Benoît XVI. Une théologie de l’amour I, 3 (1ère partie)

Chapitre 3

L’amour comme don radical de soi

Benoît XVI centre donc son enseignement sur l’amour. Mais en quoi consiste l’amour ? Comme l’on sait, aujourd’hui, le terme « amour », intensément investi, présente un sens précis, d’ordre affectif : l’amour est principalement un sentiment, celui que l’on éprouve face à un être (principalement une personne) qui nous fait du bien ou à qui on veut du bien [1].

Tout en étant attentif à cet aspect affectif, le pape élargit et enrichit considérablement la signification de l’amour et surtout se refuse à le claquemurer en ce monde. Pour en balbu­tier le mystère insondable, il multiplie les voies d’approche qui convergent vers un sens central.

1) Éros, agapè et philia :

Le Saint Père a consacré toute la première partie de sa lettre encyclique Deus caritas est à l’analyse du sens biblique de l’amour divin [2]. Pour ce faire, il a surtout convoqué deux termes grecs, éros et agapè, laissant presque totalement de côté un troisième substantif grec, philia, qui signifie « amitié » [3]. Résumons très brièvement les résultats de son en­quête [4]. La distinction entre éros et agapè, de prime abord simple, s’avère complexe. L’encyclique la conçoit sous pas moins de cinq angles différents, que résume le tableau synoptique suivant :

 

Référence

Éros

Agapè

Point de vue

N. 4 et 5

amour purifié ou à puri­fier

amour purifiant

éthique

N. 6

amour égoïste

amour tourné vers l’autre

le terme (ou l’objet) de l’amour

N. 7, § 1

amour mondain ou as­cendant

amour divin ou des­cen­dant

l’origine de l’amour

N. 7, § 2

amour reçu

amour donné

la dyna­mique du don

N. 9-15

amour désirant la com­munion

amour asymétrique

la réciprocité

 

Enfin, ces divers couples semblent conduire à une distinction fondamentale : éros est à agapè ce que l’amour humain est à l’amour sanctifié, divinisé par la grâce.

2) L’amour comme réponse

Pour exposer ce qu’est l’amour, Benoît XVI emploie aussi certaines catégories descrip­tives [5]. Il approche par exemple les relations entre l’amour divin et l’amour humain en termes d’ap­pel et d’écoute ou de don et de réponse [6] : « l’amour […] est don gratuit, au­quel on répond par le don de soi [7] » ; « Que le Seigneur – disait le pape à la Journée de la vie consacrée 2006 – renouvelle chaque jour en vous et en chaque personne consacrée la réponse joyeuse à son amour gratuit et fidèle [8] ». Comme l’écoute suppose une parole, l’amour humain s’adosse à l’amour de Dieu. Il se dessine en fi­ligrane la présence du couple décisif qui sera analysé plus loin dans ce chapitre : réception (écoute)-donation (réponse).

3) L’amour comme proximité

Le pape décrit aussi l’amour en terme de proximité et d’éloignement [9]. Dès sa toute première audience, il se dit « soutenu par la proximité spirituelle de tout le Peuple de Dieu [10] ». Il remercie les cardinaux de leur « proximité spirituelle » et de leur « coopération effective [11] », qui sont autant d’attestation de leur amour effectif. Souvent, dans ses Angélus, le pape exprime sa compassion (donc son amour) en terme de « proximité spirituelle » avec tel groupe, tel pays, telle population en souffrance [12]. Dieu nous est proche, s’intitule un ou­vrage de Joseph Ratzinger. En celui-ci, sans nullement nier la doctrine de la transsub­stan­tiation – mais au contraire, en la défendant –, le théologien relisait la présence réelle comme « la proximité de Dieu si grande qu’elle ne peut l’être davantage [13] ».

Ce que Benoît XVI dit, il en vit. Alors que l’archevêque d’Aoste était interrogé le 17 juillet 2006 au micro de Radio Vatican, le journaliste lui demanda de partager une anecdote sur le séjour de repos que le pape accomplissait dans son diocèse. Mgr Giuseppe Anfossi ac­cepta de raconter une histoire qu’il qualifia de « très personnelle » : « Dès que nous sommes montés en voiture pour le transfert de l’aéroport jusqu’à la maison, les premières paroles que le pape m’a adressées ont été pour demander des nouvelles de la santé de ma ma­man. Sincèrement, je ne m’attendais pas à une telle délicatesse »…

4) L’amour comme « oui »

C’est peut-être en termes de « oui » et de « non » que le Saint Père préfère aborder l’identité de l’amour. Il le signifie en introduisant des guillemets qui transforment l’adverbe en un sub­stantif [14]. Joseph Ratzinger avait déjà parlé de l’amour en termes de « oui » dans son petit ouvrage, inspiré de son ami et philosophe allemand Josef Pieper [15], sur les vertus théologales [16]. Aimer, c’est dire « oui » à celui que l’on aime [17]. L’amour est un assenti­ment fondamental à l’égard de l’autre, une manière de lui dire : il est bon que tu existes. Ce « oui » naît de l’expérience décisive selon laquelle l’existence de l’être aimé suscite un sentiment de bonheur. Cette émotion qui ébranle celui qui aime lui signale qu’un « tu », un autre, digne d’être aimé, se présente à lui. Ce « oui » anticipe tout désir, tout retour sur soi, toute prise de conscience que l’autre m’enrichit par sa présence. Il précède aussi toute décision. Après, le sentiment se transforme en un acte de liberté, un « oui », cette fois consenti, que l’on offre à l’autre.

Or, le « oui » caractérise l’attitude du Christ à l’égard de son Père. C’est ainsi que Benoît XVI relit la parole que la Lettre aux Hébreux attribue au Fils lors de son incarnation : « Voici je viens… pour faire […] ta volonté » (He 10,7) : le « Je viens pour faire ta volonté » est identi­quement « le  du Fils » éternel à son Père [18].

À son tour, continue le pape dans la même homélie, Marie est celle qui dit « oui » et nous entraîne dans son sillage à le formuler à notre tour : « avec son , provenant du plus profond de son cœur, elle t’a porté dans son sein [19] ». « Marie, tu es , toi qui en accueil­lant les projets du Créateur par ton , nous as ouvert la voie du salut. À ton école, ap­prends-nous à prononcer nous aussi notre  à la volonté du Seigneur [20] ». Parole essentiellement relative, le « oui » à Dieu est intimement corrélé au « non » à ce qui s’y oppose : « Donne-nous le cou­rage de dire  aux pièges du pouvoir, de l’argent, du plaisir – continue Benoît XVI dans le même texte – ; aux gains malhonnêtes, à la cor­ruption, à l’hypocrisie, à l’égoïsme et à la violence.  au Malin, prince trompeur de ce monde.  au Christ, qui dé­truit la puissance du mal par la toute puissance de l’amour. Nous savons que seuls des cœurs convertis à l’Amour, qui est Dieu, peuvent construire un avenir meilleur pour tous ». Enfin, à la suite du Christ et à l’exemple de Marie, « les saints ont eu l’humilité et le courage de répondre, et ils ont renoncé à tout pour être ses amis » [21].

On pourrait objecter que le « oui » ne signifie pas seulement l’amour, mais toute attitude d’ouverture, quelle qu’elle soit. De fait, le pape l’emploie aussi pour signifier l’attitude de foi. C’est ainsi qu’il décrit ce qu’il appelle la première conversion d’Augustin : « La première conversion fondamentale fut le chemin intérieur vers le christianisme, vers le  de la foi et du baptême [22] ». Il demeure que le « oui » possède chez Benoît XVI un sens fort et res­treint, ici celui d’une ouverture radicale initiant une vie nouvelle : le « oui » est un commencement qui à la fois rompt avec le passé et instaure un avenir. Or, cette rupture instauratrice requiert la visée d’un bien, donc un amour. C’est ainsi que, dans le même passage où il parle de cette conversion, le pape explique qu’elle a été préparée par « la passion » d’Augustin « pour la vérité » (qui « est la véritable parole-clé de sa vie ») ; or, pour l’évêque africain, qui dit passion, dit amour.

Une nouvelle fois, ce que Benoît XVI enseigne, il l’a appris de sa vie autant qu’il essaie d’en vivre. Je citerai un peu longuement une confidence du nouveau pape car elle pré­sente, outre ce qui vient d’être dit, de multiples enseignements : elle s’achève sur un « oui » auquel elle donne un poids singulier ; elle anticipe ce qui sera développé sur le don total et dépouillant de soi ; elle montre son attention aux signes, non sans enracinement dans l’Écriture ; elle dit aussi, de nouveau, combien Jean-Paul II est un exemple qui éclaire chacun de ses pas, sans pour autant l’empêcher d’être lui-même. Quelques jours après son élection, le 25 avril, Benoît XVI avait confié à ses compatriotes de Bavière et de toute l’Allemagne ce qu’il avait vécu à la chapelle Sixtine :

 

« Quand progressivement le déroulement des votes m’a fait comprendre que, pour ainsi dire, le couperet allait tom­ber sur moi, j’ai été pris d’un sentiment de vertige. Je croyais avoir achevé l’œuvre de ma vie et pouvoir espérer finir mes jours dans la quiétude. Avec une profonde conviction, j’ai dit au Seigneur : ne me fais pas cela ! Tu en as de plus jeunes et de meilleurs qui peuvent entreprendre la grande tâche avec un tout autre élan et une tout autre vigueur. À ce mo­ment, j’ai été touché très fort par un petit billet que m’a écrit un confrère du collège des cardinaux. Il me rappelait que, lors de la liturgie pour Jean-Paul II, j’avais centré l’homélie de l’Évangile sur la parole que le Seigneur avait dite à Pierre au lac de Gennésareth :  ‘Suis-moi !’ J’avais exposé comment Karol Wojtyla s’est vu sans cesse adresser cet ap­pel du Seigneur et que, chaque fois, il lui fallait abandonner beaucoup de choses et dire simplement : Oui, je te suis, même si tu me conduis où je ne voudrais pas. Le confrère m’écrivait : ‘‘Si le Seigneur devait te dire : ‘Suis-moi’, alors rappelle-toi ce que tu as prê­ché. Ne te refuse pas ! Sois obéissant, comme tu l’as dit du grand Pape retourné à Dieu’’. Cela m’est allé droit au cœur. Les chemins du Seigneur ne sont pas faciles, mais nous ne sommes pas créés pour la facilité, au contraire pour ce qui est grand, pour ce qui est bien. Ainsi, en fin de compte, il ne me restait plus qu’à dire Oui [23] ».

5) L’amour comme don de soi

Les catégories d’écoute, de réponse, de proximité, de « oui », si profondes soient-elles, demeurent encore descriptives. Qu’est-ce que l’amour en son noyau intime, en son es­sence ? L’amour s’identifie don de soi. Aimer signifie avant tout se donner. Une telle affir­ma­tion signifie au moins deux choses.

  1. Tout d’abord, aimer, c’est être tourné vers l’autre : « La charité s’exprime dans le don de soi à autrui », écrit le pape dans son Message pour le Carême 2006. L’amour est sortie de soi, extase, a-t-il été constaté plus haut. Ajoutons maintenant que cet auto-dépassement est orienté vers l’autre. Même si l’expression « don de soi » n’est pas biblique, elle traduit une expres­sion qui, elle, est profondément enracinée dans l’Écriture : le « pour nous » et « pour la multi­tude ». Ces expressions, en effet, s’appliquent presque exclusivement à la mort du Christ et signifient que celle-ci, infligée par violence, a été transformée par le Christ en acte d’amour [24]. Aimer, c’est être donné à l’autre, vivre pour l’autre, adopter une attitude pro nobis : « La vraie contemplation se démontre dans les œuvres de charité. Par conséquent, le signe que nous avons vraiment prié, que nous avons rencontré le Christ, est que nous sommes [25]. »

Cet enracinement biblique explique peut-être un constat qui pourrait se retourner en ob­jection : l’expression « don de soi » n’apparaît que 41 fois, le terme plus abstrait « donation » 2 fois, le terme concret « cadeau » 6 fois. En revanche, le terme « don » fait partie du vocabulaire technique de Benoît XVI : présent plus de 600 fois, il est le plus souvent compris dans le sens théologique d’un don de Dieu, d’un don qui vient d’en haut (cf. Jc 1,17) [26]. De fait, le pape souligne avec force le caractère eucharistique de la vie chrétienne [27] : celle-ci, ex­plique-t-il, se résume et s’accomplit dans ce que Paul appelle « logikè latréia » (Rm 12,1). Cette expression quasi intraduisible signifie littéralement « culte selon le logos » (« culte se­lon la rai­son », autrement dit « culte raisonnable ») mais aussi « culte selon le Logos (« culte selon le Verbe ») ; et comme Logos est l’autre nom du Fils chez saint Jean, l’expression si­gnifie donc « culte filial ». Elle est souvent rendue par « culte spirituel » ; or, celui-ci consiste en une « offrande totale de la personne en communion avec toute l’Église [28] » ; le disciple est donc celui qui, à l’image du Christ, aime et se livre pour les autres (cf. Ga 2,20).

  1. Se donner ne signifie pas seulement – en aval – s’ouvrir à l’autre, mais – en amont – agir avec une totale gratuité [29]. L’amour que Dieu nous porte est « gratuit et fidèle [30] ». Précédant toute initiative humaine et donnant sans besoin de retour, « l’amour divin [est absolument] gratuit [31] ». Considérant la beauté stupéfiante de l’appel au sacerdoce, le séminariste pourrait se demander « dans la prière : Seigneur, mais pourquoi moi ? ». Benoît XVI répond, citant implicitement le poète religieux allemand Angelus Silesius : « Et l’amour n’a pas de ‘pourquoi’, il est don gratuit, auquel on répond par le don de soi [32] ».

En soulignant le don de soi, l’actuel Pontife romain s’inscrit dans la continuité de son pré­décesseur [33]. Celui-ci avait en effet longuement médité une parole de Gaudium et spes : « l’homme, seule créature sur terre que Dieu a voulue pour elle-même, ne peut pleinement se trouver que par le don désintéressé de lui-même [34]« et l’avait reprise et commentée par le menu dans de nombreux discours [35]. Quoique la lettre n’apparaisse pas (Benoît XVI ne cite jamais ce passage), son esprit imprègne en profondeur sa pensée, ainsi que nous allons progressivement le constater.

Cette intuition constitue l’un des fils rouges de la pensée de Joseph Ratzinger et remonte à ses premiers écrits [36] comme dans ses ouvrages plus tardifs [37]. Elle est développée dans l’une de ses œuvres les plus marquantes et les plus connues, Introduction au chris­tianisme : l’homme, y est-il dit, est un « être-avec », mais, plus encore, un « être-pour » : c’est le mot « pour » – dont l’origine biblique fut soulignée plus haut – qui « exprime la véritable loi fondamentale de l’existence chrétienne » ; or, vivre pour, c’est se donner, ainsi que le Christ le montre sur la Croix et comme le chrétien est appelé à le faire par l’Esprit [38]. Le profes­seur de théologie exprime cette idée dans une « note annexe », dont le titre modeste et la situation latérale dans l’organisation de l’ouvrage sont trompeurs. Cette note constitue, en fait, selon les observateurs autorisés, « comme un grand rouage qui engrène tous les autres, et la pensée sur ce point est constante, de Joseph Ratzinger à Benoît XVI [39] ».

La « définition » de l’amour comme attitude « pour l’autre », comme offrande de soi, ne naît bien entendu pas d’un constat socio­logique. Elle ne s’origine pas non plus dans une médi­tation philosophique de ce qu’il devrait être idéalement ni d’une déduction, comme des­cendante, de ce que nous enseigne la vie trinitaire. Elle surgit du cœur même de la Révé­lation chrétienne. Nous l’avons vu, Benoît XVI contemple Dieu amour à travers ce que Jé­sus nous en a fait connaître (cf. Jn 1,18). Or, que nous révèle-t-il ? Tout ce que Jésus a en­seigné et plus encore accompli affirme que l’amour est don de soi. Surtout, la parole-évé­nement ultime, « la croix du Christ », est l’ »expression extrême de son don de soi [40] ». Dès lors, le premier thème, la perspective théo-logique (cf. chap. 1), rejoint le second thème, la centralité de l’amour (cf. chap. 2) : le Dieu chrétien est amour parce qu’il se donne. Telle est la raison avancée par Jean lui-même : « Dieu est amour. […] En ceci consiste l’amour : […] Dieu […] a envoyé son Fils en victime de propitiation pour nos péchés » (1 Jn 4,8.10). Si donc Dieu est au cœur de la méditation et du message de Benoît XVI, celui-ci ne peut qu’identifier l’amour au don de soi. Une comparaison avec Jean-Paul II pourrait éclairer. Les manières dont les deux papes abordent le mystère de l’amour présentent de nom­breux points communs : leur approche s’enracinent à la fois dans l’Ancien et le Nouveau Testament ; leur perspective marie la Parole de Dieu et la philosophie (précisément la phénoméno­logie) ; ils prennent en compte de manière appuyée les catégories de don de soi et de communion ; etc. Il demeure toutefois une différence de fond confirmant ce qui a été déjà exposé : hors la lettre encyclique Dives in misericordia, le précédent pape part volontiers de l’amour humain, notamment conjugal (pour l’élargir à l’amour sponsal) [41] ; en revanche, Benoît XVI adopte d’em­blée une perspective théo-logique, c’est-à-dire part de la manière dont Dieu aime.

Enfin, ce que le Christ vit, ses disciples sont appelés à y participer : « Bien aimés, si Dieu nous a ainsi aimés – continue saint Jean –, nous devons, nous aussi, nous aimer les uns les autres » (1 Jn 4,11). Et ce commandement vaut en premier lieu pour les plus proches que sont les Apôtres. Voilà pourquoi « la petite autobiographie spirituelle que saint Paul nous a laissée dans sa Lettre aux Galates [42] » est capitale : « Ma vie aujourd’hui dans la condition humaine, je la vis dans la foi au Fils de Dieu qui m’a aimé et qui s’est livré pour moi » (Ga 2,20). Le pape commente : « Paul ne vit donc plus pour lui, pour sa propre justice. Il vit du Christ et avec le Christ » ; et il poursuit en faisant appel au registre du don de soi : « en se donnant lui-même, non plus en se cherchant et en se construisant lui-même [43] ».

Pascal Ide

[1] Sur les multiples facettes de l’amour aujourd’hui, cf. Xavier Lacroix, Les mirages de l’amour, coll. « Questions en débat », Paris, Bayard, Outremont, Novalis, 1997.

[2] La lettre pour le Carême 2007 reprend cette distinction décidément centrale.

[3] Hors l’encyclique, rare est l’emploi des termes « agapè » (27 fois en tout dont, dans l’encyclique : 18 fois) et « éros » (60 fois dont, dans l’encyclique : 33 fois) et nul celui de « philia » (les 2 uniques mentions se trouvent dans l’encyclique).

[4] Pour le détail, je me permets de renvoyer à Pascal Ide, « La distinction entre éros et agapè dans Deus caritas est », Nouvelle revue théologique, 128 (2006) n° 3, p. 353-369. Je reprends ici l’essentiel de l’abstract de l’article, les numéros entre parenthèses renvoyant à ceux de l’encyclique et de ses paragraphes.

[5] Ces catégories ont été décrites de manière rigoureuse par un courant philosophique, la phénoménologie. Cf., par exemple, Jean-Louis Chrétien, L’appel et la réponse, coll. « Philosophie », Paris, Minuit, 1992 ; « Note furtive sur la présence », Études, septembre 2001, n° 3953, p. 187-195, repris dans Promesses furtives, coll. « Paradoxe », Paris, Minuit, 2006, p. 13-23. La première approche phénoménologique des catégories de proximité et l’éloignement se trouve dans Sein und Zeit (1927) où Martin Heidegger décrit la spatialité propre au Dasein comme « proximité » (Nähe) (§ 22) et « é-loignement » (Ent-fernung) (§ 23).

[6] Les termes « écoute » et « écouter » : près de 250 occurrences ; les mots « réponse » et « répondre » : plus de 580 fois ; le substantif « appel » : plus de 200 fois et le verbe « appeler » : plus de 900 fois (on ne rencontre pas les verbes « interpeller » ou « convoquer », mais cela tient à la traduction).

[7] Rencontre avec les séminaristes lors des Journées Mondiales de la Jeunesse, Cologne – Saint-Pantaléon, vendredi 19 août 2005. Nous reprendrons cette phrase plus bas, considérant non plus la réponse, mais le don de soi.

[8] Homélie en la fête de la Présentation du Seigneur, jeudi 2 février 2006.

[9] Le terme « proche » qui signifie aussi prochain se trouve 383 fois ; « proximité » : 118 fois ; « éloigner », « éloignement » : 95 fois.

[10] Audience générale, mercredi 27 avril 2005.

[11] Discours aux cardinaux, vendredi 22 avril 2005.

[12] Cf., par exemple, Angélus du lundi 15 août 2005, du dimanche 19 février 2006, du dimanche 9 avril 2006, etc.

[13] Joseph Ratzinger, Dieu nous est proche. L’Eucharistie au cœur de l’Église, trad. Maria Linnig, Paris, Parole et Silence, 2003, p. 78. Cf. « La proximité du Seigneur dans le sacrement », chap. v. Sur la défense de la transsubstantiation, cf. p. 88-98. Sur la proximité du Seigneur, cf. deux autres chap. vi et vii du même livre.

[14] La fréquence du vocable est, une nouvelle fois, significative : sur près de 250 occurrences, un peu plus de la moitié d’entre elles (125) est substantivée.

[15] A propos de l’influence de Joseph Pieper sur Joseph Ratzinger, cf. Bernard N. Schumacher, « Philosophie de la culture. L’influence de Joseph Pieper dans la pensée de Joseph Ratzinger », Joseph Ratzinger au-delà des clichés, Dossier de la revue Kephas, 17 (janvier-mars 2006), p. 127-133. Par exemple, le livre de Joseph Pieper A propos de l’amour, comporte un chapitre sur « L’unité entre amour-caritas, et amour érotique », autrement dit entre agapè et éros anticipe certains développements de l’encyclique Deus caritas est.

[16] Joseph Ratzinger, Regarder le Christ. Exercices de foi, d’espérance et d’amour, trad. Bruno Guillaume, Paris, Fayard, 1992, p. 104-106 : « L’amour en tant que oui ».

[17] Cette approche retrouve la perspective traditionnelle qui, avec saint Thomas, fait de l’amour le sentiment éveillé par la présence du bien ; mais elle lui ajoute une dimension phénoménologique et personnaliste. Le développement qui suit reprend brièvement le cœur de l’analyse de Regarder le Christ.

[18] Homélie de la messe au Sanctuaire d’Altötting, lundi 11 septembre 2006.

[19] Ibid.

[20] Solennité de l’Immaculée Conception 8 décembre 2006, place d’Espagne.

[21] Homélie de Canonisation le 15 octobre 2006.

[22] Homélie de la messe à Pavie, dimanche 22 avril 2007.

[23] Discours aux pèlerins allemands venus à Rome pour la messe d’intronisation de son pontificat, 25 avril 2005. Traduction modifiée.

[24] Cf. Harald Riesenfeld, art. « Huper », Theologisches Wörterbuch zum Neuen Testament, Begründet von Gerhard Kittel, hg. von Gerhard Friedrich, Stuttgart-Berlin-Köln-Mainz, W. Kohlhammer Verlag, 9 vol., 1933-1977, tome VIII (1969), p. 510-518, ici p. 511-515.

[25] Rencontre avec le clergé du diocèse de Rome, jeudi 22 février 2007, réponse à la première question.

[26] Enfin, il existe plus de 530 occurrences des termes « offrande » et « offrir » et 178 pour le vo­cable, lui aussi biblique, de « sacrifice ».

[27] L’exhortation Sacramentum caritatis parle de « la nature intrinsèquement eucharistique de la vie chrétienne » (n. 71).

[28] Ibid., n° 70. Il faudrait étudier en détail cet important numéro. Joseph Ratzinger s’est déjà expliqué sur ce sujet (cf. par exemple « Eucharistie et mission », Conférence au vingt-troisième congrès eucharistique national italien, 20-28 septembre 1997, in Cardinal Joseph Ratzinger, Liturgie et mission, Paris, Centre Internationale d’Études Liturgiques, 2003, p. 11-51, le § : « Un culte : la vie chrétienne considérée comme Eucharistie », p. 41-46).

[29] Une nouvelle fois, les repérages lexicaux sont pauvres : « gratuit » : 30 fois ; « désintéressé » : 15 fois dont « don désin­téressé » : 2 fois ; « don sincère » : 2 fois.

[30] Homélie en la fête de la Présentation du Seigneur, jeudi 2 février 2006.

[31] Message pour la journée mondiale des missions 2006.

[32] Discours lors de la rencontre avec les séminaristes à Cologne – Saint-Pantaléon, vendredi 19 août 2005.

[33] Ainsi, dans le discours à la Curie romaine du jeudi 22 décembre 2005, Benoît XVI cite l’ouvrage de Jean-Paul II, Mémoire et identité où celui-ci parle notamment de « l’amour, qui est don de soi ».

[34] Concile Œcuménique Vatican II, Constitution pastorale sur l’Église dans le monde de ce temps Gaudium et spes, n° 24, § 3.

[35] Cf. Pascal Ide, « Une théologie du don », art. déjà cité.

[36] Cf. par exemple Joseph Ratzinger, art. « Substitution », Encyclopédie de la foi, dir. H. Fries, trad. franç., Paris, Le Cerf, 4 vol., tome IV, 1967, p. 267-277 ; Frères dans le Christ. L’esprit de la fraternité chrétienne, trad. H.-M. Rochais et J. Evrard, Paris, Le Cerf, 1962, 2005, p. 93-105 : « La communauté fraternelle chrétienne n’est pas contre, mais pour le tout » (p. 93. Souligné dans le texte).

[37] Cf. Cardinal Joseph Ratzinger, Un chant nouveau pour le Seigneur. La foi dans le Christ et la liturgie aujourd’hui, trad. Joseph Feisthauer, Paris, Desclée, 1995, p. 40-45 : « Le Christ est la vie. L’ et l’amour ».

[38] Cf. Joseph Ratzinger, La foi chrétienne hier et aujourd’hui, trad. E. Ginder et P. Schouver, coll. « Traditions chré­tiennes », Paris, Le Cerf, Mame, 1969, 21985, « Note annexe. Structures de la réalité chrétienne », p. 166-188, ici les deux premières propositions, p. 170-175.

[39] François Bousquet, « Benoît XVI et La foi chrétienne hier et aujourd’hui », Revue d’éthique et de théologie morale. Le Supplément, n° 239 (juin 2006), p. 19-44, ici p. 38.

[40] Audience générale, mercredi 8 novembre 2006.

[41] Ce qui ne l’empêche pas de l’éclairer à partir de l’amour trinitaire (cf. les références dans Pascal Ide, « Don et théologie du corps dans les catéchèses de Jean-Paul II sur l’amour dans le plan divin », art. cité, p. 178-182, 193, 196-197, 204).

[42] Homélie de la veillée de Pâques, dimanche 16 avril 2006.

[43] Audience générale, mercredi 8 novembre 2006. Cf. aussi le commentaire qu’en donne le pape dans l’homélie de la veillée pascale 2006 qui vient d’être citée.

6.2.2023
 

Les commentaires sont fermés.