Les Aventures de Robin des Bois
Loading...
Pays:
Américain
Thème (s):
Esprit Saint
Date de sortie:
14 mai 1938
Durée:
1 heures 42 minutes
Évaluation:
****
Directeur:
Michael Curtiz et William Keighley
Acteurs:
Errol Flynn, Olivia de Havilland et Basil Rathbone
Age minimum:
Famille

Les Aventures de Robin des Bois, aventures médiévales de Michael Curtiz et William Keighley, 1938. Avec Errol Flynn, Olivia de Havilland et Basil Rathbone.

Thèmes

Esprit Saint.

Décidément, de toutes les adaptations cinématographiques du personnage de Robin des Bois, cette version est ma préférée [1] ! En cette fête de la Pentecôte, osons proposer une lecture pneumatique du chef d’œuvre de Michael Curtiz et William Keighley…

 

À l’instar du Souffle divin qui rapide se répand sur la terre, Robin de Locksley devenu Robin des Bois a pour emblème la flèche véloce surgie de nulle part, et pour talent d’être le meilleur archer d’Angleterre.

De l’Esprit, il est rempli de cette allégresse qui lui fait dévorer la vie à pleines dents comme les gibiers à pleine bouche. Cette joie diffusive qui éclate dans son rire communicatif, lui fait transformer un échec en occasion de se faire un nouvel ami et les punitions infligées aux Normands en leçons de vie.

De l’Esprit-Saint, le Robin interprété par Errol Flynn a cette légèreté sautillante, tourbillonnante, dansante. Ah, la scène mythique où, se rendant seul au château de celui qu’il ne voit pas encore comme un ennemi, Robin bondit de table en table, échappe aux nuées soldatesques qui s’agglutinent sur lui en se glissant sous elles, semble voler dans le vide !

Comme « la puissance du Très-Haut » (Lc 1,35), il semble toujours venir des cieux, privilégie les escalades ou les descentes, vient du haut des frondaisons, tire ses flèches depuis les tours et s’élance depuis les balcons.

Tel l’Esprit, Robin n’en reste toutefois pas à ces pirouettes verticales filmées dans la technique alors révolutionnaire du Technicolor trichrome. Il travaille à la communion horizontale, c’est-à-dire à la réciprocité entre Normands et Saxon, simples et nobles, pauvres et riches. En effet, le Pneuma est communion, parce qu’il est communication et il est communication, parce qu’il est circulation : des biens, mais aussi des personnes qui s’y symbolisent.

Comme l’Esprit qui agit sans réagir, Robin unit en intégrant. Par exemple, sa compassion gratuite à l’égard des plus pauvres ne l’empêche pas de requérir la justice, donc le traitement égal des Saxons et des Normands.

Comme l’énergie de l’Esprit, celle de Robin est contagieuse. Spontanément, dans la scène d’ouverture, le serf qui, avec une rare liberté ose tenir tête à Guy de Gisbourne au risque de la perdre, offre dans un touchant élan de mettre cette même liberté au service de son sauveur. C’est surtout avec Lady Marian que cette communication s’intériorise en transformation. Dans une autre belle scène, celle qui s’était d’abord rebellée contre ce qu’elle prenait pour un nobliau histrion et cavalier, va franchir les différentes étapes de la véritable miséricorde : des pieds (elle accepte de se déplacer, dans tous les sens du terme) aux yeux (elle voit la misère de son peuple), des yeux au cœur (elle se laisse toucher au plus intime) et bientôt du cœur aux mains (quand elle prendra parti pour Robin et méritera la prison). Or, avant d’être envahie d’amour pour le sauveur, elle est émue de pitié pour les sauvés. Plus encore, c’est cette compassion, plus que la mutuelle passion, qui décidera de leur amour, tant celui-ci est d’abord une question de mission, donc de finalité, plus qu’une question de motion, donc d’efficience.

Comme le Vent mystérieux dont nul ne sait « ni d’où il vient ni où il va » (Jn 3,8), Robin se laisse voir en ses multiples effets, d’efficacité puissante, de vérité illuminate et d’amitié compatissante, mais, plus encore, il se dérobe dans l’impénétrable et vivifiante forêt aux mille ressources de Sherwood.

Comme le Saint-Esprit combat les mauvais esprits, comme le Symbolisateur (étymologiquement, « celui qui rassemble ») guerroie âprement contre les esprits diabolisants, Robin n’est pas un doux rêveur qui instaure une royauté Guaranis dans la forêt paradisiaque de Sherwood. Il sait qu’il doit lutter contre des ennemis de chair et de sang (il lance même beaucoup de flèches qui font mouche et sèment beaucoup de morts sur son chemin !) et, plus encore contre l’esprit du mal : du mensonge sournois et cupide du Prince Jean à la forfaiture hâbleuse du shérif de Nottingham, en passant, pire encore, par la hideuse lâcheté des barons qui, interpelés personnellement par le régent, confessent chacun leur allégeance l’un après l’autre. C’est d’ailleurs à ce moment que, dans une réaction viscérale autant que totale, Robin se retourne contre celui à qui il doit obéissance. Plus que contre l’indigne manœuvre du prince Jean contredisant les lois sacrées de l’hospitalité, il est submergé d’une nauséeuse horreur contre cette compromission-démission généralisée et décide de rentrer en résistance. Il comprend désormais que l’injustice ne reviendra dans le royaume de Richard que si elle est activement combattue. Et où trouver plus belle métaphore de cet affrontement dramatique entre le bien et le mal spirituels que la transformation du duel mythique opposant Robin et l’âme justement qualifiée de damnée de Gisbourne, en une crépusculaire gigantomachie entre leurs ombres soudain démesurément agrandies à la lumière du feu pneumatique ?

 

Enfin, avant tout et par-dessus tout, si Robin évoque (très analogiquement, voire très métaphoriquement, si l’on songe au pauvre itinéraire de son interprète !) l’Esprit, c’est parce qu’il en a la liberté qui est autant légèreté que gravité. Non point cette mascarade avilissante qu’est la pseudo-liberté, « prétexte pour la chair » (Ga 5,13), de faire ce que l’on veut, c’est-à-dire, en réalité, d’être l’esclave de ses passions et de ses tentations. Mais cette liberté qui ne fait plus qu’un avec l’amour, celui du plus proche comme celui du plus lointain. Robin Hood n’est pas un Peter Pan transposé dans le réel et à l’époque médiévale. Si les deux sont entourés d’orphelins, volent (aux deux sens du terme), aiment rire, et tirent volontiers l’épée, le héros de la légende fantastique est un adolescent attardé et ingrat, incapable de s’attacher comme de s’engager (cf. sur le site : « La tristesse de Peter Pan ou le déficit d’enracinement dans l’origine »). Celui de la légende tout aussi mythique de Robin, lui, ne sépare pas plus l’autopossession qu’est la liberté de son autodonation que l’Esprit n’est séparé du Fils et du Père. Typique est, de ce point de vue, l’ultime scène (que j’avais oubliée) : assurément, Robin à qui le roi Richard vient d’accorder la main de Marian, ne peut demeurer confiné dans la salle du château, si somptueuse et monumentale soit-elle. L’on n’enferme pas l’Esprit ! Mais, contrairement à la première fois, il ne s’enfuit pas seul. Dans un merveilleux sourire, il part, accompagné de sa Bien-aimée. Esprit de liberté, oui, mais Esprit d’amour et de communion !

Pascal Ide

[1] Non sans un clin d’œil attendri vers le dessin animé de Walt Dysney (Wolfgang Reitherman, 1974) qui a si bien su marier aventures et humour.

  1. Parti pour les croisades, le roi Richard Cœur de Lion (Ian Hunter) est fait prisonnier par Léopold V d’Autriche qui demande une rançon. Plutôt que de payer, le Prince Jean (Claude Rains), frère du roi, s’installe sur le trône d’Angleterre, aidé de son bras droit, l’infâme Guy de Gisbourne (Basil Rathbone) et de l’inconsistant shérif de Nottingham (Melville Cooper). Robin de Locksley, alias Robin des Bois (Errol Flynn), un jeune seigneur saxon et réputé meilleur archer d’Angleterre, refuse de reconnaître l’usurpateur normand. Entouré de son ami de toujours, le troubadour Willy l’écarlate (Patric Knowles) et de ses nouveaux amis, Petit Jean (Alan Hale) et Frère Tuck (Eugene Pallette), il organise dans la forêt de Sherwood la résistance pour sauver son roi. Bientôt, il sera rejoint par la pupille du Prince Jean, dame Marianne (Olivia de Havilland), à qui il a ouvert les yeux sur la misère du peuple saxon opprimé par les Normands.

[/vc_c

Les commentaires sont fermés.