Vice
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Pays:
Américain
Thème (s):
Personnalité Narcissique, Politique
Date de sortie:
13 février 2019
Durée:
2 heures 12 minutes
Évaluation:
***
Directeur:
Adam McKay
Acteurs:
Christian Bale, Amy Adams, Steve Carell
Age minimum:
Adolescents et adultes

 

Vice (Vice), biopic américain écrit et réalisé par Adam McKay, 2018. Avec Christian Bale, Amy Adams, Steve Carell, Sam Rockwell.

Thèmes

Personnalité narcissique, politique.

Pour la énième fois, le cinéma détaille une personnalité narcissique grand format. Non sans quelques nouveautés.

 

Dick Cheney synthétise le tableau clinique d’un psychisme à l’ego encore plus boursouflé que son physique (le transformiste Christian Bale a dû prendre un tiers de quintal !). Sans entrer dans le détail, soulignons les deux signes principaux.

Primo, l’image inflationnaire du moi qui conduit celui qui se croit supérieur aux autres à se croire supérieur à la loi. C’est ainsi que le Vice Président n’a jamais payé d’impôts et a employé son pouvoir pour, après l’invasion de l’Irak, faire monter de 500 % la valeur de l’action Halliburton, multinationale parapétrolière dont il est le pdg. Secundo, l’insensibilité à la souffrance d’autrui. On apprend aussi au passage qu’il a blessé un proche au visage dans un accident de chasse sans jamais s’en excuser.

Qu’il est naïf et inutilement méprisant, comme le fait une critique, de traiter Cheney d’« idiot », parce qu’il est un ultraconservateur qui a précipité cette guerre catastrophique en Irak et commis des dégâts dont on ne voit plus la fin. L’homme apparaît, au contraire, comme un génie du mensonge d’autant plus malfaisant qu’il travaille dans l’ombre et qu’il manipule uniquement pour conserver son pouvoir. En prenant du volume, physique et politique, Cheney devient plus en plus une éminence grise qui grise tous ceux à qui il prodigue ses vénéneux conseils.

Symboliquement, le film s’ouvre (presque) sur le premier infarctus du myocarde de Dick et se clôt (presque) sur la vue de ce même cœur qui, après une greffe, est déposé sur une table, donc en dehors de son corps. D’un cœur déjà partiellement mort (sa partie inférieure est nécrosée) à un cœur définitivement inutilisable. Mais Cheney l’a-t-il jamais utilisé ? Désormais, c’est le cœur du donneur, que l’on découvre être le narrateur, qui est greffé dans la poitrine de celui qui a toujours tout pris sans rien donner.

 

La nouveauté du film ne réside pas dans la réalité historique du personnage (le cinéma s’est toujours régalé de biopics égodilatés), ni d’en montrer l’involution sur le long terme (construite sur un gouffre affectif abyssal, la personnalité narcissique n’a pas les ressources psychiques pour changer). Elle consiste plutôt dans sa monstration-démonstration de son omniprésence aux échelons les plus élevés du pouvoir, à la Maison Blanche et ailleurs, en politique et ailleurs, les études (américaines) l’attestent. Liberté et courage, là encore d’une Amérique qui ose détailler-dénoncer la turpitude au plus haut niveau. Quand le Français osera sortir d’un correct doublement politique… ?

L’inédit se situe aussi dans la complicité, passive et surtout active, de l’entourage immédiat : car la véritable battante, on le comprend vite, est Lynne qui, tout en sacrifiant très intentionnellement sa carrière personnelle, va désormais régner par son mari interposé, comme celui-ci gouverne, et c’est beaucoup plus inquiétant, à travers cet autre fantoche qu’est George W. Bush.

Deux attestations, presque caricaturales, parmi beaucoup, de cette volatilité du politique : Cheney choisit son camp politique entre démocrates et républicains, uniquement sur la prestation désinvolte et provocante de Donald Rumsfeld (Steve Carell) ; l’éclat de rire homérique avec lequel le même 13e et bientôt 21e secrétaire à la Défense des Etats-Unis accueille sa demande, à propos du bombardement au Cambodge (« Quelles sont nos convictions ? ») : « Elle est bien bonne, celle-là ! Quelles sont nos convictions ? ». Ce cynisme qui rime avec narcissisme résume tout le machiavélisme d’un certain politisme qui, en faisant mine de servir son pays, ne fait que se servir lui-même en asservissant les autres.

Pascal Ide

1963, Casper (Wyoming). Dick Cheney (Alex MacNicoll), alcoolique bagarreur, est arrêté par un policier et récupéré au poste de police par sa mère (qui n’en est pas à sa première fois). Plus tard, étudiant moyen et sportif médiocre, il se fera renvoyer de Yale jusqu’au jour où sa femme Lynne (Amy Adams), qui est femme de caractère, lui pose un ultimatum : soit il se reprend, soit elle part avec leurs deux filles.

11 septembre 2001, 9 h. 38. Dans une salle faisant office de centre des opérations d’urgence sont regroupés les plus hauts responsables de la Maison-Blanche. Alors que George W. Bush fils (Sam Rockwell) est absent, que les téléphones sonnent de partout et que règne la plus grande confusion, le vice-président Dick Cheney (Christian Bale) est le seul à saisir l’opportunité : sans demander l’avis du 43e Président des États-Unis, outrepassant donc ses fonctions, il donne plusieurs ordres lourds de conséquences. Ce n’est pas la première fois. Ce ne sera malheureusement pas la dernière.

Comment ce loser qui n’est doué que pour saboter ses maigres talents est-il devenu, dans l’ombre, l’homme le plus puissant du monde ? Le film présente, au pas de course et sans respect pour la chronologie, celui qui fut chef de cabinet sous Gerald Ford, représentant du Wyoming, secrétaire à la Défense sous George Bush père, avant de devenir le Vice. Et nous donner sa version du personnage – terrifique.

 

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