute à trois voies, avec un gros camion Antar sur la file de droite ». (p. 60) Lorsqu’on achète des gâteaux le dimanche matin, le monde prend un goût de « flânerie » (p. 12). Quand on lit son journal au petit déjeuner, on y lit « que le jour n’est pas pressé de commencer » (p. 71) et quand on lit sur la plage, « on a la sensation de lire avec le corps ». (p. 46) « On a cueilli les mûres, on a cueilli l’été ». (p. 30) Le plaisir d’écosser les petits pois « est bien de prolonger, d’alentir le matin » (p. 14).

Il s’avère donc que cette méditation sur le plaisir est une méditation sur la place du temps dans le plaisir. Le contentement du présent est gros d’une présence du passé rappelé et de l’avenir espéré. On n’en finirait pas de le montrer au détour de chaque minuscule chapitre : « Le plaisir d’ouvrir et refermer la lame, on n’est plus entre deux âges, mais à la fois deux âges – c’est ça, le secret du couteau ». (p. 10) « C’est presque toujours à cette heure creuse de la matinée où le temps ne penche plus vers rien ». (p. 13) Dans le « plaisir indécent » du banana-split se love le plaisir de l’enfant dérobant les confitures dans l’armoire (p. 43). Le choix du pull, en automne, convoque le passé : « un pull à grosses mailles, à croisillons, comme si quelqu’un avait encore le temps de tricoter pour vous » et « un pull en creux d’épaule, en espérant… » (p. 58)

Il n’est pas jusqu’au déplaisir minuscule qui témoigne lui aussi de la place inavouée de la nostalgie ou de la crainte en toute tristesse présente, comme celle de mouiller ses espadrilles : « pas de rémission, pas d’espoir ». (p. 66)

Alors, le dessein ultime, peut-être caché à l’auteur lui-même, se dévoile. S’il est nécessaire d’injecter du passé plus encore que du futur pour épaissir le plaisir, ce n’est pas tant Heidegger qu’Augustin qui a raison. Il serait exagéré de dire que Delerm fait rimer fugacité et la vanité. Toutefois cet apologue nous enseigne que non seulement l’intensité contrarie la durée, mais que le plaisir contrarie le bonheur, qu’il ne comble pas notre désir d’un bien comblant. Qu’on lise son admirable description de « la première gorgée de bière » qui a mérité de donner son titre à tout l’ouvrage : « C’est la seule qui compte. Les autres, de plus en plus longues, de plus en plus anodines ». Mais la première : « la sensation trompeuse d’un plaisir qui s’ouvre à l’infini… En même temps, on sait déjà. Tout le meilleur est pris ». (p. 31-32) Vraiment, si le plaisir n’est jamais méprisable, il demeure minuscule…

Pascal Ide

[1] Jacques Offenbach, La Belle Hélène, opéra bouffe en trois actes, livret de Henri Meilhac et Ludovic Halévy, 1864,

[2] Pour une analyse détaillée, cf. Pascal Ide, La rencontre au cinéma, Paris, L’Emmanuel, 2005, p.

[3] Texte français dans La Documentation catholique, 1er juin 1975, n° 1677, p. 501 à 511, ici Introduction, p. 501.

[4] I, p. 501. Cite ST, Ia-IIae, q. 31, a. 3.

[5] III, p. 504.

[6] Luc Adrian, Foi dite en passant. Carnet de route d’un pélerin ordinaire, Paris, Presses de la Renaissance, 1997, p. 120.

[7] André Barral-Baron, « Entre le plaisir et la foi », in Le centre théologique de Meylan, Le plaisir, coll. « Dossiers libres », Paris, Le Cerf, 1980, p. 102.

[8] Ethique à Nicomaque, L. X, ch. 4, 1174 b 32-33, p. 496. Jean Tricot commente un peu avant « Le plaisir ne produit pas l’acte, car l’acte pourrait se réaliser sans lui ; il est au contraire la fin qui s’ajoute à l’acte » (note 1, p. 495).

[9] « La conscience et la vie », L’énergie spirituelle. Essais et conférences, Paris, Alcan, 1919, p. 24-25, dans Œuvres, éd. du Centenaire, André Robinet éd., Paris, p.u.f., 1959, p. 832.

[10] Card. Godfried Danneels, La joie, Mechelen, éd. Paroles de vie, Noël 2004, p. 6.

[11] Mère Teresa de Calcutta, J’ai pris Jésus au mot, Messages recueillis et commentés par José Luis Gonzales-Balado, Paris, Médiaspaul, Montréal (Québec), Ed. Paulines, 1992, note 3, p. 33. Souligné dans le texte.

[12] Christiane Singer, Derniers fragments d’un long voyage, Paris, Albin Michel, 2007, p. 115-116.

[13] Alain Quilici, « Le plaisir des vacances », Famille chrétienne, n° 1017, 10 juillet 1997, p. 58 et 59, ici p. 59.

[14] Cf. Amour et responsabilité. Étude de morale sexuelle, trad. Thérèse Sas et Marie-Andrée Bouchaud-Kalinowska, Paris, Éd. du Dialogue et Stock, 1978, surtout chap. 2 et 3. Devenu pape, il a poursuivi sa réflexion, à partir de l’Écriture Sainte, montrant, contre la suspicion actuelle sur l’éros (cf. les remarquables catéchèses du mercredi 29 octobre 1980 sur le soupçon et des mercredi 5 et 12 novembre 1980 sur le sens actuel de l’eros), la possible intégration de la sexualité dans la personne grâce à la pureté, don et vertu (du 10 décembre 1980 au 18 mars 1981) ; sur la place du corps dans l’état de virginité pour le Royaume, cf. toute la série de catéchèses du 10 mars au 21 juillet 1982.

[15] « Savourer une cerise en hiver », Psychologies magazine, 328 (avril 2013), p. 96.

[16] Certaines visions New age, donc monistes, notamment inspirées par le tantra, tendent aujourd’hui à se répandre et aboutissent aux mêmes conclusions : l’éros est une force vitale qu’il est périlleux de ne pas exprimer dans une vie génitale.

[17] Michel Henry, Généalogie de la psychanalyse. Le commencement perdu, coll. « Épiméthée », Paris, P.U.F., 1985, chap. 3.

[18] Fable tibétaine du vénérable Tchich Tchien Chau rapportée par Jean-Louis Bruguès, in La fécondation artificielle au crible de l’éthique chrétienne, Paris, Fayard-Communio, 1988.

[19] Daniel-Ange, Ton corps fait pour l’amour, coll. « Jeunesse-Lumière », Paris, Le Sarment-Fayard, 1988, p. 86.

[20] Pascal Bruckner, L’euphorie perpétuelle. Essai sur le devoir de bonheur, Paris, Grasset, 2000.

[21] Ibid., p. 17.

[22] Raphaël Masson, « Feux royaux à Versailles », Coll., Feux royaux à Versailles. La face cachée du soleil, Paris, Actes Sud, photographies de Thierry Nava, 2008, p. 15-48,

[23] Journal de Papillon de la Ferté, éd. E. Boysse, Paris, Ollendorf, 1887, dimanche 20 mai 1770.

[24] Raphaël Masson, « Feux royaux à Versailles », p. 23.

[25] Ibid., p. 26.

[26] Relation de la feste de Versailles du 18 juillet mil six cens soixante-huit, Paris, Imprimerie royale, 1679, p. 41. Écriture modernisée.

[27] Paris, Gallimard-L’Arpenteur, 1997.

[28] Gilles Anquetil, Le Nouvel Observateur, 3-9 juillet 1997, p. 106.

27.4.2020
 

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