Invincible
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Pays:
USA
Date de sortie:
7 janvier 2015
Durée:
2 heures 57 minutes
Directeur:
Angelina Jolie
Acteurs:
Jack O'Connell, Domhnall Gleeson, Garrett Hedlund ...

Invincible

Invincible, Film de guerre américain et biopic, d’Angelina Jolie, 2015. Tiré du best-seller de Laura Hillenbrand, Unbroken: A World War II Story of Survival, Resilience, and Redemption, 2010. Avec Jack O’Connell, Domhnall Gleeson, Garrett Hedlund.

Thèmes

Amour, espérance et courage.

 

Dès la première scène, la réalisatrice de Au pays du sang et du miel atteste son savoir faire, en filmant,  pour la première fois dans l’histoire du cinéma, une attaque vécue dans une forteresse volante (un bombardier B-24) mitraillée par la DCA japonaise, puis poursuivie par des avions de chasse nipons. Mais elle évoque déjà le thème de son histoire, en montrant la souffrance des soldats, leur solidarité et même leur compassion. Aussi Invincible est-il beaucoup plus qu’un simple film sur un héros de la seconde Guerre Mondiale, vue du côté Pacifique. Et même beaucoup plus qu’une histoire sur un homme d’un courage et d’une ténacité héroïques. Le sous-titre du best-seller de  Laura Hillenbrand qui a décidé Angelina Jolie a acheté les droits du film avec la ténacité qu’on lui connaît, résume tout : c’est une récit de survie, de résilience et de rédemption.

 

En effet, le récit nous conte l’histoire vécue d’un homme qui, à travers des événements extérieurs peu ordinaires, vit une aventure intérieure encore plus extraordinaire, et finalement la plus belle des aventures, celle de la transformation, de la métamorphose. Je distinguerai, bien sûr non sans arbitraire, dans son évolution trois étapes qui sont autant de découvertes et de pratiques d’une attitude intérieure : le courage, l’espérance et l’amour.

Le jeune vaurien, voleur et bagarreur, qui, fils d’immigrés italiens, souffre d’être rejeté de la part des Américains de pure souche, sort de son attitude transgressive par l’exemple autant que par la stimulation de son frère aîné (Alex Russell). Peter va d’abord lui enseigner quelques principes de vie qu’il gardera précieusement, en particulier un dont il fera mémoire à un moment particulièrement éprouvant dans sa vie au camp : « If you take it, you can make it » que la traduction française a rendu par : « Si je tiens, c’est gagné ». Mais aussi, le jour de son départ pour la guerre : « Un moment de douleur te vaudra une vie de gloire », qui est comme une laïcisation du mot de saint Paul : « Notre détresse du moment présent est légère par rapport au poids vraiment incomparable de gloire éternelle qu’elle produit pour nous » (Seconde Lettre aux Corinthiens, ch. 4, v. 17) Mais, plus encore, Peter aide Louie car il croit en lui. Les regards qui nous sauvent sont les regards qui nous espèrent. En l’entraînant à la course à pied, en l’obligeant à se surpasser, il va non seulement lui faire découvrir son talent de coureur de fond, mais lui faire acquérir la vertu de courage qui se réalise au plus haut point dans l’endurance, coûte que coûte.

Cette force intérieure ne suffira pas à Louie lorsqu’il se retrouve dans son canot de sauvetage, en situation tragique d’être isolé au milieu d’un océan quadruplement hostile : apparemment stérile, entre tempêtes et soleil de plomb desséchant, rempli de requins avides, survolé d’avions japonais prêts à les mitrailler. Mais leur pire ennemi est intérieur. Des trois survivants en avril 1943 du crash du
B-24 Liberator, celui qui va mourir après 33 jours, Francis McNamara, dit « Mac » (Finn Wittrock), n’est pas le moins préparé physiquement ou moralement. Certes, il succombe de la dénutrition, de la déshydratation et de la fatigue extrême. Mais, sur ce canot de sauvetage de 1 mètre sur 2, bien davantage du désespoir. Dès l’amerrissage forcé en pleine mer du Pacifique, ses premiers mots sont : « On va mourir ». Ce à quoi, Louie, entraînant Phil dans son sillage, oppose une espérance indestructible. La persévérance, qui a permis à la jeune « Tornade de Torrance » de battre record sur record et de se qualifier à 19 ans à peine, pour les Jeux Olympiques de Berlin de 1936, affronte les obstacles à hauteur d’hommes ; mais ici il ne maîtrise plus rien ; seule l’espérance contre toute espérance lui permet de surpasser la difficulté autrement insurmontable de tenir alors que l’horizon d’espoir est aussi bouché que l’horizon maritime ne l’est pas (pas un navire ou un avion amis ne pointera). C’est justement alors que Louie retrouve la foi de son enfance et fait une promesse à Dieu : celle de se consacrer à lui s’il s’en sort. Or, « la foi est une façon de posséder ce que l’on espère » (Lettre aux Hébreux, ch. 11, v. 1).

Pourtant, une épreuve encore plus inimaginable attend le soldat de 26 ans (1917-2014) : non pas seulement celle de la dureté des camps ; non pas seulement celle de leur succession qui semble ne jamais s’arrêter (de la forêt à la ville, de la ville à la montagne) et de leur escalade en dureté qui semble illimitée ; non plus celle des souffrances indicibles infligées par « l’Oiseau » qui le prend pour souffre-douleur, sans doute selon un bien classique processus de rivalité mimétique ; mais celle, autrement plus subtile, et encore plus intérieure que la désespérance : la haine. Face à la violence arbitraire et irrationnelle de ce gradé sadique et déséquilibré, Louie est tenté de répondre de la même manière ; mais la violence  amère assassinerait son cœur plus sûrement et plus rapidement que la violence physique de Watanabe assassinerait son corps. Ici, la scène décisive se déroule entre lui et un autre prisonnier, John Fitzgerald (Garrett Hedlund). « Je vais le tuer », lui dit Louie. Et John lui fait comprendre qu’alors, le commandant japonais aurait vraiment gagné ; au fond, il serait devenu comme lui. C’est en tenant jusqu’au bout que Louie sera véritablement victorieux. C’est alors qu’il se souvient de la parole de son frère : « If you take it, you can make it ». Peut-être se remémore-t-il aussi les fortes paroles de son curé commentant le début du livre de la Genèse : « Au commencement, Dieu créa le jour, mais aussi la nuit. Accepte les ténèbres. Aime ton ennemi ». En tout cas, Louie renonce à sa violence assassine et, lorsque le camp sera enfin libéré le 20 août 1945, deux semaines après Hiroshima, dans une scène très sobre, presque trop sobre, on le voit monter dans la chambre de Watanabe, en découvrir l’austérité presque monacale et s’attarder sur l’unique photo qui le montre, enfant, à côté, d’un père militaire, au visage sévère. Son regard est paisible. Se devine, voire se dessine peut-être déjà, le pardon qu’il donnera quelques années plus tard. De fait, sa biographie, seulement évoquée avant le générique final, nous apprend que, lorsqu’il rentre en Californie, Louie, à l’instar d’innombrables vétérans, vivra les symptômes du stress post-traumatique caractéristiques des soldats qui sont revenus du voyage au bout de l’extrême. Ce syndrome, aujourd’hui bien connu, était à l’époque encore innommé. Pour Louie, il se traduit par des angoisses diurnes, des cauchemars nocturnes, la compensation dans l’alcool, le combat quotidien contre soi. Jusqu’au jour où, en septembre 1949, accompagné de Cynthia qu’il a récemment épousée, il entend le sermon d’un jeune prédicateur évangélique, Billy Graham, il comprend alors la nécessité vitale du pardon, il se souvient de la promesse faite à Dieu, sur son canot de survie. Désormais, il dévouera au pardon restant de sa vie, allant jusqu’à retourner au Japon pour faire la paix avec ses bourreaux. C’était non plus seulement de persévérance et d’espérance dont Louie avait à vivre, mais d’amour : « La charité n’entretient pas de rancune ; elle supporte tout, elle fait confiance en tout, elle espère tout, elle endure tout » (Première Lettre aux Corinthiens, ch. 13, v. 5-7).

 

Le héros est-il donc « invincible » ? La traduction française est doublement malheureuse : en ajoutant au titre original du film et du roman éponyme, Unbroken – c’est-à-dire « intact » ou, si ce terme existait, « imbrisé », « incassé » –, le suffixe « ible », qui renvoie à capacité, elle fait de Louie une sorte de super-héros au destin exceptionnel, donc l’éloigne de nous : il est d’autant plus admirable qu’il est inimitable ; en évoquant le titre du film fantastique de Mike Night Shyamalan, Unbreakable (2000), que l’on a rendu par Incassable, il fait croire que cette force est sinon physique, du moins morale (beaucoup de critiques relèvent son courage), alors qu’elle est, plus encore, spirituelle.

Qu’il est bon, en ces jours de sidération et de mobilisation à la suite de l’attentat islamiste contre les locaux de Charlie Hebdo, de donner à voir une religion qui ne se réduit pas à sa pathologie qu’est le fondamentalisme violent. Plus encore de montrer, dans des images sompteuses, parfois violentes, jusqu’à être difficilement insoutenables, mais jamais décourageantes, la capacité de transformation et de fécondité qu’offre la religion qui fait de l’Amour le nom de Dieu, et donc celui de l’homme qui fut créé à son image.

Pascal Ide

 

Histoire

L’histoire commence en 1942, en pleine seconde Guerre Mondiale des Américains contre les Japonais. Un soldat américain, Louis « Louie » Zamperini (Jack O’Connell) part pour une mission de sauvetage lorsque, à la suite d’avaries, son avion s’écrase en pleine mer, tuant huit membres de l’équipage et laissant trois rescapés sur deux canots de sauvetage. Des flashbacks nous font découvrir que Zamperini est un ancien coureur olympique médaillé du 5000 mètres, mais aussi, quand il était enfant, un prédélinquant souffrant de l’identité de « rital » que lui renvoie ses camarades d’école. Cernés par les requins, menacés par la soif, la faim et plus encore le découragement, mitraillés par un chasseur japonais,  deux d’entre eux, Russell Allen Phillips dit « Phil » (Domhnall Gleeson) et Louie, survivent quarante-sept jours. Ils sont alors capturés par la marine japonaise et envoyés dans un camp de prisonniers de guerre dirigé par Mutsushiro Watanabe (Miyavi), un chef sadique qui, entre fascination et répulsion, prend l’ex-champion comme tête de turc. Après avoir surmonté cette première épreuve physique surhumaine, va-t-il pouvoir surmonter cette nouvelle adversité, encore pire que la première ou en sortir définitivement brisé ?

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